Privileged c'est ce genre de séries qui ne payent pas de mine. Qui ne bénéficie pas d'une promotion très remarquée. Qui n'ont pas de Nom(s) dans leur casting. Qui ont un titre peu évocateur. Que l'on regarde un jour comme ça pour voir ce que c'est et dont on se dit que l'on risque de ne pas y passer plus de 20mn (dernier exemple récent: Do Not Disturb). Bref, le genre de séries qui reste modeste, dont on attend rien d'extraordinaire.
Quel plaisir alors d'être contredit! De quoi s'agit-il? Nous sommes sur la CW. La CW, chaine hertzienne américaine, cette année aime beaucoup les banlieues riches et leurs habitants. Quoi de plus naturel après Gossip Girl, après quatre-vingt-dix mille deux cent dix, qu'une troisième série sur ce thème. Privileged prend donc place au beau milieu de Palm Beach, un des quartiers de Los Angeles où le cumul des salaires de ses habitants le rend plus riche que les trois quarts des pays du monde. Où les malheurs de ces derniers se résument à choisir la couleur de la Ferrari. Où les jardins sont mieux payés que le jardinier qui les soigne. Vous allez me dire, bonjour l'intérêt! En plus de cela, à la vue des productions concurrentes précédemment citées, on entrevoit cette série finalement comme un ersatz bas de gamme des autres (ce n'est pas un pléonasme).
Que nenni. Nous faisons alors connaissance avec Megan. Une jeune fille mignonne, un peu tarée, maladroite qui peine tant bien que mal à trouver un boulot à sa pointure pour vivre. C'est précisément en pleine déconfiture à son travail, où elle se fait virer, que Morgan intègre alors le carré ultra sélect des habitants de Palm Beach. Elle est désignée pour prendre en charge l'éducation de deux sœurs dont l'égo est ensevelit sous les dollars et leur mère soucieuse de leur avenir scolaire. Malgré son peu de savoir en la matière, elle accepte l'offre et devient donc tutrice.
Avec elle nous entrons alors dans la vie de milliardaire.
J'aime beaucoup Megan. J'aime son imperfection. J'aime qu'elle est parfois du mal à s'exprimer, du mal à se faire comprendre, du mal parfois à dire les choses sans qu'il y ait un double tranchant qui vienne fausser l'interprétation de son interlocuteur. J'aime quel soit par moment dans le délire, quand elle ne se prend au sérieux et rentre dans un bad trip. J'aime son histoire que l'on ne connait pas encore très bien mais qui ne semble pas être un long fleuve tranquille. Tout ces aspects font de Megan une héroïne des plus attachantes et identifiables qui soit. Et ça marche très bien.
Megan ne prétend pas connaitre mieux la vie que celles et ceux qui l'emploient. Elle est même la première à douter de ses capacités. Par contre, elle a de l'expérience, elle a même, malgré son passé tumultueux, réussit à décrocher un diplôme à Yale, l'une des plus prestigieuses école supérieur des États Unis. Elle se sert de cette base pour aider et faire son job.
J'aime beaucoup cet aspect de la série. Elle ne dit pas que les pauvres connaissent forcément mieux la vie que les riches. Ce sont les spécificités de ces deux mondes qui en font ses caractéristiques. Un riche n' a pas la même vie qu'une personne qui ne l'est pas, parce que les problèmes auxquels il est confronté ne sont pas les mêmes et où l'argent vient systématiquement s'immiscer soit pour les régler, par facilité, soit pour obtenir un effet pervers qui déstabilisera la source du problème. On ne dit pas que les riches ne connaissent pas la vie. On ne dit pas qu'ils ne savent pas vivre. Simplement la façon dont ils l'ont appris leur suffit dans l'environnement qu'ils côtoient quotidiennement, c'est à dire de riches. Comme il s'ennuie, il la transforme alors en jeu géant pour se sortir de la monotonie. On prend des risques, parfois transgresse la loi. On abuse des choses parce qu'on a perdu la valeur de ces choses. Pour autant, ils ont comme tout le monde des problèmes de cœur, des problèmes parfois beaucoup plus profonds, comme les deux sœurs dont s'occupe Megan qui sont orphelines. A vrai dire Megan est avant tout là pour leur redonner du sens à leur vie parce qu'en se protégeant des aléas en se repliant sur leur argent, les deux sœurs en ont perdu le goût. Il y a bel et bien un décalage entre Megan et ses hôtes, tout leur est donné alors que Megan, elle, doit se battre pour vivre. Et c'est en cela que Megan est en fait bien à sa place en tant que tutrice et devient très intéressante à suivre.
Autre point que je trouve excellent, c'est les relations de Megan. Ce que j'aime c'est que tout le monde a ses préjugés, tout le monde parle de vous, derrière vous. La plupart du temps, c'est faux, totalement faux. Les gens s'imaginent qu'ils vous connaissent, alors qu'ils vous ont jamais vu, juste en écoutant une personne leur raconter ce qu'elle a cru comprendre de vous. Au final, l'image qui ressort est totalement erronée et le but de la communication avec une personne échoue totalement, malgré vous. Dans Privileged, on voit cela à travers Megan. Elle essaye de faire le bien tant qu'elle peut, mais la plupart du temps elle échoue, justement à cause de ce problème de communication et bien souvent la sensibilité et la culture de ses interlocuteurs. Au passage, ceci rend le personnage d'autant plus crédible et identifiable.
Les acteurs sont très bons. Joanna Garcia est très bien dans la peau de Megan, son physique colle parfaitement au personnage. Anne Archer donne un côté pathétique à l'employeuse de Megan, avec sa façon de parler bourgeoise. Les actrices qui jouent les sœurs dont s'occupe Megan, donnent pas mal de cachet à leur personnage et ne surjouent pas les gosses pourris.
Ainsi, pour toutes ces raisons, Privileged est une excellente découverte en cette rentrée, à laquelle je ne peux que vous conseillez d'y passer.