L'époque mérovingienne (481 - 751) sort peu à peu de l'ombre, comme nous avons déjà eu l'occasion de l'évoquer à propos des fouilles d'Anger. Longtemps considérée comme un temps de barbarie et d'obscurité, cette période, qui n'est ni tout à fait l"antiquité ni encore vraiment le Moyen-âge, se dévoile progressivement au fil des études historiques et archéologiques pour ce qu'elle est, un temps de tansition dont les structures sociales comme les fondements culturels sont encore fortement liés au monde gallo-romain, pendant laquelle les contacts avec Byzance sont encore étroits, mais sujette à des transformations importantes dans les domaines religieux (christianisation) et politiques (éclatement des centres de pouvoir) ; on sait aussi que les "invasions barbares" ne furent pas la déferlente catastrophique que l'on a longtemps décrite. Les sources écrites sont peu nombreuses pour les VI-VIIème siècles : Grégoire de Tours et la chronique du pseudo-Frédégaire en sont les principaux, ce qui est peu. Non pas que l'on n'ait pas écrit en ce temps : on a en particulier soigneusement copié et transmis les oeuvres latines de l'antiquité païenne ; mais ce n'est pas un moment de grande production littéraire, cela est certain.Dans ces conditions, ce n'est pas toujours facile de restituer certains pans de notre histoire, puisque nous sommes confrontés à la partialité de sources peu nombreuses. C'est la tâche à laquelle s'est attelé Frédéric Armand, pour Chipéric Ier, petit-fils de Clovis, un roi à la légende noire. Grégoire de Tours le présente comme une brute cruelle, un mauvais souverain. Pourtant, en relisant avec distance et critique la documentation, l'historien a pu élaborer un tableau plus nuancé de Chilpéric, qui fut avant tout un homme de son temps, mais dont la mémoire fut condamnée par ses ennemis. Car on le sait, ce sont les vainqueurs qui écrivent l'histoire et les vaincus sont souvent chargés de tous les torts.
Amaury P.
Présentation de l'éditeur :
Chilpéric Ier est l'un des rois de France les plus mal connus, et le peu que l'on sait de lui n'est certes pas à son avantage. Né aux environs de 527, mort assassiné en 584, il est pourtant le petit-fils de Clovis et le grand-père de Dagobert. Mais il s'est vu rejeté très tôt dans les ombres les plus épaisses de l'Histoire, notamment par le portrait au vitriol qu'a fait de lui un contemporain célèbre : celui d'un roi cruel et violent, une sorte de Barbe Bleue des temps obscurs. Chilpéric Ier est donc mort deux fois : assassiné d'abord, puis exécuté "médiatiquement" par Grégoire de Tours, puisque c'est le portrait brossé par celui-ci qui nous reste aujourd'hui encore, jusqu'à passer pour vérité indiscutable. Certes, comme tous les puissants de ces époques reculées, Chilpéric fut au cœur d'une tourmente de guerres, parfois fratricides, de meurtres et d'intrigues. Fut-il pour autant un monstre ? Frédéric Armand s'attache ici, non pas à entreprendre la réhabilitation en règle de Chilpéric Ier, mais bien à le présenter sous un jour enfin débarrassé des a priori et des images toutes faites. Qui était donc ce roi, grand oublié de l'Histoire ? Fut-il le criminel sanguinaire décrit par Grégoire de Tours, ou simplement un homme de son temps, avec ses défauts et ses qualités ? C'est à ces questions, entre autres, que s'efforce de répondre cet ouvrage passionnant.
F. Armand, Chilpéric Ier, le roi assassiné deux fois, La Louve, Paris, 2008.