Afghanistan: vrai-faux rapport et vrai-faux débat

Publié le 22 septembre 2008 par Hmoreigne

La bataille de la communication autour du dossier Afghan a connu un nouveau rebondissement ce week-end. Le Globe and Mail, journal canadien de bonne réputation a publié un rapport dont il attribue la paternité à l’OTAN qui mettrait en cause l’impréparation des troupes françaises. Les autorités françaises et les responsables de l’OTAN nient jusqu’à l’existence même de cette note qui reprend en partie des informations publiées début septembre par Le Canard enchaîné. Cette publication relance le débat sur les moyens et l’organisation des forces françaises au moment où le parlement a choisi de prolonger la présence militaire française en Afghanistan.

En tout état de cause le vrai-faux ( ?) rapport de l’Otan classé secret apporte de l’eau au moulin d’une partie des parlementaires perplexes sur les objectifs et la feuille de route de nos troupes. Les Députés notamment ont pu manifester leurs états d’âme devant les deux assemblées. L’UMP a se gausse un peu vite de cette soi-disante première permise par l’adoption de la révision constitutionnelle, le 21 juillet dernier. François Mitterrand pourtant n’en avait pas eu besoin en 1991 pour permettre au parlement de débattre lors de la guerre du golfe.

Trois questions toutes aussi légitimes s’entremêlent : le contrôle par la représentation nationale des opérations extérieures, la stratégie française et au-delà de l’OTAN en Afghanistan et enfin la nature des moyens alloués à l’armée française pour mener à bien les missions qui lui sont confiées.

Sur ces trois points on ne peut pas dire que la situation de la majorité soit confortable. Le débat proposé au parlement a été biaisé par une issue connue à l’avance. Un vote binaire, oui ou non, singulièrement réducteur qui fait l’impasse sur les questions de fond.

La France qui se vante de sa capacité militaire à intervenir partout dans le monde voit cette vision idyllique sérieusement écornée. Pour jouer dans la cour des grands et être militairement crédible, il faut être capable de consacrer des moyens financiers importants. État désargenté, la France s’est réduite depuis déjà un certain temps au système D, avec des matériels vétustes et insuffisants. Les indigences matérielles avancées sur le terrain d’opération Afghan en sont le simple corollaire. Une seule radio, des munitions limitées, des hommes mal équipés… de multiples témoignages convergent dans le même sens. Sur celui d’un constat partagé de l’état de faiblesse matériel de notre armée.

Le vote du parlement dans le sens d’un renforcement des moyens est, à elle seule, une réponse insuffisante. François Fillon est resté très vague sur la nature de ces renforts. Et pour cause derrière les déclarations de tribune, un certain nombre de militaires doutent de la capacité réelle à les mettre en œuvre, sans déshabiller Paul. Si toutefois les engagements étaient tenus rapidement, ce qu’il faut souhaiter, restera la question de la stratégie française en Afghanistan, à ce jour calquée sur celle de l’OTAN.

Tout le monde s’accorde à reconnaître qu’elle n’est pas bonne et que l’on se trouve dans une impasse militaire. Un inexorable glissement vers une guerre d’occupation comme l’a souligné le président du groupe socialiste de l’Assemblée Nationale. La question n’est effectivement pas seulement de rester mais de se donner les moyens de gagner politiquement. Tout l’intérêt d’un débat national était bien là. Il est regrettable que la majorité présidentielle n’ait pas souhaité le rendre effectif pour lui préférer un affrontement droite-gauche caricatural et stérile.