J’ai embauché Scarlett pour Ce Que Tu Lis. La qualité des photos devrait s’améliorer.
Oh, Woody, Woody! Comment te dire, Woody! Comme tu m’avais ennuyée avec Celebrity, avec Hollywood Ending, avec Escrocs mais pas trop et même… avec Match Point.
Comme il me semblait loin, l’heureux temps des Diane Keaton pétulantes dans des galeries new-yorkaises, des Mia Farrow fragilement bousculées par la littérature, le jazz et les psys dans un Manhattan frénétiquement snob, des couples qui valsent pour mieux se refaire, des hyponcodriaques qui se soignent chez les Hare Krishnas… Woody, comme tu m’avais manqué!
Quand tout à coup, cette année, tu as décidé de tout remettre - femmes intellos ou femmes fragiles, hystéros sublimes, artistes ridiculement maudits, glamour cérébral - dans un grand et joyeux bol à mixer, et de nous servir une margarita sacrément fraîche et bien dosée, en alcool comme en sucre : Vicky Cristina Barcelona.
Je n’aimais pas du tout la miss Johansson, pourtant : je lui trouvais la grâce d’un éléphant de mer enceint, et l’œil aussi vif qu’une bernique énervée. Dans Vicky Cristina Barcelona, elle est cependant, comment dire là aussi… Marilynesque. Une déesse de blondeur et de sensualité, une pochette surprise pleine de bonbons au miel. Je n’étais pas fana de Javier Bardem non plus : sa prestation dans No country for old men des Frères Cohen m’avait glacée les sangs - c’était le but, puisqu’il y incarnait un tueur implacable. Il y arborait une coupe de cheveux à la Mireille Matthieu qui lui laissait peu de chances d’entrer un jour dans mon lit imaginaire. Or, depuis Vicky Cristina Barcelona, je suis en train de lui broder un oreiller à son nom. Quant à Pénélope Cruz, disons qu’elle m’avait étonnée dans le beau Volver d’Almodovar, mais qu’il me fallait plus qu’une chanson en play-back et un faux-cul pour achever de me séduire. C’est chose faite. Dans ton dernier film, Woody, tu en as fait une icône du burlesque trash.
Oui, merci, Woody. Deux femmes (Scarlett Johansson et Rebecca Hall) qui partent à Barcelone pour les vacances et qui, accessoirement, se cherchent. Rencontrent un objet du désir (Javier Bardem) qui semble jouer au Don Juan mais n’est finalement, lui aussi, qu’une victime de l’amour et en particulier de son ex-femme flamboyante (Penelope Cruz). Marivaudage en vue? Of course. Jeux de l’amour et du hasard! Ca badine sec à Barcelone, et rien de tout ça n’est vraiment sérieux. Woody renoue avec ses légèretés délicieuses, celles qui ont fait de lui le grand réalisateur des couples danseurs et rieurs de Maris et femmes, de Comédie érotique d’une nuit d’été, d’Hannah et ses soeurs… le tout dans une veine moderne, avec des personnages qui n’empruntent rien à ceux des années 70 et 80, outre leur grâce et leur raffinement à l’américaine. Quel régal, quel enchantement que cette douce comédie, dans laquelle Woody Allen creuse une fois de plus un sillon qu’il partage avec Shakespeare, celui de la recherche des contingences du sentiment amoureux. C’est par là qu’il échappe au néant cinématographique que pourrait être Vicky Cristina Barcelona. Ce n’est pas une comédie sentimentale de plus, non. Un scénario en béton, où les ficelles un peu grosses sont là pour être grosses ; farce délicate s’il en est, interprétée avec un enthousiasme débordant par tous ses formidables acteurs. La caméra et le spectateur se délectent de la beauté de la ville, des paysages et des visages des personnages.
En cas de petit coup de blues - surtout sentimental - fuyez à Barcelone avec Woody!