La * causalite *

Publié le 12 octobre 2008 par Osmose

La causalité est un concept épistémologique formalisant le fondement même de toute démarche scientifique qui consiste à organiser systématiquement les faits empiriques et de leur donner sens.


Cette définition constructiviste de l’épistémologie s’oppose à l’idée de causalité conçue comme un postulat métaphysique, selon lequel la Raison humaine peut saisir l’être et la raison d’être des choses.
Dans le champ scientifique, la causalité est donc le lien construit entre une cause (ou un ensemble de causes) et une conséquence.


La version la plus épurée de la causalité est dite linéaire (A, donc B, avec éventuellement des étapes causales intermédiaires) ; elle suppose une antériorité, même infime, de la cause sur l’effet.
De ce fait, elle a partie liée avec l’historicité et se moule aisément dans les modes d’écriture linéaire fondés justement sur la succession.


Lorsque la liaison de cause à effet est nécessaire, inévitable, on est dans le déterminisme (terme généralement interprété en géographie comme une liaison entre une cause relevant de la nature et une conséquence d’ordre social).
Des constructions causales peuvent rester linéaires tout en introduisant des causalités multiples (A et/ou A’, donc B) ; mais généralement la multiplicité des causes introduit des effets rétroactifs.


Il est très rare, en effet, de pouvoir isoler des causalités purement linéaires, sans que des effets réagissent à leur tour sur quelque élément des chaînes causales. C’est, de façon immédiatement évidente, le cas dans l’analyse des faits de société - mais pas seulement.


On parle alors, pour la mise en ordre scientifique construite, de causalité circulaire (A, donc B, donc A’, donc B’, etc). Lorsque l’ensemble des liens peut être suffisamment isolé du contexte, être pensé comme un système, la formalisation de l’ensemble causal peut alors prendre la forme d’un modèle.
Cependant, même si ce n’est guère l’usage, une causalité strictement linéaire et nettement formalisée est également une modélisation.


Le glissement de vocabulaire de causalité à modélisation cache plutôt un passage de l’insistance de la recherche des causes antérieures (avec l’idéal d’une cause initiale, d’une première instance) à la mise en évidence des processus.


Cela peut apparaître paradoxal, dans la mesure où cette seconde perspective correspond à une plus grande exigence d’explication, alors que le contexte historiciste se contente plus des liaisons floues de la compréhension. Il est vrai que dans bien des cas, la formalisation d’une causalité complexe est impossible, et que, sauf à renoncer à toute approche rationnelle, une interprétation moins formalisée mais plus riche de la réalité, une herméneutique, est seule envisageable ; mais alors, la causalité est difficile à isoler et la spécificité de l’approche scientifique risque de se diluer.


Une difficulté essentielle de toute mise en évidence de relations de causalité réside dans la distinction entre cause(s) et contexte(s), contingence(s).
Lorsqu’un ensemble de causalités peut se créer et se reproduire de façon très autonome par rapport au champ de contingences, c’est une logique d’auto-organisation.


Mais on parle de causalité contingente (Cournot) lorsque des ensembles causaux déterminés, régis par des lois propres, entrent en interférence réciproque sans former un nouvel ensemble causal déterminé de niveau supérieur, mais s’articulent selon des processus au moins partiellement aléatoires.


Ainsi, dans des systèmes aussi complexes, une cause mineure (une fluctuation) peut déterminer des relations en chaînes complexes modifiant profondément tout l’ensemble (une "catastrophe").


Le passage à un nouvel ensemble de systèmes est alors une bifurcation.