Bon, puisque vous êtes là, aidez-moi à préparer le dîner
Ne restez pas là les bras ballants, rendez-vous utile, il y a ce dîner à préparer : je dîne prochainement avec une amie américaine, ex-directrice littéraire d’une maison d’édition. Maison américaine, je le précise tout de suite avant que Wrath ne publie sur moi un billet acrimonieux : « Hou, regardez comme c’est facile de se faire publier quand on fait partie des réseaux ! ».
C’est une vieille connaissance, une des premières qui m’ait incité à publier alors que je commençais les concours de nouvelles – c’est pour dire si elle a du talent,ha, ha ! Elle est aussi très curieuse : elle a lu, aux U.S.A. mon « Qui comme Ulysse », alors que bien des libraires de la Cnaf ne l’ont pas lu, puisqu’il ne va pas se vendre – c’est irréfutable, c’est la logique cnafienne.
Etant curieuse, elle va, c’est d’ores et déjà prévu, essayer de comprendre cet étrange rituel de la rentrée littéraire en France. Rituel qui constitue une exception mondiale ; ça fait partie de l’exception culturelle française.
Comment vais-je lui expliquer ça ? Elle prend les Français pour un peuple rationnel : je crois qu’elle confond rationnel, rationaliste, et raisonneur. Elle va certainement me demander : bien sûr, que c’est absurde, en apparence. Mais il doit bien y avoir quelqu’un à qui ça profite secrètement. Alors, à qui ? Aux auteurs ? Aux éditeurs ? Aux attachées de presse ? Aux critiques littéraires ? Aux médias ? Aux libraires ? Aux lecteurs ?
Je vais prendre l’air mystérieux et intelligent du type dans le secret des dieux, et je vais lui répondre : « Euh, c’est en fait très habilement monté, les grands bénéficiaires, ce sont.. »
Et là je vais me lever en faisant semblant de reconnaître quelqu’un à l’autre bout du restaurant. C’est très lâche, très grossier. Et vous, vous avez une réponse à me proposer ? Faites vite. La meilleure réponse bénéficiera d’une invitation gratuite pour ce soir-là, à l’autre bout du restaurant.