Parfois, c'est dès le début du travail. Cela peut aussi survenir plus tard – comme dans le cas de Nathalie, qui a attendu notre dernier entretien pour m'avouer qu'au début de notre travail, elle était rien moins que "sceptique", même si elle avait gardé ce sentiment pour elle. Sans expérience du coaching, elle s'attendait à recevoir un cours de management, ou quelque chose d'approchant, malgré ce que je lui en disais. "Vous me posiez des questions, nous parlions de l'entreprise, de mon travail, mais j'étais un peu déçue, je me demandais quand nous entrerions dans le vif du sujet." Chère Nathalie, j'ai tendance à penser, avec immodestie, que nous étions en plein dedans. J'avais bien perçu votre impatience, votre attente de me voir occuper la posture du professeur de management – ce que je fis donc en sorte d'éviter absolument. "Et je vois maintenant qu'à force de réfléchir de cette manière, de m'interroger sur le management, sur ce que je voulais vraiment, de remuer tout cela, de nouvelles choses, des choses évidentes ont surgi et se sont imposées, tout est beaucoup plus clair pour moi maintenant".
Pour réussir ce travail, il faut au coaché aussi s'armer de patience, tenir la rampe et ne pas lâcher l'affaire, quitte à confronter le coach, parler de ses doutes, exprimer ce qui vient. Ce matériel-là est précieux. C'est à la condition de passer cet écueil que l'on navigue dans les meilleures eaux, et qu'un travail parfois difficile, ou même ingrat, produit ses effets dans la durée. Changements d'attitude, ouverture, renforcement de la confiance, modifications des relations au sein d'une équipe, enrichissements mutuels. Tout cela parce qu'une personne s'est autorisée à aller vers l'inédit, à dépasser de veilles croyances limitantes, des peurs, des doutes sur son potentiel ou ses valeurs profondes. Clarifier, clarifier, clarifier encore. Jusqu'à ce qu'émergent les fondamentaux, les points solides sur lesquels il est possible de construire durablement, sans peur, avec naturel.
Pour finir sur une note élégiaque, voici un aphorisme de Tu Long (1542-1605), mandarin retiré de la cour et devenu ermite taoïste, qui a consigné ses réflexions douce-amères dans un joli recueil, Propos détachés du Pavillon du Sal (Séquences, 2001):
Quand l'illusion a crevé comme une bulle, et que le cœur est une perle lumineuse, les trésors du monde sont ceux que l'on recèle en soi.