Magazine Société

Portrait d'une crise

Publié le 29 septembre 2008 par Edgar @edgarpoe
La crise financière se poursuit et atteint l'Europe. Comme chacun j'essaie de comprendre ce qui pourrait se passer. Et je suis tombé sur un bon papier de l'un des principaux conjoncturistes de Morgan Stanley, Stephen Roach (Pitfalls in a post-bubble world).

Assez pessimiste, comme à son habitude (il faut porter à son crédit le fait qu'il souligne depuis fort longtemps le caractère insoutenable des déficits américains.)

Quelques points clés de son raisonnement :

1. aux Etats-Unis, c'est la fin d'un modèle de croissance fondé sur l'endettement. De 1997 à 2007, l'endettement des ménages américains est passé de 93% à 133% de leur revenu disponible. Ceci leur a permis d'atteindre un taux de consommation de 72% du PIB contre 67% en moyenne sur les années 1975-2000 (il faut garder en tête que 5% de consommation en plus dans le PIB américain c'est environ 700 milliards de dollars).

2. Pour la Chine, qui connaît un taux de croissance des salaires de 15% par an, cela peut être le moment de ralentir la machine économique. Pour le Japon, l'impact du ralentissement américain sera plus dur. Pour l'Europe, il ne l'évoque pas, mais l'impact sera sans doute entre la situation chinoise et celle du Japon...

3. Les modalités de propagation de la crise seront en trois temps, et ce sera long. Et là c'est intéressant de conserver cela en tête, pour éviter d'annoncer la fin de la crise tous les jours pendant trois ans. Ce sont d'abord les sociétés financières qui sont touchées, et il estime au doigt mouillé que 65% de la crise est passée. Ensuite, ce seront les autres sociétés qui vont être heurtées. Et là, ça n'a pas vraiment commencé pour lui (80% est à venir, toujours au doigt mouillé). Enfin, la crise se fera sentir à l'extérieur des Etats-Unis (pour lui toujours, 90% reste à venir de ce côté)... En Europe, les effets sur le secteur financier sont déjà là, mais nul ne doit douter que le reste va arriver.

4. Dans les crises antérieures, lorsque l'économie américaine est touchée, on baisse les taux, le dollar baisse, l'export repart et tout va bien. La difficulté aujourd'hui, toujours selon Roach, est que les emplois qui sont partis en Chine et en Inde ne peuvent pas revenir (en ce sens, voir aussi Paul Craig Roberts, toujours). Ca va donc patiner au redémarrage bien plus longtemps...

5. Note finale : les réactions n'ont pas l'air à la hauteur des événements, pour lui. Les USA n'ont pas pris conscience de la nécessité de rééquilibrer leur modèle de croissance, et la Chine veut conserver son rythme de croissance à presque deux chiffres. Ca n'est pas conséquent, ni responsable, d'aucun côté.

Bon, note personnelle pour finir. Quid de l'Europe dans tout ça ?

Quatremer se réjouit du rôle stabilisateur de l'euro. C'est exact pour l'aspect monétaire de la crise. Mais ce n'est qu'un aspect particulier du problème. On constate d'abord que les marchés ne cessent pas d'évaluer séparément les politiques économiques de la zone euro, et que les différentiels de taux d'intérêt sur les dettes publiques, qui restent nationales, sont en forte hausse (avec l'Italie très touchée, la France au milieu et l'Allemagne en valeur refuge). C'est aussi un facteur potentiel d'éclatement de la zone euro...

La grande question, même si la zone euro reste unie, est de savoir si les états européens sauront assouplir les règles du pacte de stabilité face à la crise, ou s'ils s'entêteront dans des règles automatiques totalement inadaptées... Dans ce dernier cas, l'euro survivrait, mais pas forcément l'économie européenne...

 


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Edgar 4429 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine