La question de la confiance est évidemment centrale dans toute relation (nous en avons une illustration spectaculaire sous les yeux avec la crise de confiance systémique qui traverse les marchés financiers, où l'on voit que sans elle, rien ne tient, tout se délite). De même, pas d'accompagnement efficace possible sans l'établissement entre le coaché et son coach d'un bon niveau de confiance. Mais la confiance, comme chacun sait, est une fleur fragile et précieuse. Elle ne se décrète pas. Elle se construit, et surtout, elle se donne – ou pas.
La confiance que l'on accorde aux autres dépend pour bonne mesure de la confiance en soi. Il est très difficile d'avoir l'ouverture, la tranquillité dans la relation, si l'on doute de ses propres capacités, si l'on redoute d'être jugé ou d'exposer des faiblesses.
Des expériences désagréables, le sentiment d'avoir été trahi, peuvent conduire à adopter une position défensive dans la relation. "Qu'est-ce qu'il(elle) me veut, celui(celle)-là?" serait alors la question emblématique face à autrui. Défiance initiale, donc. Craignant d'exposer leurs faiblesses, on recherche en premier lieu celles de l'autre. Si l'on a la représentation que le monde extérieur est farci de pièges et que les autres nous attendent au tournant pour nous mettre en difficulté, on chausse les lunettes de l'inquisiteur, on cherche la petite bête, et quand on la cherche, on la trouve! On ne voit plus autour de soi que défauts, manquements, comportements douteux. De quoi renforcer la croyance initiale.
Commencer une relation sur un a priori de confiance semble le meilleur pari (au sens pascalien). C'est miser sur la réussite, sur le succès, sur l'enrichissement mutuel. Il arrive que cela ne se concrétise pas, mais on aura au moins cultivé les meilleures conditions possibles, on se sera donné toutes les chances de créer une belle relation. Cette confiance n'est pas de la naïveté, mais tout le contraire. "On est plus souvent dupé par la défiance que par la confiance", écrit le Cardinal de Retz. D'une certaine manière, c'est un capital investi. C'est prendre le parti de la vie. Ou pragmatiquement, se rappeler que la confiance est cruciale pour toute performance collective.
La déontologie du coach, et singulièrement son obligation de confidentialité, sont là pour aider à l'établissement de cette confiance – qui est une condition nécessaire, mais pas suffisante, pour que l'accompagnement soit "réussi". Si l'on sait que rien ne sortira de ces entretiens, que rien ne pourra "être retenu contre nous", on peut se confier. Je crois que la confiance que l'on accorde à l'autre repose en grande partie sur le sentiment qu'il ne nous juge pas – et qu'il ne nous jugera pas, quoi qu'il arrive, quoique l'on dise. C'est une protection importante.
La confiance, c'est aussi, lorsque surgit l'incompréhension, parfois la colère ou le sentiment d'injustice, prendre le temps et l'énergie nécessaires pour analyser ce qui se passe dans la relation, mesurer, au-delà de l'émotion, le ressort de ce qui blesse. C'est à ce prix que l'amitié ne sombre pas au premier coup de Trafalgar, et qu'elle en sort affermie d'avoir surmonté l'obstacle. La confiance, ou l'autorisation de dire les choses, tout simplement.