Georges Duhamel, Le notaire du Havre

Par Alain Bagnoud

J'ai senti, au début de la lecture de ce roman, une exaspération me gagner rapidement.
Mais qu'est-ce que veut donc Duhamel (me disais-je) ? Chanter les beautés de la petite bourgeoisie dans une langue simple, en adoptant une position narrative plaintive et complice ? Célébrer les mérites d'une société médiocre qui permet, en deux ou trois générations, à des arrière-petits-fils de paysans de devenir notaires provinciaux ou médecins ? Nous engluer dans des histoires étroites d'héritage, de sous, de minuscules réussites sociales ?
De tout ça venait une impression d'étroitesse, de mesure bourgeoise, de petitesse satisfaite.
La famille des Pasquier est agaçante. Un père un peu fantasque, avec quelques colères homériques, mais si travailleur ! La mère parfaite, elle, qui coud, ne se plaint jamais. Les garçons vont réussir, on le devine. Ils seront la matière, si j'ai bien compris, de la Chronique des Pasquier, dont Le Notaire du Havre est le premier volume, et qui avait rendu Duhamel célébrissime jadis.
Heureusement, la famille déménage et là, ça devient intéressant. A cause de leurs voisins. Les Wasselin d'abord. Théâtraux, cabotins, hurleurs. Le père maudit ses aînés, les renie, bat le dernier, Désiré, détourne de l'argent. Les Courtois ensuite. Retraités dont le mari sombre dans la démence.
Enfin ça devient tragique. Wasselin finit en prison, Désiré se pend, les Pasquier ont perdu tout l'argent sur lequel ils comptaient.
Duhamel a une étiquette publique d'humaniste dont l'idéal était l'ordre et la paix. Bon, il y a du boulot. Dans la suite de la chronique, peut-être...

Duhamel, Le notaire du Havre, Folio