Si vous avez des amis qui ne comprennent pas bien "ce que veux Bayrou", envoyez leur une copie plus bas du billet épatant [(c), évidemment] de Pierre-Luc Séguillon, ici aussi sur son blog. Intéressant aussi l'article de Renaud Pila sur le site de LCI (lire aussi les réactions). Et enfin, pour comprendre ceux qui le tiennent pour quantité négligeable, une critique acerbe (méchante?) mais bien écrite de François Bayrou, par Lilian Massoulier, ici.
Pierre-Luc Séguillon : François Bayrou est convaincu qu’il peut gagner la prochaine présidentielle. Paradoxalement, sa marginalité et son isolement relatif, depuis un an, n’ont fait que conforter cette certitude en favorisant sa posture de héros de la résistance au sarkozysme. Pour réaliser ce que le leader du Modem considère comme une véritable révolution politique qui ferait exploser le vieux partage entre la droite républicaine et la gauche socialiste, François Bayrou sait qu’il lui faut absolument arriver au moins en deuxième position lors du premier tour de la prochaine élection présidentielle, ce qu’il n’est pas parvenu à faire l’an passé. Il aura donc besoin d’électeurs aujourd’hui captifs de la gauche socialiste. Pour les conquérir, François Bayrou envisage deux scénarios possibles.
Bayrou : épopée 2012
Quand François Bayrou appelle au rassemblement des forces de l’opposition pour la prochaine présidentielle, il s’agit bien entendu dans son esprit d’un rassemblement autour de sa personne ! Le leader du Modem tient le raisonnement suivant. François Bayrou est convaincu qu’il peut gagner la prochaine présidentielle. Paradoxalement, sa marginalité et son isolement relatif, depuis un an, n’ont fait que conforter cette certitude en favorisant sa posture de héros de la résistance au sarkozysme.
Pour réaliser ce que le leader du Modem considère comme une véritable révolution politique qui ferait exploser le vieux partage entre la droite républicaine et la gauche socialiste, François Bayrou sait qu’il lui faut absolument arriver au moins en deuxième position lors du premier tour de la prochaine élection présidentielle, ce qu’il n’est pas parvenu à faire l’an passé. Il aura donc besoin d’électeurs aujourd’hui captifs de la gauche socialiste.
Pour les conquérir, François Bayrou envisage deux scénarios possibles.
Premier scénario : il parvient à réaliser d’ici à 2012 une OPA sur un PS moribond pour bâtir un nouveau parti démocrate libéral et social à la manière dont François Mitterrand, en 1971 réussit à s’emparer des restes de la SFIO pour construire le nouveau parti socialiste.
Deuxième scénario : Tant bien que mal le PS survit mais se recroqueville comme peau de chagrin malade qu’il est de ses querelles intestines et François Bayrou parvient à mobiliser un électorat de gauche lassés des chamailleries et de l’impuissance du PS.
Ces hypothèses peuvent aujourd’hui sembler relever de l’utopie. Mais François Bayrou, en dépit des apparences, n’est pas dépourvu d’atouts.
Il possède une détermination à toute épreuve au point de paraître habité par le sentiment d’une prédestination présidentielle ! Ce n’est pas rien et cela compte beaucoup dans une trajectoire politique.
François Bayrou n’a guère d’élus mais il a des militants. Les universités d’été du Modem en ont fait la démonstration avec quelque 2000 militants qui avaient payé de leur poche une somme rondelette pour participer à cette manifestation.
François Bayrou possède un trésor de guerre : le financement public que lui ont valu deux élections présidentielle et législative et qui sera le bienvenu en 2012.
François Bayrou possède surtout un espace politique réel entre la droite au pouvoir et l’opposition socialiste.
Le PS paraît en effet plongé – sauf sursaut, dans une lente agonie. La SFIO, entre 1954 et 1971 a mis quinze ans pour disparaître. Le PS commencé de dépérir avec l’échec de 91 – échec qui n’a pas été vraiment effacé par l’embellie de 1997-2002. Voilà à quinze ans qu’il peine à se donner une idéologie claire, une stratégie précise et, depuis 2002 un chef incontesté.
De l’autre côté, la majorité – UMP et gouvernement, est confronté à une situation économique redoutable pour les deux prochaines années. Elle est contrainte à la recherche de compromis difficiles pour pallier cette situation qui ne peuvent que contrarier tour à tour diverses catégories de la population. François Bayrou a beau jeu de laisser cette majorité se dépêtrer tant bien que mal avec ces difficultés de l’intendance pour lui se cantonner au terrain des valeurs et pilonner l’Elysée au nom d’une politique de l’honneur qui est l’honneur de la politique ! Et de dénoncer pèle mêle les copinages de Sarkozy qui ont pour nom Clavier ou Tapie, le fait du prince, l’écrasement des classes moyennes qui ne bénéficient ni du bouclier fiscal qui protège les riches ni de l’assistance dont profitent les pauvres ou encore le honteux fichage des citoyens par « Edwige ». Cette vision héroïque de la politique lui permet d’apparaître comme l’opposant numéro un au régime voire le chef de l’opposition sans pour autant, du moins pour le moment, être contraint, de proposer un contre programme économique.
Pour voir suivi dans les années 1970, l’ascension de François Mitterrand, je suis frappé par la parenté qui existe entre les deux hommes. Je retrouve une même détermination farouche, une même certitude à la fois de soi et de son destin hors du commun, une même trajectoire de la droite vers la gauche, une même distance vis-à-vis des problèmes économiques, du moins au départ, une même violence dans la critique sans concession du pouvoir en place.
Sans doute n’est-ce pas un hasard si François Mitterrand confia un jour à François Bayrou – c’était au temps de la deuxième cohabitation qu’il était convaincu que le béarnais siègerait un jour à l’Elysée. Il est vrai que ce vieux florentin qu’était Mitterrand était, jusque dans le compliment, un formidable manœuvrier des individus. Et d’autres eurent droit sans doute à la même prédiction !