Vous lirez ailleurs des critiques savantes de cette exposition, au Louvre jusqu’au 5 Janvier, et n’aurez ici que quelques impressions. Ce peintre émerge de la gangue rugueuse du Moyen Âge, avec des premiers tableaux aux allures d’icônes, et finit sa vie dans une douceur émolliente imposée par Isabelle d’Este, qui le trouve vieillot et tente de le mettre au joli goût du jour, Léonard et Titien étant ses références. Mais entre ces deux écueils, quelle force ! Maître de la perspective et du raccourci (hélas, le Christ mort sur la table d’embaumement n’a pu venir de Milan à Paris), virtuose de la rocaille désolée sur laquelle ses personnages semblent s’enraciner, Mantegna peint des saints et des christs poignants.
Voyez ce Christ de pitié soutenu par un séraphin et un chérubin (lequel est le séraphin et lequel le chérubin ?): au delà de la douleur un peu figée des visages, toute la composition est faite de tensions et d’oppositions entre le rigide et le flou. Le
![Mantegna mantegna-10.1223369328.jpg](http://media.paperblog.fr/i/116/1162353/mantegna-L-2.jpeg)
Quant au Saint-Sébastien d’Aigueperse, il n’a pas l’appétence charnelle des saints Sébastien devenus iconiques, il est gris, tragique, immense sur sa colonne en ruines. Mais le plus frappant est ce bégaiement, cette répétition, ce troisième pied de marbre, en bas à gauche, déjà mort, rigide, brisé : démembrement du corps, fragmentation, annonce de la mort ou de la résurrection sur fond de ruines. Cependant, à droite, les têtes des bourreaux émergent du cadre avec en arrière-plan une ville peuplée de vivants.
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Et on peut enfin s’attarder sur un des tableaux peints pour le studiolo d’Isabelle d’Este à Mantoue, Minerve chassant les vices du jardin de la Vertu, où (détail ci-dessous) les vices s’enfonçant dans l’étang au premier plan sont des plus réjouissants.
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