Zinemaldi - les films

Publié le 24 septembre 2008 par Elgade
Frozen River

Se compte parmi les 19 films de la riche sélection officielle du Zinemaldi. Premier long métrage de Courtney Hunt qui aura remporté le prix du Grand Jury au festival de Sundance 2008. A priori, que du bon présage.
Eddy est dans une dèche puante et malheureuse, avec 2 enfants, sans un rond, un mari joueur et absent et une dose de rêves plein la tête. Notamment de s’offrir une maison préfabriquée qui sent bon la mélanine. Se retrouve par le fruit du hasard avec une Mohawk dans une opération de transport d’immigrants clandestins au fond du coffre, rémunérée à hauteur de 1200 $. Juste de quoi réitérer la formule n fois pour arriver à concrétiser une paire de ses rêves.
Ce premier long métrage est plutôt ambitieux puisqu’arrive à toucher plusieurs thématiques à la fois. Notamment le cas du système d’éducation nécrosé par un capitalisme immoral sous-jacent (oui, oui, en faisant un effort, on peut voir du Ken Loach derrière ce tableau) ; le melting pot local mais pas intégré (oui les Mohawk sont pas loin, mais pas ici non plus – chacun son territoire) ; les difficultés d’insertion des étrangers ; le pouvoir des femmes incarné par Melissa Leo qui est plus que convaincante dans son rôle de super maman plein de sang froid ; etc.
La réalisation reste modeste mais bonne et de très bonnes idées permettent de donner un gentil rythme légèrement inquiétant tant on se prend de sympathie pour cette Eddy. Je pense notamment à la scène des Pakistanais qui est très bien ficelée et nous amène là on nous ne l’aurions pas pensé. Courtney Hunt aura choisi de clôturer non pas sur un drame (ça aurait été facile) mais sur une réalité légèrement biaisée (ouais, le coup du « je me dévoue » on n’y croit peu). Réalité qui rentre cependant dans un schéma optimiste et donc, probant. On avale le tout suave, tout qui mérite d’être bu car son souvenir en bouche n’est pas désagréable.
Sans prétention, mais pas mauvais.
Thomas


Réalisé par Miika Soini, Thomas est un film touchant et très intimiste sur la vie seule, lorsqu’on attend celle qui vous emporte pour toujours. Entre dans la composition du Zabaltegi – catégorie nouveau réalisateur. Miika Soini, finlandais, aura eu d’ailleurs l’opportunité chanceuse de s’entretenir avec moi (à moins que ça soit le contraire ? – lors de la grande assemblée de questions post projection très intéressante) et c’est quelqu’un de très naturellement chaleureux avec un degré d’humour et une modestie très fins.. L’acteur Lasse Pöysti est a priori nationalement reconnu en Finlande et affiche une existence fièrement assumée de 83 ans ! Le même âge que Thomas qu’il interprète. Film lent, profond, sans superflu. Incompris, Thomas nous offrira un jeu très réussi à travers un faciès doux et malheureux. Pas forcément optimiste sur le fond, la forme reste minimaliste et teintée d’un humour léger et piquant. A l’image de sa partie d’échec contre lui-même : en suspens intriguant éternel.
La vida loca

Christian Poveda nous offre ici un documentaire cru au Salvadore sur la guerre des gangs qui oppose la Mara 18 et la Mara Salvatrucha. A réussi (nous avoue-t-il dans la table ronde de l’after) à obtenir l’autorisation de filmer la vie du gang de la Mara 18 du moment qu’il ne pollue pas cet affrontement de quelque façon. Le montage est un condensé de 16 mois de tournage. On ne peut pas y rester insensible, certes. On essaie de s’accrocher à quelques personnages, à quelques repères mais on est vite noyé dans un flow de violence : tout le monde est tué, ou emprisonné, ou tailladé, ou disparu, ou autre. La seule chose qu’on retient, c’est la cérémonie morbide d’enterrement qui se répète inlassablement avec toutes les mêmes têtes – tatouées du nombre 18 en pleine face. L’auteur tente d’effleurer quelques sujets sensibles comme l’insertion de ces jeunes en sortie de prison, les rôles des parents, les chiens de flics etc. Mais superficiellement malheureusement. La nature des images récoltées ne devait pas permettre une grande exploitation autre que celle liée à la violence… Mais le montage ne permet pas au spectateur d’apprécier tant il reste sonné. Ca frise même parfois le voyeurisme (on pense notamment à la scène de strip de la fat-bad girl toute suintante). Un autre monde oui, de chez Big Brothers.
En aparté, on appréciera la participation bien montée de Rocca pour la BO (cité dans le générique en tant que Sébastien Rocca) qui a bien sa place ici (l’était passé où la Cliqua ?!)
Bloodbrothers

Tourné par un Belge (Arno Dierickx) en Hollande, inspiré d’une histoire vraie, avec de jeunes acteurs du petit écran local, ce petit film est plutôt une bonne surprise. Son producteur aura très justement annoncé à la presse basque que ce long métrage est un film d’auteur sur fond commercial. Le synopsis est simple et risqué : 2 frères châtelains, 1 premier de classe, 1 casse cou = 4 potes. Le casse neck doit devoir se réfugier dans le grenier des mondains pour fuir la violence de son père (après avoir chourré une mob) et les 3 autres acceptent puis finissent par vouloir s’en débarrasser. Faits réels et ambiance particulière. Tout se joue sur une suggestion jamais clairement exprimée mais toujours suspectée. On refuse de penser (jusqu’à ce qu’on juge l’acte) ce qui est adroitement et objectivement mis en relief : une violence innocente et non raisonnée de 3 enfants très influençables par l’effet de situation. Raccourcis moraux et psychologiques omniprésents et transposables à quelconque individu dénoué de tout référentiel de valeurs (et pas seulement chez l'enfant). Le spectateur prendra même part à ce phénomène puisque le film se clôt en nous laissant un goût de sympathie et de pitié misérable pour le jeune Simon… Je ne vous en dis pas plus. A noter que les 2 frères sont extrêmement connus en Hollande et représentent une des plus grandes richesses nationales. Et que le réalisateur est peut être celui qui nous aura le plus marqué - excellent contact avec son assemblée.
La Belle Personne

Seul film français que j’ai pu voir (de Christophe Honoré) – en sélection officielle. Aucune chance de remporter un prix. Transposition du roman de Madame de Lafayette La Princesse de Clèves, ce film aurait dû – comme ça l’était annoncé à l’origine – rester à l’échelle du téléfilm. Léa Seydoux, dans le rôle de la belle personne, est jolie mais pédante, sérieuse et ennuyante. Louis Garrel, dans le rôle du professeur amoureux, est pathétique, loin d'être crédible et irritant. Jamais je n’y ai cru et au moment de la scène de musicals d’avant le drame suicidaire, je m’en suis désolé mais pensais au moins en avoir fini. Mais non, pourquoi ne pas faire durer le supplice ? Au mieux sera accueilli par les ados en perte de repères, au pire sera vomi par les critiques.
3 dias


Dernier long métrage de ma petite session. Quand je vais vous dire que c’est la fin du monde dans 72h, qu’une gigantesque comète va venir s’écraser sur la planète, que Ale va devoir défendre 3 petits avec acharnement face à un psychopathe en cavale, vous allez me dire : putain un Deep Impact croisé avec un No Country for Old Men ? Ouais, un grand doute m’a envahi aussi quand j’ai lu le petit résumé de mon joli book-program coloré à 1€… Mais c’est certainement la meilleure surprise de mon 53ème.

Une réalisation western moderne, aux couleurs sulfurées, à l’atmosphère lourde et moite et aux faces cultes comme celle de Victo Clavijo, bel ours en puissance qui interprète Tio Ale. La courte BA vous permettra de sentir cette ambiance particulière. A remporté le prix du meilleur film au Panorama de Berlin. Pas exempt de petits défauts (notamment la scène de fight finale), le film nous laissera sur un optimisme très joyeux malgré le fatalisme transcendant qui habite ces 3 innocentes bouilles. On en ressort vainqueur même si le sens profond de l’objet du film est absent et indéfini. L’aberrance inévitable inhibée par un seul homme volontaire et Saint. Une apogée allégorique du Christ finalement. Fou - et donc - intelligent.
Rappelez vous le réalisateur : Gutiérrez !

C.