« Vous vous rappelez Moscovici, qui ne parlait que de rénover le parti et n’aspirait qu’à être premier secrétaire ? – Oui… - Eh bien ! Il s’est fait pion. – Sacré lâche ! ». Tel Jacques Vingtras à la fin du roman de Vallès, Pierre Moscovici a-t-il trahi ses idéaux (et accessoirement les militants qui continuaient à le soutenir) en jugeant que, finalement, c’était motion impossible ?
La politique est un art subtil. En ralliant Bertrand Delanoë, sans doute Mosco pense-t-il parvenir à ses fins comme joker dans ce complexe jeu de rôles qu’est la conquête du parti. Joker dans le jeu d’un Delanoë qui ne pourra, comme d’ailleurs aucun(e) autre de ses concurrent(e)s , réunir de majorité sur sa seule motion, c’est pas bête comme option stratégique pour devenir un excellent candidat de compromis le moment venu. Dépouillé de la plupart de ses soutiens, Mosco se serait marginalisé en s’obstinant à présenter une motion qui eût alors fait un bide. Mais ayant placé pas mal de ses ex-sympathisants du courant strauss-kahnien chez Royal et chez Aubry, il peut spéculer sur des retours vers lui, avec son profil de premier secrétaire « neutre » car délibérément non-présidentiable.
Ce ralliement lui permet donc de rester dans le jeu, comme un pion qui voudrait se faire oublier dans un coin de l’échiquier à l’ombre des pièces lourdes. Or, tout pion aspire à promotion. Et depuis Philidor, on sait que « les pions sont l’âme des échecs ». J’ignore si Mosco joue aux échecs mais je ne crois pas une seconde à l’angélisme de ce qu’il écrivait hier à ses partisans : “Bertrand Delanoë assure que sa candidature comme premier secrétaire n’a pas de signification pour une candidature à la présidentielle de 2012.” Tu parles… De même, la stratégie de Royal vise à ne pas s’exposer en mettant « au frigo » sa candidature (de Première secrétaire…). Elle n’est pas intervenue hier à la Mutualité, faisant monter ses affidés à la tribune, et il y a gros à parier qu’à Reims elle restera aussi silencieuse qu’elle le fut au congrès du Mans. Son objectif reste le même et elle devrait donc jouer le même personnage, avec une posture au-dessus de la mêlée jusqu’à la désignation du candidat en 2011.
Mais l’on mesure mal encore l’impact de l’aile gauche, unie derrière Benoît Hamon, et de la motion nordiste et fabiusienne de Martine Aubry. Il n’est pas acquis qu’ils terminent derrière les deux grosses écuries qui visent chacune la pole-position… Quant au Pôle écologiste et à Utopia, tous deux en lice pour des idées, ils sont voués à se disputer la cuiller de bois…