Avec les années, on devient plus frileux face à certaines choses. On ressent, par exemple, la peur des foules, des voitures, de la nourriture, de l’actualité… Y a-t-il moyen de renverser la vapeur ? Bien sûr ! Et guérir de nos angoisses peut être le début d’un temps nouveau…
Nous sommes tous faits de chair et d’os… Une chose nous différencie des autres : nos émotions, cette portion intangible qui fait de chacun d’entre nous une personne unique. Grâce aux émotions, on rit, on pleure et, quelquefois, on a peur. La regrettée psychologue Michelle Larivey (www.redpsy.com), auteure de La Puissance des émotions et Les Émotions source de vie, a identifié quatre types d'expériences émotives : simple, mixte, repoussé et pseudo-émotion. La peur fait partie de la première catégorie, c'est-à-dire une émotion dans sa plus simple expression. Dans ce cas, ce n’est pas ce qui se produit dans le présent qui représente un danger, mais ce qui pourrait survenir dans un avenir plus ou moins rapproché.
Face à l’inconnu
Ces sentiments sont à l’origine des problèmes survenus dans la vie de Raymonde. «Il y a trois ans, j’ai commencé à avoir peur en pensant à ce que l’avenir me réservait, raconte-t-elle. Je vis avec la crainte de perdre toutes mes libertés parce que je vieillis. La chose qui me dérangerait le plus, ça serait l’obligation de quitter mon chez-moi par manque d’autonomie physique ou mentale… J’ai peur aussi de devenir un fardeau pour les autres.» Voilà un exemple qui explique bien que la peur est une émotion d'anticipation : elle informe l’organisme d’un danger potentiel.
D’autres auteurs, comme Alain Sarton (La Traversée des émotions), ont cherché à mettre la peur en image pour en comprendre le sens et l’expliquer. Selon Sarton, les sentiments sont colorés : la joie, la peine et la colère sont des émotions chaudes, alors que la peur est froide. Il ajoute que la peur pourrait bien être la plus archaïque de toutes nos réactions…
Comment la peur se développe
«La peur est innée. Elle apparaît dès l’enfance : le bébé, avant 2 ans, a cette sensation lorsque maman sort de son champ de vision. Il a peur parce qu’il croit qu’elle ne reviendra pas», souligne Nicole Tremblay, docteure en psychologie. En vieillissant, les inquiétudes évoluent et deviennent, pour certains plus lourdes.
À 59 ans, Gisèle sait très bien ce qu’il en est. «J’ai toujours eu peur de conduire, même lorsque j’étais plus jeune. Je me prive de plein de choses pour ne pas avoir à prendre le volant. Je n’ai jamais été une passionnée de la route, dit-elle. Quand je conduis, je suis très stressée et je reviens à la maison complètement épuisée. Cette frayeur est devenue un handicap. C’est viscéral, j’en ai mal partout ! Avec les années, ma peur est davantage présente. Heureusement, j’ai trouvé des trucs, notamment emprunter des chemins avec lesquels je suis à l’aise. J’évite les grandes artères, je m’allonge s’il le faut, mais je me sens mieux.»
La psychologie chinoise tente d’expliquer le lien entre nos organes et nos émotions. Il est vrai que, souvent, lorsqu’on ressent de la peur, nos intestins bloquent et notre vessie s’active… «Cette peur panique va également affaiblir les reins. Peu de gens le savent, mais c’est précisément la vitalité de cet organe qui permet de nous mettre, ou pas, en action, et la peur inhibe l’action», souligne Nicole Tremblay.
Il est médicalement prouvé que, avec les années, les reins fonctionnent moins bien. Dans ce cas, peut-on croire que cela expliquerait l’apparition de certaines peurs ? «Certainement !, affirme la psychologue. Quand on est jeune, nos reins sont forts, on a plus d’énergie et les émotions négatives ne nous atteignent pas autant. Nos organes aussi vieillissent et c’est comme si le champ d’action du phénomène négatif nous atteignait plus facilement. Nous sommes alors plus sujets à l’effet du stress et de la peur.»
Une autre étude vient faire le lien entre le physique et les émotions. Une équipe de chercheurs a affirmé récemment que l’intestin réagit directement aux pensées, et vice versa.
Les infos, source de frayeur ?
Il n’y a pas que nos organes qui sont la source explicative de toutes nos craintes. Ce que l’on voit dans l’actualité peut également nous donner froid dans le dos… Qui ne s’est pas dit, en regardant les bulletins de nouvelles ou en lisant les journaux, que le monde allait mal ? Avouez que vous fermez désormais vos portes à double tour ! Il existe même depuis quelques années des communautés de citoyens qui habitent au sein de quartiers protégés et sécuritaires. Est-ce que l’actualité est à l’origine de cette société de la peur ? Peut-être bien.
Une chose est certaine, nous en sommes de grands consommateurs. Selon une enquête récente, 89 % des Canadiens suivent régulièrement les informations plusieurs fois par semaine. C’est la portion de la population âgée de 65 ans et plus qui suit l’actualité le plus régulièrement (chaque jour). Mais pourquoi avons-nous plus peur ? «Le phénomène Internet y est pour beaucoup. Maintenant, on peut suivre la guerre d’heure en heure, et ce, en direct. Grâce au web, les barrières sont tombées, souligne Pierre Martineau, directeur de l’information à TQS. Le nombre de canaux d’information explique aussi que certaines personnes ont davantage peur de ce qui se passe dans le monde. Il n’y a pas si longtemps, on n’avait que deux postes de télé au Québec. Aujourd’hui, on s’installe devant le téléviseur et une panoplie de médias, y compris les chaînes d’actualité continue, nous renseignent. C’est peut-être la répétition des mêmes images encore et encore qui nous fait croire que l’actualité est plus violente et épeurante.»
Mettre fin au règne de la peur
«C’est la passion pour la peinture qui m’a en quelque sorte guéri de mes peurs», raconte Roger. Il faut en effet chercher à vaincre ses appréhensions pour continuer d’avancer. Une panoplie de solutions s’offrent pour reprendre le contrôle de sa vie. La première est sans aucun doute de s’avouer à soi-même qu’il y a un problème. Roger a dû passer par là : «À l’âge adulte, ma vie a basculé quand une maladie, que j’avais eue très jeune, a réattaqué. J’ai dû prendre des décisions pour me réorienter. Le gars optimiste que j’avais toujours été a eu peur de la solitude, de l’ennui, du rejet. J’ai tout de même réussi à me reprendre en main. Je me dis que, face à n’importe quelle situation, il faut être capable de réagir et en soutirer le meilleur.»
Ce n’est pas toujours facile de voir la lumière au bout du tunnel quand la peur nous prend aux tripes. Mais il faut persévérer. «L’art m’a permis de maîtriser mes démons. Ce n’était pas simple au début et mes premiers tableaux n’étaient pas terribles, mais je me suis donné le défi de le faire sérieusement, ce qui m’a aidé à m’en sortir. Me changer les idées a été mon meilleur remède», souligne Roger.
«Une autre bonne manière de réduire ses anxiétés est de toujours faire des pas pour aller à leurs rencontres. Il faut cesser d’éviter ses peurs et au contraire les affronter», soutient le psychologue Yves Dalpé. Selon Elsa Godart, philosophe et psychanalyste française, la liste des trucs à mettre en pratique afin de combattre ses peurs est très simple. Elle a mis au point la volothérapie, fondé sur le pouvoir de la volonté. Dans Je veux donc je peux !, elle explique comment faire taire ses angoisses : d’abord, définir les raisons de sa souffrance; ensuite, trouver pourquoi on accepte d’avoir mal ou d’avoir peur plutôt que de combattre; puis découvrir des moyens pour changer les choses; enfin, établir un projet de vie qui permet à la volonté d’exercer son pouvoir sur le quotidien.
Sans le savoir, Jeannot a appliqué les fondements de la volothérapie à la situation qu’elle vivait. «Il y a quelques années, j’ai quitté mon conjoint. La façon dont je m’y suis prise pour ne pas vivre avec la peur ? Réfléchir et visualiser avant de faire un geste ! J’ai pensé à toutes les étapes que je devrais franchir en choisissant de vivre seule. J’ai recommencé ma vie à zéro à la fin de la soixantaine. Il n’y a pas d’âge pour repartir du bon pied. Il ne faut pas avoir peur», affirme-t-elle.
Le mot de la fin revient sans aucun doute à l’écrivain et formateur en psychothérapie, François Paul-Cavallier, auteur de J’allège ma vie ! : pour se soulager du stress, on doit se donner la permission de mettre ses peurs hors d’état de nuire. Selon lui, le simple fait d’anticiper la guérison participe à la stimulation du système immunitaire et à la remise en route de nos fonctions vitales. Ça vaut la peine d’essayer, non ?
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À lire
Je veux donc je peux !, par Elsa Godart, Plon, 2007, 164 p., 26,95 $. Comment vaincre ses angoisses grâce à la volonté qui, si on sait bien s’en servir, peut avoir une finalité thérapeutique.
J’allège ma vie !, par François Paul-Cavallier, Plon, 2007, 154 p., 26,95 $. Un plan pour se soulager du stress.
La traversée des émotions, par Alain Sarton, Pocket, 2006, 243 p., 13,95 $. Travailler sur ses émotions afin de se libérer du poids du passé, retrouver son identité profonde, enfin libérée de toutes peurs…
Bonne journée,
Marie-Claude
Source: Le bel age