Affirmer que L'échange est assurément le meilleur film de Clint aux côtés d'Un monde parfait et de Mystic River n'est pas exagéré. Bien mieux maîtrisé et plus profond que son Million Dollar Baby, largement surestimé (cela n'engage que nous), cette dernière réalisation de l'acteur est un pur et obscur joyau.
Brillant exercice de style suplanté d'une réalisation au combien intelligente, L'échange nous transporte, nous habite et ne nous lâche pas durant 2h20. Photograpie froide, esthétisme flamboyant, réalisation fluide auréolée d'une complexité étonnante, ambiance des années 20-30's restituée à merveille, musique envoûtante... tout accompagne le coeur d'un film principalement constitué d'un scénario retors et d'une interprétation magnifique laissant sans voix.
En partant d'un fait divers réel, Clint Eastwood développe une bouleversante histoire à multiples acs narratifs et facettes sans jamais flancher. L'échange trouve échos dans de nombreuses storylines s'entrecroisant avec maestria et se développant à mesure que le suspens augmente. En 140 minutes, Clint Eastwood nous évoque la corruption dans la police, la sécurité intérieure menacée d'un pays en plein essor, le drame familial d'une mère en proie au doute et au déchirement maternel, les internements abusifs en hôpital psychiatrique sans oublier une enquête policière passionnante.
En confrontant les idéaux et en jumelant l'espoir au pardon, la justice aux mystères non résolus, la foi au mensonge... Eastwood dresse un douloureux constat d'une époque compliquée et établit un parallèle "inconscient" entre hier et aujourd'hui... tout en prouvant que certaines choses n'ont vraiment pas bougé ce qui amplifie l'inquiétude et l'émotion se dégageant de cette histoire douloureuse.
Véritable chef d'orchestre doté d'une modestie frôlant le sublime, Clint Eastwood nous plonge au coeur de cette histoire et nous implique d'emblée. Sorte de manipulation mentale, le spectateur vibre au même rythme que le personnage d'Angelina Jolie découvrant peu à peu de quoi tout retourne mais restant en partie dans le flou et le doute. Sans trop en dévoiler (laissons la surprise agir car le choc est total), L'échange surprend, pique au vif et ne lâche pas prise, d'une bouale à la gorge précoce jusqu'au générique final.
Dominé par la prestation hallucinante d'Angelina Jolie, stupéfiante et déchirante dans ce rôle de mère meurtrie, le film s'envole. La comédienne au sex appeal d'habitude imposant, y est juste d'un classicisme étonnant et fragile. Coeur du film, Jolie est tétanisante, habitée comme jamais et époustouflante. Une baffe magistrale et inédite de la part de l'actrice. Croyez nous, vous n'êtes pas prêts d'oublier ses cris à glacer le sang ainsi que toute son émotion contenue, explosant lors d'un face à face final déstabilisant mais que nous taierons.
A ses côtés John Malkovitch, bien que peu présent, est impeccable comme d'habitude, Jeffrey Donovan (le héros de Burn Notice) campe une ordure corrompue avec brio tandis que Michael Kelly dans le rôle du flic coriace est exemplaire. La galerie de seconds rôles tutoie le superbe et s'avère sans faute.
On en ressort les yeux humides, incapable de décrocher la moindre expression, tout retourné et scotché par une maîtrise absolue de son sujet comme de la technique. Une histoire déchirante, palpitante, triste à pleurer mais qui va jusqu'au bout d'une logique imparable. Le visage d'Angelina Jolie restera longuement gravé dans vos mémoires une fois les lumières de la salle rallumées et L'échange est et restera une vraie pièce de choix dans la carrière de réalisateur de monsieur Eastwood. Reste à espérer que le film aille aux prochains Oscars récupérer ce qui lui est dû.
Epatant, sidérant, grandiose et si sobre... un très grand film et l'un des meilleurs de cette année ciné dont il est difficile de sortir indemne. Chef d'oeuvre.
Pourquoi y aller ?
Pour la prestation sans faille d'Angelina Jolie plus stupéfiante que jamais. Pour l'intrigue générale du film. Pour la multitude d'histoires toutes parfaites. Pour la réalisation sobre et parfaite de Eastwood. Pour la résolution de l'intrigu. Pour les non dits laissant le flou déchirant.