Suite à ce post dénonçant l'exposition de la Licra dans une église à Lyon, sur le supposé antisémitisme de l'Eglise, le Père Martin, membre de la Licra et instigateur de cette exposition, avait réagi en commentaire, accusant lui-aussi les chrétiens d'avoir conduit les Juifs "peu à peu, par participation en chaîne, active ou passive, vers l’extermination" ! Yves Daoudal lui répond magistralement :
"Déjà, à la fin du XIXe siècle, Bernard Lazare, le premier historien (juif) de l’antisémitisme, distinguait soigneusement l’anti-judaïsme chrétien de l’antisémitisme de son temps. Et encore ne connaissait-il pas, et pour cause, l’antisémitisme nazi. Il est historiquement et intellectuellement malhonnête de prétendre établir un lien de continuité entre l’anti-judaïsme théologique des pères de l’Eglise, les violences sporadiques anti-juives de l’histoire de la chrétienté, et l’antisémitisme moderne. S’il est vrai que les juifs ont été plus souvent qu’à leur tour les « boucs émissaires » dans des moments de difficultés sociales, les autorités religieuses, et les papes en personne, ont toujours condamné ces violences et ont toujours protégé les juifs (rappelons-nous que les juifs de Carpentras étaient « les juifs du pape »), d’abord au nom du respect de la dignité humaine de tout homme, et en outre parce que les juifs sont de la race qui a donné le Christ. Ce qui est bien évidemment exactement le contraire de l’attitude des nazis.
Dans sa réponse aux chrétiens qui osent critiquer l’exposition, le Père Martin expose une théologie qui n’est pas catholique. Et je ne parle pas d’une antique théologie qui aurait été réformée avec Vatican II, je parle de la théologie permanente de l’Eglise, telle qu’elle s’exprime toujours dans la déclaration Nostra Ætate de Vatican II, dont on rappellera qu’elle concerne « les relations de l’Eglise avec les religions non chrétiennes ». Dans ce texte, il n’est dit nulle part que les juifs seraient nos « Pères dans la foi ». Bien au contraire, Nostra Ætate souligne ce que les chrétiens doivent au judaïsme de l’Ancien Testament. Nos pères dans la foi sont Abraham, Isaac et Jacob, ce qui veut dire que l’Eglise est l’héritière d’Abraham et de l’antique Alliance, par la Nouvelle Alliance conclue par le Christ dans son sang, « le sang de l’Alliance nouvelle et éternelle ».
Le judaïsme de l’Ancien Testament est la religion du Temple, du sacerdoce, du sacrifice de l’autel. Le judaïsme actuel (depuis 2.000 ans) n’a ni Temple, ni sacerdoce, ni sacrifice de l’autel. Parce que c’est le christianisme qui, à travers le Christ, a hérité du Temple (le corps du Christ : détruisez ce Temple, et en trois jours je le reconstruirai), du sacerdoce (du Christ), du sacrifice (du corps et du sang du Christ). Et les païens ont ainsi été greffés sur l’olivier franc, comme dit saint Paul. Ils en sont devenus les nouveaux rameaux, tandis que les juifs se coupaient eux-mêmes du tronc et devenaient des branches mortes, qui n’ont cessé de se dessécher en multipliant les plus extravagantes conséquences de la Loi dans tous les détails de la vie quotidienne, et en inventant des doctrines aberrantes (par exemple la croyance en la réincarnation, affirmée par le Zohar et tous les rabbins qui s’en réclament).
Le Père Martin évoque la sève de l’olivier franc, mais cette sève qui nous vient de l’Ancien Testament irrigue les branches de l’olivier qui a été greffé sur lui (l’Eglise), elle n’irrigue pas, par la force des choses, les branches mortes qui se sont retranchées d’elles-mêmes de l’olivier, comme dit saint Paul. De ce fait, il est aberrant de prétendre que l’Alliance « nous unit en un seul Peuple de Dieu ». C’est une interprétation totalement illégitime des paroles de saint Paul. Ici aussi, il suffit de se reporter aux textes de Vatican II : « L’Eglise est le nouveau peuple de Dieu. » Oui, saint Paul dit que le Christ a réuni juifs et païens en un seul peuple : il s’agit bien évidemment des juifs et des païens qui croient au Christ, comme le rappelle et le souligne la Constitution Lumen Gentium de Vatican II.
Voilà ce qu’il faut conclure. Le Père Martin, qui prétend faire la leçon aux catholiques, rejette les textes de Vatican II et toute la tradition catholique et s’est inventé sa petite religion où les juifs d’aujourd’hui sont ses Pères dans la foi. Ce qui le disqualifie de façon radicale. Il ne faut pas croire ce qu’il dit. Et cela montre a contrario à quel point ont raison ceux qui critiquent l’exposition."