TELLE MÈRE, TELLE FILLE?
Sans le nommer, Eliette Abecassis a dressé dans Mère et fille, un roman, le portrait d’un couple mythique de la mode : le clan Rykiel. Deux femmes, deux générations, deux séductrices réunies par un amour fou et inconditionnel.
Nathalie Six : En quoi Sonia et Nathalie Rykiel sont-elles fascinantes?
Eliette Abecassis :Je voulais écrire sur le binôme mère/fille or elles l’incarnent de façon très romanesque et fusionnelle. A travers le particulier, je raconte l’universel : la problématique de la séparation, comment exister sous le regard de sa mère.
Comment ont-elles réagi ?
Elles m’ont laissé les suivre pendant un an, se livrant entièrement, avec leur passé et leurs secrets. Ce fut une expérience intense car elles étaient une documentation vivante et leur histoire a fini par faire écho à la mienne. A la fin, elles ont eu un jugement d’artistes : une vision positive de l’œuvre même si elles ne se sont pas toujours reconnues.
Vous avez beaucoup écrit sur votre père. Est-ce une manière de rééquilibrer les choses ?
Je m’étais éloignée de ma mère, mais avoir une fille nous a rapprochées. La littérature évoque plus volontiers les liens avec le père, le complexe d’oedipe, etc. La relation à la mère est très forte aussi. Ce que j’ai compris en écrivant ce livre, c’est que l’on met toute une vie à la quitter.
L’activité créatrice est au cœur de votre livre : au point de comparer la mode et la littérature ?
Oui, c’est pourquoi je me suis identifiée à Sonia. Ce sont des femmes atypiques qui ont une vision du monde à part. Elles ont besoin de liberté tout en assumant le quotidien. Il faut accepter que son enfant, son œuvre en quelque sorte, nous échappe. La séparation est d’autant plus douloureuse.
Interview réalisée pour le magazine Femmes (numéro de septembre 2008)
"Mère et fille, un roman" d’Eliette Abecassis, Albin Michel, 169 p., 15,90 euros.