Les sept couleurs, donc, du
sulfureux Brasillac, a un style éblouissant et un contenu
vaguement gênant.
Brasillach en tout cas est un virtuose.
Dans Les sept couleurs, il varie à volonté et
systématiquement les formes. Il commence par un roman
traditionnel, passe à l'épistolaire, puis au journal
intime, puis aux réflexions, au théâtre, aux
documents et enfin au monologue. Toutes choses qu'il maîtrise à
la perfection.
Peu d'écrivains peuvent jouer
parfaitement de tant de registres, en connaître les règles
et les faire oublier en utilisant une langue si fluide.
Quant au contenu, c'est autre chose.
Une très belle histoire d'amour
commence au début du livre, entre deux jeunes gens qui
visitent Paris comme s'ils étaient en vacances. Puis ils se
perdent sans jamais s'oublier et c'est alors que tout se gâte
un peu.
Patrice, le garçon, passe du
Manifeste du surréalisme à l'admiration du
fascisme italien qu'il découvre comme précepteur à
Florence. Il s'engage dans la Légion étrangère
dont il jouit des rudesses viriles, puis il dirige une chambre de
commerce en Allemagne ce qui lui permet d'assister au Congrès
de Nuremberg et de s'extasier sur l'esthétique nazie, son
endoctrinement de la jeunesse, son culte de la force et de la joie.
Catherine de son côté
épouse un homme qui, croyant la perdre parce qu'elle a revu
Patrice, s'engage dans la guerre d'Espagne aux côtés de
Franco, bien entendu, ce qui est prétexte à des
reportages enthousiastes.
Tout ceci permet à Brasillach de
comparer les différents fascismes et leurs adaptations
locales. Afin, probablement de définir ce fascisme français
national qu'il appelait de tous ses voeux.
Bien évidemment, cette position
idéologique sonne de manière assez déplaisante
aux lecteurs actuels. Mais il n'y a pas que ça.
Brasillach a tendance à voir ses
personnages comme des types. La jeune fille allemande (avec ses
tresses blondes). La femme française (une petite brune).
L'homme léger qui s'oppose à l'homme lourd. Le garçon
nazi. Le vieux guerrier allemand.
Et ces clichés affaiblissent
considérablement l'histoire d'amour du livre et la crédibilité
de son roman.
Robert Brasillach, Les sept couleurs, Le livre de poche