Lorsque j'ai vu cette toile de Cézanne au Musée d'Orsay "La Femme à la Cafetière, vers 1895", j'ai eu l'impression de me retrouver devant un portrait peint par Edward Hopper.
Chez Cézanne, "Les éléments principaux de la composition : le corps de la femme - mi-assise, mi-debout -, la tasse et la cafetière sont représentés de façon très simplifiée selon une organisation stricte de lignes horizontales et verticales" (pour certains, ce tableau annonce le cubisme). Chez Hopper, il en est de même : par exemple, dans "Chambre d'Hotel, 1931" le corps de la femme assise sur le lit étroit, le fauteuil vert, les bagages, les chaussures noires, les rideaux, le mur, tout le décor de cette chambre concourt à la géométrisation de l'espace.
D'une certaine façon, on en oublierait presque le corps de ces deux femmes. La nature humaine ici est traitée comme un élément de l'espace, comme une nature morte.
Dans ces deux tableaux, les visages sont impavides, ils ne marquent aucune expression, aucun sourire.
Seules les mains de ces femmes trahissent peut être une certaine émotion : chez Cézanne, les mains de la femme rappellent le travail, le dur labeur quotidien ; chez Hopper, elles tiennent un livre (cependant, si l'on observe plus en détail, on a l'impression que la femme ne lit pas vraiment le livre qui est en équilibre sur ses genoux, sur le point de tomber par terre).
Ces deux femmes sont dans le silence, l'attente ... Pourtant, chez Cézanne, on sent une certaine force intérieure, "une présence à jamais irréductible, invulnérable", alors que chez Hopper on sent une fragilité, une solitude que rien ne peut distraire.