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Sarkozy ou l’économiste botté

Publié le 25 septembre 2008 par Argoul

Lors de son discours de politique économique à Toulon, Nicolas Sarkozy s’est montré volontaire, toujours en campagne. Lorsqu’il a cité de Gaulle, qui a su prendre la décision de faire construire les centrales nucléaires, il a eu un mouvement des épaules, comme s’il se carrait dans la stature du grand homme. Rien de bien neuf donc, mais un ton direct, qui devrait plaire, et la réaffirmation des réformes pour lesquelles il a été élu. Il a évoqué le capitalisme, sa régulation nécessaire, l’intervention de l’Etat mais aussi de l’Europe, surtout pour négocier sur la monnaie. La crise financière et l’urgence écologique impliquent d’approfondir les réformes et les décisions sont à prendre dès maintenant.

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Il distingue le capitalisme financier (qui a abouti à la situation actuelle) du capitalisme d’entrepreneurs qui « depuis 7 siècles » a créé notre richesse. « Le capitalisme n’est pas la loi de la jungle » a-t-il martelé, l’économie de marché doit être régulée. Nul libéral n’a jamais dit autre chose, rendons-lui acte. « La crise financière actuelle n’est pas la crise du capitalisme mais la conséquence de l’irresponsabilité, de l’opacité et de la spéculation. » Il n’est pas normal qu’une banque perde 5 md€ sans que personne s’en aperçoive, alors qu’elle est sensée financer les projets immobiliers des particuliers et les investissements des entreprises. Mais l’anticapitalisme ou le collectivisme n’offrent aucune alternative crédible à la situation actuelle. Tout comme faire comme si de rien n’était serait une autre erreur. Il faut refonder le capitalisme sur une éthique, « celle de l’effort, celle du travail. » Il faut équilibrer la liberté nécessaire et la règle tout aussi nécessaire, la responsabilité individuelle et la responsabilité collective, l’État et le marché. « Le laisser-faire, c’est fini ! »

Pour réguler il propose les mesures suivantes : encadrer les rémunérations des dirigeants et des opérateurs de marché (avec une loi si nécessaire avant la fin de l’année) ; plus d’actions gratuites ou alors pour tous les salariés ; la rémunération des dirigeants doit être indexée sur la performance réelle de l’entreprise, les salariés aussi via l’intéressement doivent en profiter ; plus aucun parachute doré ne doit être distribué quand il y a faute. Des sanctions au moins financières seront prises envers les responsables de la crise car ce serait une injustice de grande ampleur si ce n’était pas fait. Il faut aussi réglementer les banques, accroître l’efficacité de leur contrôle interne ; s’attaquer à la complexité des produits d’épargne ; à l’opacité des transactions. Il faut examiner les paradis fiscaux et le régime des ventes à découvert. Il faut revoir la norme des comptes au prix du marché. Il faut mieux contrôler les agences de notation qui se sont révélées « défaillantes ».

Mais la monnaie est au cœur de la crise financière. Le dumping monétaire peut engendrer des guerres commerciales et inciter au protectionnisme. Nicolas Sarkozy a visé nommément le yuan chinois mais aussi le dollar « en sous-évaluation chronique ». Il appelle à une réunion des grands dirigeants du monde pour « un nouveau Bretton Woods » pour coordonner les efforts ; cet appel est en accord avec la chancelière allemande.

Il y a nécessité d’agir et l’Etat prendra des participations provisoires si nécessaire dans les entreprises. Avec cette interrogation : « l’Europe est-elle capable de faire face à une urgence ? » Ne faut-il pas revoir l’orthodoxie de la concurrence, des objectifs de politique monétaire, mobiliser des ressources ? « Quand le monde change, l’Europe doit changer aussi », elle ne doit être « la variable de l’ajustement du monde ». Les banques françaises paraissent en mesure de faire face à la crise mais Nicolas Sarkozy prend l’engagement que l’Etat garantira l’épargne de tous les Français, et le financement des PME. La loi de mobilisation sur le logement sera maintenue. Le RSA et les augmentations des petites retraites est une mesure de solidarité avec les plus vulnérables.

« La crise appelle à accélérer le rythme des réformes, en aucun cas de la arrêter ou de les ralentir. » L’Etat ne peut pas indéfiniment financer ses dépenses courantes et ses dépenses de solidarité par l’emprunt. Il ne s’agit pas d’augmenter les impôts. C’est ce qui a été fait dans les années 1970 et cela a aggravé la crise. Seule la mesure de financer le RSA avec les revenus financiers est juste car ils ont monté plus vite que les salaires ces dernières années. « Nous sommes le gouvernement de tous les Français et pas de quelques-uns. » Pour retrouver des marges de manœuvres, les dépenses de fonctionnement de l’Etat seront diminuée : >30 000 fonctionnaires ne seront pas renouvelés l’an prochain, la réforme de l’hôpital verra le jour et la réforme des collectivités territoriales sera engagé. Il y a trop d’échelons territoriaux français. Cela permettra de financer la suppression de la taxe professionnelle, dans un premier temps pour les nouveaux investissements.

Nous passons d’un monde d’abondance à un monde de rareté. Pétrole, gaz et matières premières seront plus chers. « Le principe pollueur payeur s’appliquera partout ». Le bonus/malus est une bonne mesure qui sera négociée et étalée dans le temps, mais qui sera poursuivie. Utiliser la fiscalité pour relever le défi écologique est bon. 2000 km de lignes à grande vitesse seront mises en chantier, la rénovation de l’immobilier public aura un effet d’entraînement sur l’activité. Il faudra investir massivement dans les énergies propres, le nucléaire de nouvelle génération et le transport collectif. « L’investissement d’Etat est au cœur de notre stratégie économique. » Le crédit d’impôt recherche et la réforme de la formation professionnelle seront poussés rapidement. Nombre de ces mesures figuraient déjà dans le rapport Attali et l’opportunité de passer sur les rentes de situation s’offre avec la crise.

Au total, on sentait un Nicolas Sarkozy à son affaire : « Les vieilles idées et les vieilles structures sont balayées » a-t-il conclu avec une certaine jubilation. « Nous avons le choix de subit le changement ou d’en prendre la tête. Mon choix est fait. »


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