LAVAGE de CERVEAU (04/fin)

Publié le 05 octobre 2008 par Osmose

Le « recrutement » et « manipulation »


Il reste donc les tactiques de recrutement et de manipulation de certains groupes religieux ou nouvel-âgeux.


Les tactiques de recrutement forment une catégorie en soi. Les recruteurs n’exercent en général aucune forme de violence envers leurs victimes; la torture n’est pas un très bon outil de conversion.


On peut ainsi se demander si les victimes des sectes, qui adhèrent à ces groupes de leur plein gré, font bel et bien l’objet d’une forme de contrôle. Il en va de même pour les adeptes des grandes religions contemporaines.


Obtenir d’une personne qu’elle transforme sa personnalité et son caractère, qu’elle aille à l’encontre de comportements de toute une vie, qu’elle abandonne tout ce en quoi elle a cru précédemment n’entre pas nécessairement dans la catégorie du contrôle.


Tout dépend du degré de participation de la personne à ces changements.
On peut bien penser que celui ou celle qui joint les rangs de l’église de Scientologie, des Témoins de Jéhovah de l’église de Jim Roberts n’a pas toute sa tête, mais les croyances de cette personne ne sont fondamentalement pas différentes de celles des millions de fidèles des grandes religions contemporaines.


Les néophytes de certaines sectes ou groupes religieux pernicieux semblent avoir subi un lavage de cerveau tel qu’ils seraient prêts à causer des torts irréparables à leur propre personne ou à autrui, en allant jusqu’au suicide ou au meurtre, sur un simple ordre de leur chef spirituel.


Certains d’entre eux, lorsqu’on les recrute, se trouvent dans un état de vulnérabilité extrême qui fait d’eux des victimes toute désignées.
Les nouveaux convertis se recrutent souvent parmi ceux qui se sentent mal dans leur peau, angoissés, parce qu’ils vivent des transitions ardues (un nouveau boulot, une nouvelle école), des situations difficiles (un échec scolaire, la perte d’un emploi), des circonstances personnelles tragiques (le décès d’un proche) ou des événements perturbateurs (une guerre, des attentats terroristes).

Certains peuvent souffrir de problèmes mentaux ou émotionnels, de dépression grave, de traumatismes provoqués par la toxicomanie ou les mauvais traitements, etc.
Il n’est toutefois pas avantageux pour des sectes religieuses de chercher à embrigader des gens qui présentent des problèmes émotionnels.
Comme l’explique le recruteur d’une de ces sectes :


Les sectes sont fondées sur des idéologies et des pratiques complexes qu’on ne comprendra que difficilement si l’on souffre de problèmes mentaux ou psychologiques.

Ces idéologie et pratiques forment des structures par lesquelles les sectes contrôlent leurs membres, et celles-ci ne veulent pas de sujets difficiles à contrôler. 

Ainsi, même si certaines personnes se trouvent facilement exploitables en raison de leur grande vulnérabilité, les sectes semblent préférer des ouailles qu’elles peuvent mettre à leur main.


Les sectes recherchent des gens forts, intelligents et idéalistes. Elles recherchent également les riches, peu importe leur état mental. 

L’objectif consiste à placer ces recrues dans un état de vulnérabilité, de leur faire abandonner la maîtrise de leurs pensées et de leurs agissements. Ils doivent se sentir comme des passagers à bord d’un navire démâté en pleine tempête. Seul le leader de la secte sait manier le gouvernail et pourra les mener à bon port.

Les techniques de manipulation des victimes sont multiples. On peut donner aux néophytes tout l’amour qu’ils croient impossibles d’obtenir ailleurs. Il faut les convaincre qu’ils trouveront enfin, au sein de la secte qui les accueille, tout ce qu’ils ont toujours cherché, même s’ils n’ont pas la moindre idée de ce dont il s’agit.
On répétera sans cesse qu’ils doivent faire confiance à la secte comme la secte a foi en eux, que les membres de leurs familles, leurs amis et le monde extérieur en général ne font que nuire à leur salut. Il faut les isoler.

Seule la secte peut répondre à leurs besoins, les aimer. Et si leurs frères de religion sont prêts à mourir pour eux, ne devraient-ils pas vouloir se sacrifier eux-mêmes pour leurs frères?

Si l’amour permet de gagner le cœur du nouvel adepte, la peur constitue un excellent motivateur. S’il quitte la secte, il sera détruit. S’il ne collabore pas, on le rejettera. Laissé à lui-même, il est perdu. Le manipulateur doit rendre la recrue paranoïaque.


Lorsque l’amour et la peur ne suffisent pas, il faut faire intervenir la culpabilité. Le néophyte doit en éprouver tellement qu’il fera tout pour censurer ses propres pensées.


Lui rappeler constamment que seul, il n’est rien, mais que grâce au leader de la secte et à Dieu (ou à une puissance ou technique quelconque), il est tout. Le remplir de mépris envers lui-même, afin qu’il aspire à se défaire de toute espèce d’ego ou de personnalité, pour ne faire plus qu’un avec le leader et les siens.
Non seulement le dépouiller de la moindre trace de caractère propre, mais aller jusqu’à le convaincre que l’idéal est de vivre sans aucune forme de soi.


Être implacable. L’humilier de temps en temps. Bien vite, il considérera comme son devoir de s’humilier lui-même. Contrôler tout ce qu’il lit, voit et entend. Emplir ses yeux et ses oreilles des messages de la secte.
Obtenir de lui des engagements graduels, en commençant par des vétilles, pour passer ensuite, peu à peu, à ses possessions, puis à son corps et à son âme. Ne pas oublier de le droguer, de l’affamer, de le faire méditer, danser ou psalmodier pendant des heures, jusqu’à ce qu’il se croit en pleine expérience mystique.


L’amener à penser: «C’est toi, ô Seigneur, qui me procure tant de joie!» Jamais il ne se sera senti si bien; il ne voudra plus jamais renoncer à un tel état. De l’extérieur, on le dira plongé en enfer; lui se croira au Paradis.


Quelle religion n’a pas recours à la peur et à la culpabilité pour que ses fidèles contrôlent leurs propres pensées? Même certains thérapeutes agissent de la sorte à l’égard de leurs patients, profitant ainsi de leur vulnérabilité. En échange d’un espoir et de la promesse d’une vie meilleure, ils exigent d’eux une confiance aveugle et une loyauté totale.


Souvent, ils isolent leurs proies de leurs proches, et tentent de prendre possession de leur être, de contrôler leurs pensées. Les méthodes des recruteurs de sectes ne sont pas bien différentes. Les recrues sont-elles, dès lors, des convertis, et les patients, des victimes consentantes?


Comment reconnaître la différence entre une victime consentante et une victime qui ne l’est pas? Si on ne peut y parvenir, alors il devient impossible de distinguer les cas véritables de contrôle de l’esprit.


On ne peut dire des recruteurs et autres manipulateurs qu’ils exercent un contrôle de l’esprit de leurs victimes que s’ils arrivent à les priver de leur libre arbitre. D’autre part, on ne peut dire d’une victime qu’elle a été privée de son libre arbitre que si est entré en jeu un agent causal auquel elle n’a pu résister.
Comment faire la preuve que le comportement d’une personne découle d’ordres donnés par une autorité religieuse, spirituelle ou nouvelle-âgeuse, auxquels la victime n’a pu résister?


Il ne suffit pas de dire qu’un comportement irrationnel est la marque d’une privation du libre-arbitre. Il est sans doute irrationnel de donner tous ses biens, de consacrer tout son temps et ses ressources à la satisfaction des besoins du leader d’une secte, de se suicider ou de poser des bombes dans le métro parce qu’on vous l’a ordonné, mais comment justifier de tels gestes en disant qu’ils ont été posés par des automates qu’on a privé de leur libre-arbitre?

 
Pour autant qu’on le sache, les gestes les plus dépourvus de sens, les plus inhumains, sont parfois commis librement, dans la joie, en toute connaissance de cause. Peut-être sont-ils le fait de déficients mentaux ou de fous. Dans de tels cas, on ne pourrait parler de contrôle de l’esprit.

Reste encore à étudier les exactions des kidnappeurs et des tortionnaires, soit l’isolement systématique, la privation sensorielle et les sévices physiques systématisés. De telles méthodes permettent-elles de faire table rase de la personnalité des victimes pour intégrer un nouveau contenu?


Remarquons tout d’abord que ce ne sont pas toutes les victimes d’enlèvements qui finissent par éprouver de l’empathie pour leurs ravisseurs. Il peut arriver que ces victimes soient réduites à un état de dépendance totale par leurs bourreaux.

 
Réduites à un état infantile, elles finissent par former des liens avec les kidnappeurs qui évoquent ceux que les enfants entretiennent avec les adultes qui les nourrissent et les réconfortent. Il nous faut également reconnaître cette étrange fascination que nous éprouvons tous pour les «voyous».


Nous les craignons, les haïssons même, mais nous voulons tous faire partie de leurs bandes afin qu’ils nous protègent. Il semble peu probable que les personnes qui finissent par éprouver de l’empathie pour leurs ravisseurs ou qui renient leur patrie sous l’effet de la torture soient victimes d’un lavage de cerveau.
Il y a certainement une explication au fait que certains agissent comme Patricia Hearst, tandis que d’autres, dans des circonstances semblables refuseront de devenir des «Tanya», et il est peu probable que le contrôle de l’esprit y soit pour quoi que ce soit.


Certaines femmes éprouvent peut-être une attirance pour les mauvais garçons, mais elles n’ont pas toutes l’occasion d’en rencontrer. Pas besoin d’avancer l’hypothèse du contrôle de l’esprit pour expliquer pourquoi Patricia Hearst est devenue partenaire sexuelle d’un des terroristes qui l’avaient enlevée.
A-t-elle voulu assurer ainsi sa survie?


S’est-elle réellement entichée de lui? Qui sait? Invoquer le contrôle de l’esprit devant un juge, quand on fait face à des accusations de vol de banques et de meurtre, constitue sans doute un moyen de défense plus sûr que de dire «Je voulais m’essayer au crime, histoire de rigoler un peu».

Enfin, on croit généralement que les Chinois ont réussi à laver le cerveau de leurs prisonniers américains durant la guerre de Corée, mais il n’y a aucune preuve que la torture, l’isolement, la privation sensorielle et autres formes semblables de contrainte leur ont permis de contrôler l’esprit de qui que ce soit.
C’est la CIA qui a fourni de telles fabulations à Hunter lors de sa campagne pour inspirer aux Américains une haine profonde des Nord-Coréens et du communisme, afin d’expliquer pourquoi certains soldats américains n’éprouvaient pas de sentiments hostiles à l’égard de l’ennemi, et pour «justifier son ambition démesurée, lorsqu’elle prétendait devoir elle-même effectuer des recherches en matière de lavage de cerveau pour ne pas se retrouver en position d’infériorité» (Sutherland 1979, 114).


Il appert que si l’on définit le contrôle de l’esprit comme la maîtrise de pensées et des gestes d’autrui avec ou sans son consentement, ce contrôle n’existe que dans les imaginations fertiles.


Malheureusement, les choses pourraient ne pas en demeurer là…… 


fin