Pat Jordan a jadis réussi à quitter sa job de prof d’anglais dans une école secondaire pour se consacrer entièrement à une carrière de journaliste pigiste, et ce, pendant plus de 40 ans. Le rêve inavoué de tout blogueur. The Best Sport Writing of Pat Jordan est un fabuleux recueil de ses meilleurs articles à saveur sportive, parus dans Sports Illustrated, NY Times Magazine, The Atlantic Monthly, Harper’s et autres revues plutôt crédibles, merci. La brochette d'athlètes qui se frottent à sa plume s'avère plutôt baroque: les sœurs Williams, Deion Sanders, Greg Louganis, Sylvester Stalone, Alberto Tomba, O.J. Simpsons, avec un penchant avoué pour les joueurs de baseball (l’auteur ayant lui-même joué comme lanceur dans les ligues mineures): Roger Clemens, Carlton Fisk, Steve Garvey, Tom Seaver, Pete Rose Jr...
C'est généralement sous le format d'un portrait. Jordan décrit le déroulement des entrevues, les lieux de rencontres, ce qu'ils mangent, ce qu'ils boivent, la tapisserie sur les murs, la couleur particulière de la cravate de l'un, le motif du pyjame de la blonde de l'autre...Le tout est entremêlé d'éléments d'information, d'appartés historiques ou de passages plus techniques. On est loin des puff pieces sirupeux de Réjean Tremblay.
Côté style, Jordan l'admet lui-même, I like to have a « flat » style. Assez descriptif, donc, presque comme un roman...mais qui ne dure que 15-20 pages.
Jordan porte des jugements, mais conserve une certaine retenue. Décrivant la maison de Steve Garvey: "The house is decorated in a style common to people who have the resources for instant gratification but who have yet to grow in a style of their own" ou la voix d'O.J. Simpson:"He has been talking for nine hours. I have been listening to him since seven o'clock in the morning: his baritone voice reverbarating like bass from a boom box, his girlish giggle, a manic tic, so at odds with what he's saying." D'autres fois, il laisse simplement parler le sujet, and it's so fuckin' funny. Jordan décrit ainsi le père des sœurs Williams :
All of William’s daughters are talented and brilliant, he says. Yetunde has been in medical school “dealing with hearts, valves, and muscle s of the hearts,” since she was sixteen, although he will not say what school took her at that age. Isha, twenty-three, was an “awesome” tennis player, who is now in a law school he will not disclose. Lyndell, seventeen, is a “genius”, and Serena is “brilliant.” Williams says, “I never say anything derogatory about my kids. I learned that from mother.” He’s also said, “I talk to our psychiatrist for advice to keep the love of my children (…).C'est parfois cru et abrasif: Clemens’s egotism is more childlike and innocent. He doesn’t realize that he sees himself at the center of his small universe, at the center of every story he tells.Dans un de ces meilleurs textes, il relate une conversation avec Carlton Fisk, l’irascible receveur des White Sox:He sees a black bodybuilder working out. “You know, I never saw a black in New Hampshire. The first time was in the army reserves. ”He makes a surprise face, points, and shouts, “There’s one now! A black person! ” The bodybuilder comes over to him. “Mr. Fisk, I met you when I was a kid. My father was a minister,” he says and shakes Fisk’s hand, then looks him up down in that professionally appraising way that bodybuilders have. “You’re looking good, man. Real good.”Les personages sont souvent névrotiques, égocentriques, paranoiaques...Bref, du bonbon. Le livre mérite donc la note de 4.5 Richard Labbé sur 5.
Le comité éditorial aurait attribué une note parfaite si le contenu avait été plus riche en football. Que voulez-vous, blogue thématique oblige. Finalement, pour ceux que ça intéresse, voici ce qui, au départ, nous avait mis la puce à l'oreille...