Les sept couleurs, par Robert Brasillach

Par Alain Bagnoud

Les sept couleurs, donc, du sulfureux Brasillac, a un style éblouissant et un contenu vaguement gênant.
Brasillach en tout cas est un virtuose. Dans Les sept couleurs, il varie à volonté et systématiquement les formes. Il commence par un roman traditionnel, passe à l'épistolaire, puis au journal intime, puis aux réflexions, au théâtre, aux documents et enfin au monologue. Toutes choses qu'il maîtrise à la perfection.
Peu d'écrivains peuvent jouer parfaitement de tant de registres, en connaître les règles et les faire oublier en utilisant une langue si fluide.
Quant au contenu, c'est autre chose.
Une très belle histoire d'amour commence au début du livre, entre deux jeunes gens qui visitent Paris comme s'ils étaient en vacances. Puis ils se perdent sans jamais s'oublier et c'est alors que tout se gâte un peu.
Patrice, le garçon, passe du Manifeste du surréalisme à l'admiration du fascisme italien qu'il découvre comme précepteur à Florence. Il s'engage dans la Légion étrangère dont il jouit des rudesses viriles, puis il dirige une chambre de commerce en Allemagne ce qui lui permet d'assister au Congrès de Nuremberg et de s'extasier sur l'esthétique nazie, son endoctrinement de la jeunesse, son culte de la force et de la joie.
Catherine de son côté épouse un homme qui, croyant la perdre parce qu'elle a revu Patrice, s'engage dans la guerre d'Espagne aux côtés de Franco, bien entendu, ce qui est prétexte à des reportages enthousiastes.
Tout ceci permet à Brasillach de comparer les différents fascismes et leurs adaptations locales. Afin, probablement de définir ce fascisme français national qu'il appelait de tous ses voeux.
Bien évidemment, cette position idéologique sonne de manière assez déplaisante aux lecteurs actuels. Mais il n'y a pas que ça.
Brasillach a tendance à voir ses personnages comme des types. La jeune fille allemande (avec ses tresses blondes). La femme française (une petite brune). L'homme léger qui s'oppose à l'homme lourd. Le garçon nazi. Le vieux guerrier allemand.
Et ces clichés affaiblissent considérablement l'histoire d'amour du livre et la crédibilité de son roman.

Robert Brasillach, Les sept couleurs, Le livre de poche