Mais, pour un fumeur, la cigarette du matin est d'une grande sacralité. Cette cigarette qui, selon les dires du grand philosophe Gad El Maleh, "te met dans un état de ouf" est bien celle qui dirige et conditionne l'humeur quotidienne du fumeur. Parmi les 14 milliards de cigarettes que consomme le Royaume du Maroc, c'est surtout cette cigarette qui atteste du degré de l'addiction du fumeur invétéré. Lancez lui un affable bonjour matinal, il vous répondra tel un pitbull castré: "éloignez vous, je n'ai pas encore fumé". Vous pouvez donc imaginer son état pendant le Ramadan: agressif toute la journée, il pensera d'abord à inhaler sa délicieuse fumée avant de goûter à sa succulente harira. Et la caricature est à peine exagérée.
Face à ce type de fumeurs, il existe une infime partie de Marocains qui vont essayer de profiter de ce mois de jeûne pour arrêter de fumer et enfumer les autres. Pour cela, ils ne doivent compter que sur leur propre volonté et sur l'aide de leurs familles parce que l'Etat marocain est aux abonnés absents. A part quelques timides tracts et spots anti-tabac, parsemés dans le temps et l'espace, le ministère de la santé semble ne pas revendiquer ce combat. Rappelons que 34% d'adultes et 18% de la population marocaine fument ce qui place le Royaume du Maroc parmi les 5 premiers pays "fumeurs" au monde. Les Ministères de Justice et de l'intérieur semblent eux aussi ignorer les lois relatives à l'interdiction du tabac dans les lieux publics et tardent à appliquer la loi n°15-91 relative à l'interdiction de la consommation du tabac et de la publicité de ce produit dans les lieux publics ainsi que sa vente aux mineurs. Et pourtant il est tellement facile d'être imaginatif et efficace dans les campagnes de sensibilisation, comme le montrent si bien ces affiches qui nous viennent du Koweït.