Crise financière ou agonie du capitalisme ?

Publié le 29 septembre 2008 par Ttdo

Derrière des expressions inadaptées et choisies pour faire peur et paralyser la pensée (tsunami, 11septembre de la finance,…), il semble bien que la profondeur de la crise ne soit pas réellement mesurée que ce soit par les promoteurs du néolibéralisme actuel ou par certains des ses adversaires.

Bien loin d’être due à l’œuvre d’un des trois boucs émissaires créés par nos sociétés actuelles[1], le spéculateur, la crise financière qui secoue l’économie mondiale n’est que l’aboutissement logique d’une évolution qui s’est accélérée. Par son développement même le capitalisme a atteint des limites qu’il est incapable de dépasser et ne survit que par des subterfuges à la crise de ses trois piliers : l’accumulation du capital, la consommation, le travail.

Le capital. Du fait des gains croissants de productivité et de la baisse de contenu en travail des produits,la production n’est plus capable de valoriser l’ensemble des capitaux accumulés, une partie croissante de ceux-ci conservant la forme de capital financier. Une industrie financière s’est constituée qui ne cesse d’affiner l’art de faire de l’argent en n’achetant et ne vendant rien d’autres que diverses formes d’argent. C’est cette industrie que nous voyons s’écrouler. C’est ce qui a fait dire à André Gorz, dans le dernier article écrit avant sa mort que « la sortie du capitalisme a commencé ».

La consommation.Cette impossibilité croissante de valoriser le capital est accentuée par la baisse du pouvoir d’achat dans tous les pays ayant adopté le dogme néolibéral. Le recours à l’endettement massif, dont les subprime ne sont que le dernier épisode, a servi à masquer cette évidence en poussant des millions de travailleurs à consommer des richesses qu’ils n’avaient pas encore créées. C’est cette course à l’endettement qui vient de s’enrayer. Elle devrait logiquement être suivie par un effondrement de la consommation.

Le travail. Cet effondrement de la consommation sera lui-même accentué par la disparition du travail-emploi-marchandise. Ce n’est pas seulement le plein emploi, c’est l’emploi lui-même que le post-fordisme a entrepris de supprimer. Derrière des taux de chômage flatteurs et très souvent manipulés, cette destruction est visible dans la réalité des chiffres de la durée du travail qui traduit une dégradation très profonde de la qualité des derniers emplois créés.

Il faut être précis : nous aurons toujours autant de travail que nous voudrons, mais il ne prendra plus la forme du travail-emploi marchandise. Questionner le travail en revisitant l’œuvre d’Hannah Arendt et sa distinction entre les différents types d’activité humaine (travail (labour), œuvre (work), action) est très éclairant.

Par cette évolution, en détruisant ses moteurs, le capitalisme travaille à sa propre extinction et fait naître des possibilités sans précédent de passer à une économie affranchie de la domination du capital sur le mode de vie, les besoins et la manière de les satisfaire. C’est cette domination qui demeure l’obstacle insurmontable à la limitation de la production et de la consommation. Elle conduit à ce que nous ne produisons rien de ce que nous consommons et ne consommons rien de ce que nous produisons. Tous nos désirs et nos besoins sont des besoins et des désirs de marchandises, donc des besoins d’argent. L’idée du suffisant –l’idée d’une limite au-delà de laquelle nous produirions ou achèterions trop, c’est-à-dire plus qu’il ne nous en faut –n’appartient pas à l’économie ni à l’imagination économique. Elle peut par contre appartenir à l’imagination citoyenne.

J’ai, dans mon blogue et plusieurs éditions, consacré plusieurs articles autour de cette thématique :

  • La sortie du capitalisme a déjà commencé
  • Durée du travail, réalité et idéologie
  • Quand le supercapitalisme menace la démocratie
  • Questionner le travail
  • Sortir des logiques de guerre économique
  • Vive l’imagination citoyenne 
  • Le marché, lieu de la folie mimétique

[1] Le terroriste, le pédophile, le spéculateur

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