Nous vivons une époque formidable dans laquelle les hérésies de la veille deviennent les évidences du jour.
Ne parlons pas de la nationalisation de banques, horreur économique que vient d’opérer la nouvelle Union Soviétique Américaine. Il est vrai que dans ce cas, c’est pour mieux vider les poches des contribuables au bénéfice des escrocs aux créances pourries. Au passage, j’ai apprécié le discours de GW Bush débarquant et niant toute responsabilité dans le krach qu’il a totalement laissé se produire, en arrivant même à faire porter la totalité du chapeau aux capitaux “étrangers”.
Parlons simplement des “parachutes dorés”. Je me souviens qu’à l’évocation de leur limitation à ce qu’une décence élémentaire nécessiterait, d’autant plus si les dirigeants de ces entreprises avaient auparavant fait perdre de l’argent à leur boîte, ou procédé à des licenciements massifs, soulevait soit des hurlements des libéraux de la droite française et du Medef, soit, au mieux, des sourires condescendants accompagnés d’un “Je comprend votre souci de justice mon bon monsieur, mais ces choses là sont si compliquées, avec tant de risques d’effets pervers que c’est tout bonnement impossible. Réfléchissez un peu, la morale et l’économie ne sont pas compatibles et ne faites pas de procès d’intention au marché”.
Et puis, on a appris il y a quelques jours que les Pays-Bas venaient de voter un dispositif en ce sens, surimposant les montants jugés excessifs, laissant cependant à ces messieurs des revenus très confortables.
Et puis, subitement, jeudi matin, Le Monde nous apprenait, coup sur coup, (1) que “Le Medef va recommander la suppression des parachutes dorés” (sans doute par peur que ce qui se passe en Inde débarque en France) et (2) qu’aux USA, même le très bushien Secrétaire d’état au Trésor (qui avait lui-même touché un bonus de 38 millions $ en 2005 lorsqu’il dirigeait feu la banque d’affaires Goldman Sachs) a accepté qu’en échange du “Plan de sauvetage” des banquiers et organismes de crédits pourris, “les rénumérations des dirigeants de Wall Street” puissent être encadrées. Dès lors, ses guides ayant parlé, N. Sarkozy ne pouvait pas faire moins….
Entendons-nous bien les “parachutes dorés” ne sont qu’un minuscule épiphénomène de la dérégulation du capitalisme financier et des escroqueries de la spéculation. Leur limitation serait loin de suffire à résorber une crise, un krach qui s’annonce épouvantable et durable, bien davantage que nos gouvernants veulent le dire. Mais il est néanmoins dommage que cette revendication, d’une justice et d’un bon sens élémentaires, n’ait pas été une des revendications fortes du PS français qui, sur ce point comme tant d’autre, aura baissé pavillon face à la pression orchestrée par la droite française. Mais peut-on reprocher à des barons et éléphants obnubilés par le pouvoir de négliger ces détails ? Ils laissent dès lors N. Sarkozy arriver tel Zorro.
A côté d’un autre militantisme de terrain, c’est d’une vraie guerre culturelle que le PS a besoin d’engager.
Autres sujets: Le Grenelle de l’Environnement prévoyait la possibilité, pour les villes qui le souhaitaient, d’instaurer des péages urbains (dont j’avais parlé il y a quelques jours là). Le gouvernement vient de décider (Le Monde) d’y renoncer alors que, selon les études, ils sont globalement “efficaces” et “plutôt bien acceptés”.
- A lire “Le hold-up du siècle”- Le Monde.
- Ce qu’il faut savoir sur le plan de 700 milliards $. Il prévoit que “…le secrétaire d’Etat (quel qu’il soit) serait doté de pouvoirs tout à fait extraordinaires : possibilité d’embaucher qui il veut, notamment ses amis de Goldman Sachs, de passer des contrats avec des entreprises privées hors du code des marchés publics, le tout sans contrôle, puisque le texte précise que son action ne serait susceptible ni d’une commission d’enquête, ni d’une cour de justice”. (Marianne). Autrement dit, comptez sur moi pour qu’avec cette manne les copains appauvris par leurs spéculations hasardeuses soient servis largement (sur l’argent du contribuable).
- 2 poids, 2 mesures? “… la villa de Christian Clavier, désormais gardée en permanence par quinze gendarmes”. Le Monde. Pendant ce temps l’insécurité peut flamber dans le XIX ème parisien.