A quelques jours du 1er café économique que j'animerai, avec pour thème le pouvoir d'achat, il m'a semblé indispensable de rédiger un petit billet sur cette enquête du magazine 60 millions de consommateurs.
En effet, dans le nouveau numéro à paraître demain, une enquête pour le moins intéressante nous est livrée : les astuces utilisées par certains fabricants de produits alimentaires pour cacher au client la hausse des prix de certains articles ! Rien que ça...
Toute l'astuce réside en fait dans une judicieuse relation entre prix et quantité, le tout mâtiné d'un peu de marketing. Comme vous le savez, en économie les ajustements sont censés se faire par les prix dans le cadre d'un marché en concurrence parfaite. On imagine alors aisément qu'une hausse des matières premières doit automatiquement se répercuter sur le prix final du produit. Avec toutes les conséquences négatives que cela peut avoir sur le pouvoir d'achat des consommateurs, et donc in fine, sur le carnet de commandes des entreprises (obligées de s'adapter à la baisse de la consommation par une moindre production...). Mais c'est sans compter sur le cerveau retors des spécialistes du marketing, qui ont trouvé la parade à une hausse des prix : diminuer la quantité offerte, mais suffisamment subtilement pour que rien n'y paraisse...
Prenons quelques exemples pour illustrer mon propos : le paquet de biscuits Prince de LU ne pèse plus que 300 grammes, contre 330 avant l'été ; le pot de fromage blanc Jockey de Danone, qui est passé de 1 kg à 850 g ; les petits pots délestés de 10 g, tout comme les Danette, lorsqu'elles sont vendues en paquet de seize. Ainsi, en modifiant astucieusement le grammage du produit, on peut augmenter le prix au kilogramme, sans que cela se voie sur l'étiquette : echec et mat !
Or, pour embrouiller encore un peu plus les consommateurs, l'enquête nous précise que les industriels jouent aussi sur l'emballage. En effet, celui-ci constitue le premier contact du consommateur avec le produit, c'est donc lui qui doit provoquer la décision d'achat - fût-elle irrationnelle -. On appelle cela la stratégie du packaging dans le jargon du marketing... Amora a ainsi changé la bouteille d'une vinaigrette, ainsi que sa contenance (50 ml de moins). Le magazine cite aussi le sucre en poudre désormais vendu dans des sachets en plastique de 750 g.
Et si après tout cela, vous finissiez par comprendre que l'on se moque de vous ? Heureusement, il reste en réserve une dernière astuce classique pour éviter les comparaisons de prix : la modification de la recette. Et oui, comment comparer ce qui ne sera plus comparable dans les rayons des supermarchés ? Les ingrédients onéreux sont par conséquents remplacés par d'autres moins chers. Le magazine nous précise que cette pratique semble être "surtout l'apanage des premiers prix ou du hard discount".
Comme je l'ai dit plus haut, ces astuces sont connues depuis longtemps, et tout étudiant en marketing qui se respecte se doit de connaître par coeur le protocole d'application. Le véritable mérite de cette enquête est donc plutôt de mettre le doigt sur une communication qui n'est pas exempte de duplicité. Dans un précédent billet, j'avais expliqué que les industriels et la grande distribution se renvoyaient la responsabilité de la hausse des prix. On voit par conséquent que les choses ne sont pas si simples, et que chacun détient une part de responsabilité, souvent non assumée, il faut bien le dire...