François HUREAU
Chef d'entreprise MECADYN
http://mecadyn.over-blog.com/
Dans l'industrie, les activités d'un bureau d'étude sont très associées à celles de la maintenance. Le lien commence dès la conception des machines et se poursuit tout au long de la production.
Pourtant, l'évidence a quelquefois du mal à s'imposer. J'ai encore en mémoire ce jeune dessinateur qui s'était fait rabrouer par le chef monteur dans une usine: une couronne de 1m50 de diamètre pesant dans les 100 kg avait été installée sur une machine d'essai verticale. La poser a été facile, mais lorsqu'il fallut la démonter quelques mois plus tard pour changer des éléments... Impossible ! Rien n'avait été prévu pour
l'extraire. Il suffisait en fait de prévoir des trous taraudés pour fixer des anneaux de levage, mais le gars du BE n'y avait pas pensé. Depuis, je suis sûr qu'il fait attention à chaque fois qu'il dessine une
pièce.
Pour remédier à ce genre de désagrément, le patron d'une petit boîte de machines spéciales mettait les jeunes techniciens qu'il embauchait au service maintenance pendant un an. Les gars (y avait pas de filles, qu'est ce que vous voulez...), fraichement émoulus d'un BTS, se retrouvaient confrontés à des tas de situation auxquelles leurs études ne les avaient pas préparés. Montage et démontage d'ensembles mécaniques compliqués, encastrement de pièces, tolérances d'usinage, facilité d'accès, ergonomie,... Lorsqu'ils étaient ensuite sur leur DAO, cette expérience d'une année leur avait été très profitable. Sans compter les relations forcément meilleures, plus cordiales, qui en résultaient entre les « cottes bleues » de l'atelier et les « blouse blanches » du BE.
À l'inverse, une disposition ingénieuse prise par le bureau d'étude n'était pas forcément comprise par l'atelier de montage ou de maintenance, bloqué dans ses habitudes. En Bretagne un fabricant de machines agricoles a constaté après plusieurs années que les plans n'étaient pas conformes aux pièces réalisées. Ça faisait tâche à cette époque des débuts de l'ISO 9000 où chacun s'efforçait d'assurer la qualité de ses fabrications et des ses services. Quand le patron s'est inquiété de cet « écart » il est allé voir le chef mécano de son atelier qui lui a avoué continuer à réaliser et monter les pièces comme avant, la nouvelle conception étant pour lui non-opérationnelle. Après un peu de discussion et de négociation, quelques engueulades et prises de tête entre le BE et l'atelier, tout a fini par s'arranger !
Comme quoi, le dialogue, on n'a rien inventé de mieux pour faire coexister des techniciens qui conçoivent et des techniciens qui fabriquent, assemblent et réparent. Aujourd'hui, avec les normes, les standards et l'externalisation de nombreuses activités, tous ces problèmes ont été lissés, voire supprimés (on jette plus qu'on ne répare...). Mais je continue à penser que concevoir et dessiner une machine reste un art à part entière, un travail alliant savoir technique et imagination, précision et créativité.
Longue vie aux «tontons projeteurs» et à leurs descendants.
François,
Un mécanicien admiratif
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