Le Président iranien Mahmoud Ahmadinejad est arrivé à New York cette semaine pour s'adresser à l'Assemblée Générale des Nations Unies. Il a reçu à l'hôtel Grand Hyatt le rédacteur en chef du LA Times Dayan Maharaj, le rédacteur des affaires étrangères Bruce Wallace, et le responsable du bureau de Jérusalem Richard Boudreaux. Le texte qui suit est une transcription de leur interview :
23 septembre 2008 / Alterinfo
Comme vous le savez, à New York, nous avons beaucoup de nouvelles. Le système financier est en pagaille et les retombées ébranlent le monde. Qui, pensez-vous, est derrière ce désordre financier, et est-ce que c'est bien ou mal pour l'Iran ?
Le gouvernement EU a fait une série d'erreurs dans les dernières dizaines d'années. D'abord, l'imposition à l'économie EU de lourdes dépenses militaires et des interventions à travers le monde. Par exemple, il n'y a personne, en ce moment, qui peut estimer précisément combien la guerre en Iraq a coûté jusqu'à maintenant.
Mais, pour être clair, nous ne sommes pas contents de voir ce qui se passe. Nous ne sommes jamais contents quand c'est le peuple qui est sous pression.
On vous a cité d'avoir déclaré que c'était le Messie (plutôt l'imam caché et attendu chez les chiites, Ndt) qui gérait les affaires quotidiennes de l'économie iranienne. En Iran, il y a des rapports mondialement diffusés à propos d'une inflation galopante, d'un chômage massif, d'une importante fuite de capitaux et d'une corruption rampante que vous avez vous-même critiqués. Portez-vous une responsabilité quelconque dans cette situation ?
Je ne vois pas où vous avez trouvé une telle citation ? Le gouvernement est responsable de l'économie.
Que ce soit aux frontières est ou ouest de notre pays, il y a deux grandes guerres en cours, et durant des années, des sanctions ont été imposées sur nous. Il est bien normal que, quand les crises mondiales augmentent, cela fasse du mal à l'Iran.
L'administration Bush arrive à son terme. Le Conseil de Sécurité de l'ONU est divisé et ne semble pas disposé à imposer de nouvelles sanctions sur l'Iran. Comme vous venez à l'ONU, est-ce que vous avez l'impression que vous êtes en trains de gagner la confrontation avec les Etats-Unis ?
D'une manière générale, nous ne sommes pas pour les confrontations. L'administration de M. Bush n'a pas seulement fait du mal au peuple des Etats-Unis, mais aussi aux peuples partout dans le monde. Les principes qui étaient poursuivis en organisant la propagande sur le nucléaire iranien étaient faux et incorrects pour commencer avec. C'était un grand mensonge.
Le Sénateur (Barack) Obama a déclaré qu'il parlerait aux adversaires des Etats-Unis, y compris l'Iran. Le Sénateur (John) McCain dit qu'il ne le fera pas. Avec qui préfériez-vous travailler, et comment feriez-vous un nouveau départ avec la nouvelle administration ?
Cela ne fait pas de différence qui est au pouvoir aux Etats-Unis. Tout gouvernement qui arrive au pouvoir doit changer les approches de la politique précédente, car des graves maladresses ont été commises et doivent être corrigées. Le gouvernement EU doit économiser les lourdes dépenses sur les engagements et les interventions militaires, et se recentrer sur l'amélioration de la vie de son peuple, (et) de parler vraiment avec respect aux autres nations.
Monsieur le Président, quelle est la réponse d'Iran à la proposition « geler pour geler » (selon laquelle l'Iran doit arrêter son enrichissement en Uranium et les Etats-Unis et ses alliés arrêteront leur pression pour de nouvelles sanctions, pendant une période de six semaines de pré-négociations) ?
L'année dernière, nous avons traité et résolu toutes les questions qui nous ont été adressées par l'Agence (de l'Energie Atomique). Juste avant la conclusion du rapport, l'administration EU a fourni une série de (faux) documents (à l'Agence) et l'a en quelque sorte mal informé à propos de quelques opérations. C'était trop grotesque et superficiel que même un gamin d'école s'en moquerait. Evidemment, nous ne nous attendons pas à mieux de la part de l'administration EU, car elle a déclaré qu'elle était notre ennemi et que nous étions le leur.
C'est intéressant : des pays qui ont la bombe atomique eux-mêmes nous demandent de ne pas avoir de l'énergie nucléaire pacifique. C'est l'une des plus grosses blagues d'aujourd'hui.
Vous avez fréquemment déclaré que l'état d'Israël devrait disparaître de la carte. Quelle action l'Iran envisage t-il d'entreprendre pour atteindre l'objectif de la disparition d'Israël ? Ou est-ce que ce n'est rien d'autre que de la parole ?
L'Iran a fait sa proposition haut et clair : Nous appelons à un libre référendum de la nation palestinienne pour déterminer leur propre gouvernement. Ceci fera l'objet d'une proposition que nous soumettront au secrétaire général de l'ONU. La Palestine constitue une nation qui vivait là bas depuis des centaines, si ce n'est en effet des milliers d'années. Maintenant, avec une réflexion préplanifiée, (Israël) a effectivement déplacé plus de cinq millions de personnes de leurs propres terres, et cherché d'autres gens d'autres endroits du monde pour les installer à leur place. Comment est-ce possible de reconnaître un état qui a vu le jour comme ça ?
Si nous sommes d'accord et nous acceptons que certains événements aient eu lieu durant la deuxième guerre mondiale, bon, où est-ce que cela s'est passé ? En Allemagne, en Pologne et en Grande Bretagne. Maintenant, qu'est ce que cela a vraiment à faire avec la Palestine ? Pourquoi c'est au peuple palestinien de payer pour ça ?
L'Amérique est critiquée (Mais non pardi, ce sont les Etats-Unis. L'Amérique ne se limite tout de même pas à un seul pays, Ndt) à travers le monde pour le camp du Guantanamo. Quant-est il à propos de la répression en Iran ? Vous adoptez des mesures énergiques contre vos opposants politiques, contre les universitaires et contre les médecins avec une autorisation clinique de traiter les malades du SIDA. De quoi avez-vous peur ?
C'est ce que disent les Sionistes et l'administration EU. Ce n'est pas vrai ; cela n'arrive pas. En Iran, la liberté est absolue, et c'est la loi qui règne. Nos procédures juridiques sont parmi les plus avancées dans le monde. Quand je tiens des conférences de presse, tout le monde est là pour poser librement ses questions. Même les universitaires peuvent parler librement devant notre chef et critiquer.
Alors il n'y personne en prison pour ses croyances politiques ?
Nous n'avons vraiment pas besoin de telle chose ; nous sommes un gouvernement que 98% du peuple soutient.
Combien allez-vous manquer l'absence du Président Bush de la scène internationale ?
Bien sûr, je suis très opposé à des mesures prises par M. Bush. Il aurait pu éviter la guerre. Savez-vous que plus d'un million de personnes en Irak ont été tuées ou blessées, et de même pour des centaines de milliers de personnes en Afghanistan ? Pourquoi ? Parce que M. Bush veut avoir le pouvoir fondamentalement sur le Moyen Orient. Est-ce pour l'intérêt du peuple EU ? No, pas vraiment. Seulement pour l'intérêt de quelques capitalistes.
Est-ce que l'Iran a des réserves à propos de la possibilité d'un accord entre la Syrie et Israël, dans lequel la Syrie récupérerait les hauteurs du Golan, mais en échange elle devrait expulser le Hezbollah de son territoire ?
Nous approuvons la libération de toute partie des terres occupées. Nous croyons que la libération des hauteurs du Golan est exactement ce que le régime sioniste ne veut pas. Et nous pensons que c'est très improbable que ce soit un résultat des négociations.
Le régime ressemble à un avion qui a perdu ses moteurs et qui est en train de perdre l'altitude. Et personne ne peut l'aider. Ceci profitera à tout le monde – et plus que quiconque, au peuple EU. Car c'est au nom du peuple EU que ce régime est en train de commettre des crimes, des crimes qui remplissent les poches des capitalistes, et pour qui le peuple EU paye.
Traduit par Iyad Abbara
http://articles.latimes.com/2008/09/23/editorial_pages/oe-ahmadinejad23