Écouter, c'est faire attention à la réalité de l'autre
Pour cela, il ne suffit pas, comme on le pense généralement, d'entendre les paroles prononcées par l'autre et d'en saisir le sens. Il faut aussi tenir compte des différentes significations d'un même mot, du rapport aux mots détourné par le poids culturel, des charges affectives incontrôlables, etc... Sans oublier, en même temps, de préparer une réponse éventuelle !
Entre ce que je pense,ce que je veux dire, ce que je crois dire, ce que je dis, ce que vous voulez entendre, ce que vous entendez, ce que vous croyez comprendre, ce que vous voulez comprendre et ce que vous comprenez, il y a au moins 9 possibilités de ne pas s'entendre
Certains sont d'ailleurs tellement préoccupés par leur réponse qu'ils ne savent même plus ce qu'on leur a dit.
Pour écouter l'autre, il faut donc s'écouter soi-même
À moins de parler pour soi, comme cette stagiaire qui constate :
« Le plus souvent, je monologue et j'en fais surtout un exutoire ; j'ai tendance alors à conseiller ou à imposer des solutions toutes faites
Faire attention à la réalité de l'autre, à l'environnement dans lequel je suis et dans lequel il est, c'est prendre en compte tout un ensemble : ses mots, bien sûr, mais aussi son ton, son attitude vis-à-vis de moi, son corps et ses réactions.
C'est, en quelque sorte, être « branché » sur l'extérieur de soi.
Ainsi, si je suis trop préoccupé par ma réponse, si je suis trop envahi par les émotions, si j'ai d'autres soucis en arrière-fond, je vais avoir beaucoup de mal à écouter l'autre, je ne serai pas bien « branché » sur lui.
C'est aussi faire attention à sa propre réalité
Mais il ne suffit pas d'être branché sur l'extérieur de soi, il est nécessaire également d'être à l'écoute de soi-même.
En effet, si l'autre me parle, c'est qu'il a, consciemment ou non, une intention à mon égard : il veut attirer mon attention, avoir mon adhésion, m'émouvoir, me faire une demande, me mettre en colère (pourquoi ?), m'humilier, etc.
Écouter l'autre, c'est entendre aussi cette intention, et je ne peux l'entendre que si je suis attentif à ce que la parole de l'autre provoque en moi, car ce qu'elle provoque c'est sans doute, si je ne me défends pas trop, ce qu'il cherche à provoquer en moi
Écouter, c'est s'écouter!
Écouter l'autre, c'est donc aussi m'écouter.
Repérer ce qui se passe en moi me permet de comprendre ce qu'il me demande
Écouter, exige de vérifier continuellement auprès de l'autre, car il n'y a que lui, en définitive, qui sait à peu près ce qu'il veut me dire.
L’écoute est cruellement absente dans l'Éducation Nationale, comme dans la plupart des entreprises; ce que constate M. Crozier (L'entreprise à l'écoute, Ed. InterEditions)
« Le problème le plus fondamental des entreprises modernes, c'est l'écoute de la réalité... L'écoute profonde du vécu des différents participants de l'entreprise et l'analyse qu'on peut en faire donne un principe de réalité essentiel pour son fonctionnement bien plus pertinent que les audits financiers.>>
Évidemment, je ne serai jamais totalement sûr de bien l'entendre, car ce que je ressens est provoqué par lui mais en même temps très lié à mon histoire.
Il restera toujours un doute.