Avec le dépôt officiel des motions d’orientation soumises au vote des militants socialistes, le congrès du PS entre dans sa phase décisive. Bientôt ce sera le tour des Verts, du PCF, du NPA. En neuf mois, du PRG en mai dernier au NPA en janvier prochain, toute la gauche aura tenu congrès.
Elle l’aura fait dans un moment qu’elle n’avait pas prévu : une crise du capitalisme sans précédent depuis plusieurs décennies qui voit l'administration ultralibérale de Washington racheter la dette de ses banques et nationaliser le système financier.
Les Républicains ayant investi la Maison Blanche se détournent de la situation économiquement précaire de leurs concitoyens en leur coupant les vivres par des réductions de programmes sociaux tout en stipulant que ceux-ci sont trop onéreux, mais lorsqu’une crise financière frappe leurs riches contributeurs électoraux de plein fouet, ils n’hésitent pas alors à modifier leurs propres règles à leur avantage.
Le Trésor américain va ainsi payer rubis sur l’ongle les frasques du secteur privé bancaire en dépit de tous les crédos libéraux et l’addition sera payée finalement par les contribuables américains…
En Europe, depuis cet été, la BCE a déjà injecté 313 milliards d’euros pour renflouer des banques privées européennes.
Après avoir remis à flot Fortis, les pouvoirs publics belges, associés aux gouvernements français et luxembourgeois, ont volé le 30 septembre au secours du bancassureur franco-belge Dexia, pour éviter que la tempête financière fasse une nouvelle victime en Europe.
Ces centaines de milliards d’euros payés par les contribuables pour renflouer les banquiers auraient sans doute été mieux utilisés pour financer des logements sociaux, construire des hôpitaux ou des écoles.
Et une telle crise commanderait notamment au PS de tirer enfin toutes les conséquences de ce capitalisme financier qui joue avec notre argent en France et au sein de l’Union européenne où la banque de France et la BCE ne contrôlent notamment aucune des filiales de banques qui émargent dans les paradis fiscaux.Mais le PS est-il encore capable de tirer les leçons de son Oui pitoyable au TCE en 2005, du recul général de la social-démocratie en Europe qui s’est alignée depuis longtemps sur les politiques libérales de la commission européenne et de dresser un bilan clair, sans complaisance, des deux septennats de François Mitterrand et du quinquennat de Lionel Jospin qui privatisa plus que de raison ?
En vue du congrès de novembre prochain, les problèmes de personnes prennent hélas nettement le pas sur le débat d’idées, certains candidat(es), l'œil rivé sur 2012, inaugurant même un nouveau type de meeting au Zénith de Paris, à mi-chemin entre spectacle de show-biz et réunion télévangélique...
" A tout seigneur (électoral), tout honneur, commençons donc par le Parti socialiste. La Rochelle a été un grand moment du barnum politique qui a enchanté les médias à défaut de combler les électeurs.
Qui a dit quoi, en termes de perspectives pour le pays, l’Europe ou le monde ? Nul ne le sait. Nous en savons par contre des tonnes, si on a la patience nécessaire pour suivre ces méandres, sur les tactiques et les supputations concernant la succession de François Hollande à la tête du parti. Faute de débat sur des orientations fermes, la bataille d’égos fait rage.
La mécanique d’un congrès socialiste est bien connue. Elle commence par des « contributions », textes où chacun, ou presque, énonce ses idées, s’il en a, et le cas échéant compte ses amis proches. Certains, coquetterie peut-être, se livrent à cet exercice en solitaire, d’autres le jouent collectif.
Le but du jeu : trouver, sur le fond (s’il y en a) des accords avec d’autres contributions pour aboutir, phase deux, à des motions qui seront, elles, soumises au vote des militants et serviront à mesurer les rapports de forces internes. Un jeu apparemment simple, en réalité compliqué.
Ce qui distingue, par exemple, sur le fond, les contributions de Bertrand Delanoë, Ségolène Royal, Martine Aubry, le couple Collomb-Guérini ou Pierre Moscovici, pour ne citer que les plus connus, est infinitésimal : des variations sur un thème commun, le «socialisme gestionnaire».
Les différences, toujours sur le fond, entre les contributions des courants de la « gauche » du parti (Benoît Hamon et Henri Emmanuelli, Jean-Luc Mélenchon, Marc Dolez ; le texte solitaire de Marylise Lebranchu n’en est pas si éloigné) sont plus tactiques qu’autre chose : Hamon et Emmanuelli recherchent un accord majoritaire avec certains « gestionnaires », Mélenchon et Dolez veulent un vote de congrès sur des options clairement (si possible) différentes.
D’ici le congrès, des alliances vont se nouer et se dénouer, la seule à ce jour qui paraisse à peu près solide étant celle du duo Mélenchon-Dolez. Les trahisons ne vont pas manquer, La Rochelle en ayant déjà fourni quelques échantillons, qui ne manquent pas de saveur.
Entendre Moscovici (l’homme qui avait apporté au PS une contribution majeure, la barbe de trois jours, et qui l’a - par dépit ?- retiré depuis) manifester sa « surprise » devant la « trahison » de Cambadélis, pourtant spécialiste de la chose, écouter Peillon vitupérer les manœuvres de Bartolone, porte-flingue attitré de Laurent Fabius et, justement, expert ès manœuvres nous arracheraient des larmes, de rire. (sans compter Montebourg qui a abandonné Ségolène pour Martine …)
Décidément, ces quadras virant quinquas, ont au moins de la constance dans la quête de leur seul objectif : les places. Pour quoi faire ? Ne leur en demandez pas trop.
Un mois après le PS, le Parti Communiste tiendra lui aussi congrès, avec une règle du jeu différente : une « base commune » est d’abord élaborée (réminiscence peut-être de l’antique centralisme démocratique, oxymoron sur les bords). Puis des textes peuvent l’interpréter, la compléter, l’amender. Des motions sans le dire.
Trois options principales, avec de multiples nuances (le PCF ne reconnaît pas les « courants », mais en compte encore plus qu’au PS), se dégagent, dont deux sont à peu près claires.
Les « orthodoxes » veulent siffler la fin de la récré et revenir au bon vieux PCF d’antan : c’est clair, parfois touchant, et totalement à côté de la plaque.
D’autres, dont les « rénovateurs » souhaitent le « dépassement » du parti, en créant autre chose. C’est le cas, là aussi avec de multiples nuances et prudences des rénovateurs autour de Patrick Braouzec, de Jean-Claude Gayssot et de certains « non alignés ». Pour ceux-ci, un Die Linke à la française est une perspective prometteuse. C’est clair aussi, et, on vous le dit tout de go, ça nous botte assez.
Marie-George Buffet et ses amis sont sur une ligne intermédiaire, prônant une « profonde transformation » du PCF. Qu’y a-t-il derrière cette formule ? Du flou, pour l’instant. Faudra préciser, camarades.
Le contexte politique du déclin du PCF pèsera évidemment fortement sur le congrès, d’autant que la proximité des élections européennes pose la question du « sauvetage » des deux sièges que le parti a conservés, et qu’il aura bien du mal à conserver sans des alliances. Avec qui ? Question ouverte et très politico-politicienne.
Les Verts, eux, ont tendance à retrouver le sourire dans cette perspective électorale. Ils devraient avaliser sans trop de casse l’alliance inattendue Cohn-Bendit-Bové agrémentée d’un zeste de Hulot. Cohérence politique de l’attelage ? Nulle hors un libertarisme mondain. Efficacité électorale ? Possible dans un contexte où le star-system est à la mode.
La saison des congrès se terminera avec la création du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), qui changera peut-être de nom. Tel qu’on le pressent, il se centrera sur les luttes sociales, ce qui est toujours ça, sur un solide anti-socialisme, toutes tendances confondues, sur une méfiance atavique envers le PCF, ce qui conduit, de fait, à renoncer à toute perspective de contribution à un éventuel gouvernement de gauche. Autre défi : comment devenir autre chose que le fan-club du doué Olivier Besancenot ? L’arrivée éventuelle de Clémentine Autain ne résoudra pas cette difficulté. "
Merci à notre ami Joao Silveirinho pour cette analyse sur l’état actuel de la gauche
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