Roulé dans la raffarinade
« Merci de nous montrer que la victoire n’est pas facile, qu’elle se gagne étable par étable, commune par commune« disait Jean-Pierre Raffarin à Bernadette, du temps où il était Premier ministre. Cette glorieuse ânerie Raffarinade n’a pas survécu à l’étable des primaires, et notamment à la fameuse maxime que j’avais mise en début de mon précédent billet sur la course sénatoriale : « ”Au Sénat, on tue aussi. Mais quand les cadavres tombent, ils font moins de bruit parce que la moquette y est plus épaisse…” (Jean-Claude Gaudin, 1994).
Notre santon, ravi de crèche, a été exécuté d’un coup de silencieux bien ajusté. 56 voix contre 78 à son adversaire. A moins qu’il ne s’agisse d’un carreau tiré par un Larcher. Bref, le Sénat reste ce beau jeu de plateau, ce Cluedo où l’on connaît toujours la victime, parfois le lieu et l’arme, mais où on n’arrive jamais vraisemblablement à connaître le coupable.
Il faut dire que la liste des suspects est longue.
En effet, si jean-Pierre Raffarin a été aussi déçu, c’est parce que les ex-UDF ne l’ont pas soutenu en totalité. Qui lui a savonné la planche ? Ca sent le savon de Marseille… la mise à mort de Raffarin ressemble en effet beaucoup au coup de poignard qui a occis il y a quelques mois Muselier. Magic Jean-Claude aurait été entendu par son voisin de séance marmonner, après le discours de Raffarin, « C’était un bon discours, mais cela ne me fera pas changer mon vote ».
Raffarin a surtout été larché par ses pairs, trahi par ses nouveaux amis de l’UMP qui lui ont préféré le très RPR maire de Rambouillet, ce qui pose la question de l’implication du Château. L’UMP est une grande famille où tous les cochons sont égaux, mais certains sont plus égaux que d’autres.
Enfin, Raffarin, écrambouillet par Larcher, a vraisemblablement été victime des réseaux franc-maçons puissants au Sénat, qui ont fini de l’exécuter.
Le Petit âge gris
Quelle ingratitude !
Fidèle à tirer sa charge, jamais avare de « positive attitude », Raffarin me fait penser au petit âne gris de la chanson d’Hugues Aufray, sans doute à cause de cette histoire d’étable ou de baudet Daudet. Et pis Raffarin s’est gaufray, comme on dit chez moi…
Oui, on se souvient de lui, comme premier ministre: « Marchant toujours en tête, Aux premières lueurs, Pour tirer sa charrette, Il mettait tout son coeur. »
Ce bâton de maréchal, après avoir passé plusieurs années à payer pour Chirac, puis à ramer pour Sarkozy, sincèrement il le méritait. On en mesurera d’autant plus sa déception:
T’as vu la tronche ?
envoyé par forumplus
Et effectivement, il est gris sur ce film.
Qu’on le comprenne, ce serviteur fidèle ! Après avoir servi au domaine de Chirac vieillissant (« Mais un jour de Marseille, Des messieurs sont venus, La ferme était bien vieille, Alors on l’a vendue. »), Raffarin a su s’accrocher à la Sarkozie et tenter de peser « Il resta au village, Tout le monde l’aimait bien, Vaillant malgré son âge, Et malgré son chagrin ». Son problème, c’est la discrétion : bruyant mais pas fin dans sa tentative d’exister face à Sarkozy, tout en étant incapable d’instaurer un rapport de forces.
Il est difficile de se moquer d’un homme comme JPR. Finalement, on l’aime bien, avec ses maximes ridicules et sa propension incroyable à faire le dos rond. Mais, in fine, il faut reconnaître que la propension de Jean-Pierre Raffarin à toujours manoeuvrer autour du Sénat ou de l’UMP, avec l’air matois du paysan béarnais qui couvre d’un oeil lubrique sa brebis un soir de solitude, a fini par lasser.
Et cette utilisation pas très fine de la bénédiction présidentielle, notre Jeannot, il y a cru, malgré la défaite de Paillé qui lui aussi s’en revendiquait ?!
Le problème de Raffarin, c’est qu’on le voit venir, de loin. Il n’est pas assez vicieux pour faire des arnaques qui réagissent, et en même temps suffisamment malin pour que ses stratégies soient voyantes. Quant on voit JP Raffarin, ça rassure : on se dit qu’il n’y a pas que des requins en politique…
Le coup de grâce aura été d’être battu par un homme que Raffarin a lui-même fait rentrer dans son 3ème gouvernement, entre mars 2004 et mai 2005, comme ministre délégué aux relations du travail. Décidément,… cela devient un point commun de la plupart des Premier ministres de Chirac (Jospin, tué par Chevènement; et Villepin, tué par Sarkozy) !
Cette vie honorable
Un soir s’est terminée
Dans le fond d’une étable
Tout seul il s’est couché
Pauvre bête de somme
Il a fermé les yeux
Abandonné des hommes
Il est mort sans adieu.
Cette chanson sans gloire
Vous racontait la vie
Vous racontait l’histoire
D’un petit âne gris.
Le petit ane gris
envoyé par marienoandreâne grisLarcherRaffarinSénat
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