Planche de salut dans la tempête mondiale qui agite la finance classique ? Première en France à se lancer sur ce créneau en formation supérieure, l'Ecole de management de Strasbourg, dirigée par Michel Kalika, vient de créer un diplôme d'université de finance islamique de niveau bac + 5.
Ce cycle de 405 heures devrait commencer avec une promotion d'une quinzaine d'étudiants, tant en formation initiale que continue. « L'université de Durham, en Grande-Bretagne, se lancera dans un an, nous les avons pris de vitesse », se réjouissait mercredi Michel Storck, directeur du centre du droit de l'entreprise de l'université Robert-Schuman à l'issue de la conférence inaugurale donnée par Mohammed Boudjellal, professeur à la faculté des sciences économiques et de gestion de Sétif.
Conforme à la charia, la loi coranique, la finance islamique proscrit le prêt à intérêt et s'interdit l'investissement dans les armes, l'alcool, les jeux de hasard ou l'élevage porcin. Les financements admettent une marge bénéficiaire et reposent sur le partage des risques entre l'apporteur de capitaux et le détenteur d'un savoir-faire. Les pénalités de retard dans les remboursements sont versées à des oeuvres... « Dans les années 1970, on prédisait la disparition des institutions financières islamiques, mais elles prospèrent aujourd'hui dans 65 pays. On estime leur nombre à 700, gérant 1 milliard de dollars d'actifs », explique le professeur Boudjellal.
L'économiste algérien n'a pas manqué de faire référence à l'actualité financière pour appuyer ses propos : « Le monde serait meilleur si certaines règles de conduite étaient appliquées. L'économie islamique interdit la titrisation. C'est d'abord une économie monétaire et de marché adossée sur des actifs réels. »
La place londonienne a quelques longueurs d'avance sur la France dans ce domaine mais Christine Lagarde a annoncé début juillet son intention de « clarifier » le statut fiscal et juridique de la finance islamique en France, saisissant l'Autorité des marchés financiers sur ce sujet. En mai, une table ronde de la commission des Finances du Sénat avait souligné le potentiel de développement de la finance islamique en France.
« Ce secteur a un intense besoin de compétences et de recherche. Les débouchés sont évidents et nombreux, dans le secteur financier mais aussi dans l'immobilier, en France et à l'international. Le Luxembourg regarde notre initiative avec le plus vif intérêt », fait observer le professeur Storck qui n'a eu aucun mal à recruter les intervenants dans les plus grandes enseignes de la banque et de l'audit.