"Salut ma hargne, bonjour ma colère et mon courroux...coucou."
Ce billet est écrit un tantinet sous le coup de la colère, je vous préviens tout de suite. Certains passages risquent de vous arracher carrément les yeux si vous êtes un peu "rosé". Que les esprits sensibles qui supportent mal mes crises de rage détournent donc pudiquement leur regard.
Mais cela fait plusieurs mois que ça me démangeait d’écrire un truc comme ça.
Et là, en lisant les réactions de joyeux internautes sur différents forums , sur les gars de la Fonderie de l’Authion (aux Ponts-de-Cé) qui menacent de faire exploser leurs stocks dans leur usine, c’est parti tout seul.
Je rappelle rapidement le contexte.
Motif de la grève aux Ponts de Cé?
Une vingtaine de licenciements sur environ 90 salariés.
La raison avancée par le patronat? Peugeot, notamment, vient de résilier son contrat de commande de pièces auto - or, c’était manifestement le plus gros client de cette usine - donc ,logique patronale, il faut maintenir le profit - comment? En licenciant.
Pourtant les salariés eux proposent autre chose. Fin de non recevoir.
Et crac-boum-hue, 20 familles sur le carreau dans une région déjà bien touchée par le chômage et la précarité...
De nombreux Zinternautes s’indignent depuis 48 heures que des salariés puissent en arriver là - c’est à dire, en arriver à vouloir faire exploser leurs stocks. D’autres encore sont révoltés parce qu’il y aurait des riverains autour de l’usine ( faut il être idiot pour coller une école pas loin d’une zone où il y a des industries lourdes, non? AZF n’a pas servi de leçon?) et que cette menace d’explosion les mettrait en danger. Soit. Je note.
C’est aussi souvent l’occasion pour ces gais lurons du clavier, bien planqués derrière leur petit anonymat, de dégobiller tout ce qu’ils savent sur ces enfoirés de "rouges", ces "salauds de grévistes", ces "ordures de syndicalistes ", ces "terroristes" ai-je même lu... Je commencerai par leur dire, à ces riverains ou soi disant riverains, ou soi disant Internautes anonymes :
si vous avez peur , vu que la "menace" ne date pas de ce matin, ce que je peux parfaitement comprendre, commencez par aller chercher vos enfants de l’école, au lieu de faire mumuse derrière un écran !
Et puis, au lieu de pourrir les grévistes, décrochez donc votre téléphone pour demander au Préfet d’activer la mise en place d’une évacuation du voisinage et d’un périmètre de sécurité. Si elles ne sont pas trop occupées à complaire au patronat et aux édiles locaux, les forces de l’ordre devraient pouvoir faire leur travail premier, celui pourquoi on les paie, c’est à dire, non pas "casser du gréviste", par exemple, mais assurer votre sécurité immédiate, non?
Faut commencer par le commencement au lieu de geindre, et prendre, à un moment, ses responsabilités en "Homme" (en être humain raisonnable et adulte, donc en femme aussi).
Et puis surtout, quand vous aurez pris vos mômes, faites un détour et allez discuter avec les grévistes !
Discuter FRATERNELLEMENT, les oreilles et le cœur OUVERTS,car ce sont VOS semblables.
Soyez Solidaires au lieu d’être Sécuritaires ! Les flics que certains d’entre vous rêvent de leur envoyer seront aussi ceux qui iront vous déloger de VOTRE GREVE quand VOTRE patron aura fait avec VOUS la même chose que ce qu’il veut faire avec les salariés de cette fonderie.
Vous pensez VRAIMENT qu’il y a des salariés qui envisagent ce type de solution par pur plaisir? De gaité de coeur? Par facilité?
Vous ne croyez PAS que LEUR SOLITUDE, la SOLITUDE EXTRÊME des SALARIES EN LUTTE, C’est aussi de NOTRE RESPONSABILITÉ, c’est notre ABSENCE DE SOLIDARITÉ qui les pousse aussi à ce désespoir?
Que ferez vous justement , pour vos enfants , quand vous aurez, vous aussi perdu votre boulot?
Vous et / ou votre compagnon/compagne?
Que vous serez à la rue, dans la précarité?Parce que votre chômage sera "peanuts" ( MERCI SARKOZY FILLON BERTRAND), que vous aurez 45 ans et que vous ne trouverez plus de travail mais à la rigueur un "job"?
Vous ferez peut être comme ces pères, récemment "mis en lumière", qu’ils soient "célibataires" qui ont obtenu une "garde partagée" , ou toujours mariés, mais qui, soit assaillis par les soucis du quotidien que nous connaissons toutes et tous aujourd’hui, soit laissés à eux même par une société de plus en plus égoïste, sans avoir les moyens d’assumer leurs droits, devront aller bosser, parfois pour une misère, dans une situation de détresse psychologique parfois grave, sans rien pour faire garder leurs mômes , contraints de les laisser dans leurs bagnoles pendant 10 heures, ou "tout simplement" tellement préoccupés qu’ils oublient leurs gosses sur le siège arrière?
Pour retrouver quoi à la sortie d’un travail anxiogène, ingrat, mal payé, avec un patron de merde et un salaire de merde?
Un petit cadavre? ! Et votre vie, et celle de la mère, foutues à jamais?
Oui je suis dure, je le sais, mais j’en ai ras le bol de cet égoïsme ambiant qui nous tire vers le fond de jour en jour.
On dirait le tonneau des Danaïdes, c’est sans fin !
Quand est-ce que le niveau maximum de la haine et de l’égoïsme sociaux est atteint? Quand tout brûle, et qu’est décrétée la guerre du chacun contre tous?
Il ne s’agit plus de "résoudre les problèmes" mais de dire STOP. De RÉAGIR. Parfois de réagir avec ses tripes même.
Je ne prône pas "la violence pour la violence". Mais je peux comprendre que certains salariés, qui voient arriver le gouffre à vitesse "grand V", soient au bord du désespoir et envisagent ce type d’extrême : faire péter le stock de leur usine. En tout cas, ça fait longtemps que je n’ai plus d"avis tranché sur la question.
Mettez vous à leur place. Allez leur parler, à ces grévistes à côté de chez vous, avec ou sans papiers.
Arrêtez de croire à la chance. Arrêtez de croire que vous êtes "protégés", que non "à vous", ça "ne vous arrivera pas", bordel de merde ! Plus personne en France n’est à l’abri, du chômage, de la précarité, des salaires de merde et j’en passe.
Dans 5 ans à ce rythme, la France sera un mélange des USA et de la Roumanie. Le pied non?
Imaginez vous 5 minutes perdre RÉELLEMENT votre emploi, ne pas en retrouver ou en retrouver un au rabais. IMAGINEZ s’il vous plait.
Alors, il y a ceux qui disent benoîtement :" Il y a plein de grèves ou de conflits sociaux qui s’arrangent autrement."
Manifestement nous avons là une personne bien informée sous la main !!! DES NOMS ,DES NOMS ,DES NOMS, DES NOMS !
Nous qui ne sommes que des bouseux de militants ou syndicalistes, nous ne sommes pas ENCORE au courant que "tout peut s’arranger" sans que nous y perdions nos salaires (Nb : la grève, c’est pas payé) notre santé physique et morale, etc.
PUTAIN mais qu’est ce qu’on est cons, nous les grévistes, les syndicalistes !!!! Ça doit être pour ça qu’on n’a pas voté pour le minus, NOUS. En attendant on est peut être si cons, mais au moins nous on est pas en train de se faire faire un trou de balle gros comme un garage à vélo !! (Ça va pour s’asseoir, les baisés, ils sont bien? !)
D’autres "Monsieur -j’ai-la-solution" ( des patrons déguisés en gentils internautes anonymes??) nous disent :
"C’est simple, il n’y aura pas de négo’ tant qu’il y aura de la violence."
Magnifique !
Et la VIOLENCE PATRONALE, LA VIOLENCE CAPITALISTE, on en fait quoi? On s’asseoit dessus? "Responsables mais pas coupables," tout ça pour ne pas perdre quelques dizaines de milliers d’euros sur les plusieurs milliers encaissés par an dans la poche des actionnaires? QUI commence dans ce gros barnum pas drôle qu’est en train de devenir la France, l’Europe, le monde?
Personnellement un patron qui veut me virer ne me donne qu’une envie : lui faire les oreilles et la queue.
"Ils peuvent très bien assiéger la mairie ou la préfecture", poursuit le même esprit illuminé ( manifestement grave pressé de renvoyer la patate chaude à quelqu’un)... ben oui... j’en rigole d’avance...Et pourquoi pas une technoparade à Disneyland avec les Bisounours, des plumes et des grosses pancartes qui diraient " On veut des bisous, et des sous pas des cailloux et des poux"?????
Un autre (parce que les lieux communs et la pensée toute faite, c’est comme les perles , ça s’enfile) "mais c’est dommage de se mettre encore plus dans la merde : ils vont perdre leur boulot et de plus avoir des problèmes avec la justice."
Non sans blague???
Justement pardi, essayez de voir les choses AUTREMENT ( et surtout arrêtez de gazer comme ça avec un air supérieur, genre "c’est pas moi qui ferais une chose pareille") ! S’ils en sont là, ces salariés, "prêts", comme on dit à "avoir des problèmes avec la justice", vous ne croyez pas que ce n’est PAS PAR HASARD? Vous ne croyez pas qu’ils ne le savent pas, tout ça? Qu’ils n’y pensent pas?
En général, ce type de conversation se termine par un bon vieil argument "ad hominem", style "Imagine çà explose et toi tu passes à côté avec tes gosses..."
Je ne souhaite à personne ( même pas aux bas du front umpiste) que ça lui arrive, et rien qu’imaginer que ça pourrait effectivement arriver à mes enfants ( comme un attentat dans le métro d’ailleurs), ça me fait frémir d’horreur, mais je crois que je serai surtout doublement déchirée. Doublement effondrée.
Déchirée par les blessures, les séquelles, voire, la mort de mes gosses, et DÉCHIRÉE QUE LA BARBARIE ET LA SAUVAGERIE DU CAPITALISME NOUS EN AMÈNE TOUS ET TOUTES A DE TELLES EXTRÉMITÉS, A TANT DE DÉGÂTS, DE DRAMES !
Parce que ce ne serait pas "seulement" la perte de mon enfant, ce serait une autre famille qui plonge dans la douleur ; un parent mis au ban de la société, envoyé en prison, les problèmes d’argent etc. C’est un tout. C’est cela la barbarie.
Je ne peux plus supporter ce climat dans lequel nous vivons , cette société que NOUS construisons. Sauf que mon "diagnostic" n’est pas le même que le votre, vous , mes semblables, qui croyez très fin de voter SARKO FILLON et cie, qui croyez tout à fait utile de taper sur les grévistes, les communistes etc - du coup, mon "traitement" non plus n’est pas le même !
Chaque jour il y a en moi la femme, l’homme, l’enfant, le cubain, le SDF, l’ouvrier, le jaune,le colombien,le noir,le malade... toutes ces parties de moi exploitées, agressées chaque jour, comme chantait magnifiquement Beaucarne, qui souffrent et s’en prennent plein la gueule. Je suis, nous sommes, des morceaux épars d’un grand tout. Notre salut est individuel ET, (non pas "ou"), collectif. Si l’enfant cubain souffre, je souffre. Si l’ouvrier des Ponts de Cé souffre, je souffre. J’ai mal à mon corps social.
Ensuite, la souffrance produit des effets différents. Chez les uns, chez les autres ; Moi, ça me fout la rage. Ça me révolte tant d’injustice flagrante.
Là où nous en sommes, c’est pas de la faute des salariés,des précaires, des sans papiers, qui sont contraints, oui contraints, à de telles extrémités, c’est la faute du capitalisme. C’est dit simplement, mais en gros , c’est comme ça.
Et à celles et ceux qui parlent sans cesse de leurs enfants dans ce type de débat, je demande : sérieusement, c’est ça le monde que vous voulez leur laisser, vous?
Un monde de haine, de compétition, d’arrogance et de mépris d’une poignée de gens envers tout le reste du monde? Un monde où ils seront exploités, où ils ne pourront pas décider de leur avenir librement? Un monde où pour survivre, ils devront être les plus forts sinon, gare à la "loi de la jungle"? Un monde où vos filles seront doublement exploitées, parce que FEMMES et parce que PROLÉTAIRES?
Un MONDE Où MÊME LE DÉSIR DE FAIRE UN ENFANT AVEC LA PERSONNE QUE VOUS AIMEZ EST CONDITIONNÉ PAR DES CONSIDÉRATIONS MATÉRIELLES, SOCIALES, CONJONCTURELLES????
Ça vous fait pas suer d’avoir les ovaires et les testicules hypothéquées par le grand patronat, vous???
Alors, vous savez quoi?
Les salariés qui nous crachent dessus quand on fait des actions syndicales ou qui, tout simplement restent "planqués" dans leur petite chacunière, ils se prennent souvent pour des cadors. Mais ce qu’ils n’ont pas compris, c’est qu’ILS SONT les salariés de la fonderie Authion, les salariés de chez Goodyear à Amiens, les salariés de chez Doux, ceux de chez Ford Blanquefort, ceux de Whirlpool, ils sont comme nous à moyen terme.
Alors il faut leur dire : quand la France et l’Europe seront paupérisées, chomisées comme il faut, pétrifiées dans la misère, personne ne pourra plus acheter ce que vous vendez dans vos magasins. Ce que vous construisez dans vos usines. Ce que vous concevez dans vos bureaux. Et vous aussi vous serez au chômage.
Car le chômage de masse entraîne le chômage et la misère de masse.
Et en plus ,vous vivrez majoritairement dans un trou (puisque les ruraux sont majoritaires en France) où il n’y aura plus de Poste, plus d’hôpital, plus de commerces. Rien.
Là, malheureux, il sera temps d’y penser, à vos enfants.
Ce sera quoi alors, votre prochaine étape? Le fascisme, la tête farcie de bêtises, de contre-vérités, la haine, la bave aux lèvres, le gourdin dans la main? Vous croyez que vous serez des Hommes comme ça, en vivant comme des bêtes?
Mais pardon !
Si vous pensez que oui, c’est ça, le monde à laisser pour "les générations futures", vous êtes des dangers publics pour vos propres familles, et pour celles des autres, qui au demeurant, ne vous ont rien demandé.
Ce sont la haine et la peur qui nous divisent et qui nous tuent. Nos armes les plus fortes sont la solidarité et la fraternité.
VIVE LA REVOLUTION, VIVE "LES ROUGES", A BAS SARKO ET LES CAPITALOS