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Crise financière : lettre à mon professeur de mathématiques

Publié le 20 septembre 2008 par Christophe Laurent

Crise financière : lettre à mon professeur de mathématiques

Entre la décision du gouvernement amrécain d'injecter mille milliards de dollars et les tergiversations du gouvernement français à étendre l'application de la taxe bonus malus sur les biens de consommations, il existe un lien subtil et fondamental qui renvoie à la question : faut-il mettre fin au système capitaliste tel que nous le connaissons ? Car à bien y regarder, il est légitime de s'interroger : sommes-nous face à une crise financière ou humanitaire ?

Quelqu'un de ma connaissance, mon professeur de mathématiques en réalité, me faisait remarquer il y a peu que j'étais fâché avec les chiffres - cette personne ne sait pas à quel point elle avait en fait raison, j'ai préféré lui faire croire que j'avais triché, la crainte de la punition ou du gage peut-être ... mais cela est une autre histoire - et en fait, je crois qu'elle avait raison sur toute la ligne.

En écoutant les informations, je n'ai pu que convenir de mon incompétence en la matière lorsque j'ai entendu que le gouvernement des Etats-Unis avait décidé d'injecter dans l'économie la bagatelle - et celle-là ne se fait pas avec de la dentelle - de mille milliards de dollars. Les places boursières ont accueilli cette nouvelle stupéfiante avec une euphorie non moins étonnante pour une personne comme moi fâchée avec les chiffres. J'espère qu'une bonne âme, un lecteur averti pourra m'expliquer à quoi servira cette somme dont on a du mal à s'imaginer ce qu'elle signifie, et surtout si un expert en finance pourrait éclairer ma lanterne et me dire à qui sont destinés ces mille milliards de dollars.

Crise financière : lettre à mon professeur de mathématiques

Bien sûr, je prends note que des sommités du monde de la finance comme Georges Soros, multimilliardaire qui « fit sauter la Banque d'Angleterre » en 1992, dénonce avec vigueur « les intégristes du marché », selon lui[1],  « responsables de la formation d'une super bulle[2] », et cette intervention du Gouvernement américain devait, moi simple citoyen, me rassurer dans la solidité de notre système capitaliste. Et de manière péremptoire, le multimilliardaire d'énoncer dans les colonnes du journal Le Monde daté du 20/09/2008 que « la grande différence avec la crise de 1929, c'est l'attitude des autorités. Elles ont compris qu'il fallait soutenir le système, même si c'est compliqué et coûteux, et si ce n'est pas dans leur culture de faire intervenir l'Etat. » Mais à bien lire son interview, il y a vraiment matière à s'inquiéter quand il ajoute que « cette crise [sous-entendu « financière » - ndlr] va se transmettre à l'économie réelle (...) les consommateurs ne vont s'endetter. Ils consommeront moins »

Quelqu'un peut-il m'expliquer ? Ce Monsieur Soros serait-il devenu un chantre du principe de la décroissance ? Pourquoi ne précise-t-il pas que cet « Etat » qui intervient c'est en fait le contribuable, ce simple citoyen qui va devoir participer au sauvetage d'un système dont il ne bénéficie que maigrement, à qui on va expliquer qu'il ne pourra pas se loger comme il l'espérait, qu'il ne pourra pas de faire de prêt pour financer les études de ses enfants, à qui on va dire que l'assurance maladie, l'assurance chômage et tout ce qui fonde le système de solidarité sociale entre les riches, les moins riches et les pauvres sont au bord de la crise eux aussi et désormais chacun devrait payer pour sa santé, pour le jour où il sera sans emploi et sans salaire, etc. ? Pourquoi Monsieur Soros n'explique-t-il pas cela ? Il préfère conclure de manière terriblement cynique pour le lecteur anonyme que je suis sur : « si c'était à refaire ? Je spéculerai mieux ... » Bah voyons !

Personnellement, je me demande si ce n'est pas le système capitaliste dans sa globalité qui est en train de s'effondrer démontrant de belle manière ses incohérences et contradictions. Qui n'effrayent plus personne - question d'une affreuse banalité pour mon professeur de mathématique : combien de personnes meurent de faim dans le monde chaque année sachant qu'une personne (1) meurt toute les quatre (4) secondes[3] ? A ce jour les Nations Unies  estiment à 925 millions (925 000 000) le nombre de personnes qui souffrent de la faim !!! A ce sujet, je vous invite à écouter Olivier de Schutter, rapporteur de l'ONU pour l'alimentation interviewé sur France Info

Dans le même moment, les statistiques de recensement du nombre de personnes milliardaires affichent des records ! Certes leur nombre demeure modeste - environ huit cent personnes - mais ce qui est marquant c'est que le capital cumulé de ces personnes est estimé à environ 2 600 milliards de dollars, soit deux fois et demi ce que le Gouvernement américain a décidé d'injecter dans l'économie. Je voudrais demander à mon professeur de mathématique de me rassurer, mais je crains que cela ne soit impossible et demeure un vœu pieu. En effet, j'espère que ces huit cent personnes qui sont milliardaires, voire multimilliardaires pour certaines ne seront pas les premières à bénéficier du plan de sauvetage.

Crise financière : lettre à mon professeur de mathématiques
Pendant ce temps, le président de la République Française - presque soixante quatre millions d'habitants[4] - loin des questions existentielles que lui pose son modèle de femme[5], est confronté à un choix cornélien dont le journal Le Monde fait son éditorial. Quel est-il ce choix digne des tragédies de Corneille ? Pour le résumer, nous citerons l'éditorial en question. D'un côté, « fort du succès de bonus malus sur les voitures, le ministre de l'écologie, Jean-Louis Borloo, veut étendre ce système à d'autres biens de consommation (pauvre Borloo, je l'aimais bien, lui qui a tant fait pour sa ville, le voilà soupçonné de vouloir taxer les pauvres gens qui vont pique-niquer ...) : il faut dépenser un peu plus d'argent public pour consommer moins de carbone et protéger l'environnement ». D'un autre côté, « Eric Woerth, le ministre du budget, objecte que le coût de telles mesures est hors de propos » Comme le souligne à juste titre l'éditorial « au-delà de ces bisbilles [franco-françaises] revête en réalité un enjeu et « un choix stratégique » qui n'est pas sans rapport avec les mille milliards de dollars déboursés outre atlantique. Ici, au pays de l'Etat providence (enfin presque), on chipote pour savoir s'il est judicieux d'orienter les consommateurs que nous sommes vers un peu plus de responsabilité à l'égard des générations futures, et là-bas, au pays du libéralisme absolu, on verse sur le compte du contribuable des sommes folles pour sauver de la banqueroute un système capitaliste non régulé.

Le monde marche-t-il sur la tête ? Je vais devoir faire appel à mon professeur d'éthique cette fois, pas sûr que je puisse tricher cette fois ...

Glossaire pour mieux comprendre la crise financière humanitaire :

0 = zéro

1 = un

4 = quatre

10 = dix

100 = cent

800 = huit cent

1 000 = mille

10 000 = dix mille

100 000 = cent mille

1 000 000 = un million

7 884 000 = sept millions huit cent quatre vingt quatre mille

10 000 000 = dix millions

63 753 000 = soixante trois millions sept cent cinquante trois mille

925 000 = neuf cent vingt cinq millions

100 000 000 = cent millions

1 000 000 000 = un milliard

10 000 000 000 = dix milliards

100 000 000 000 = cent milliards

1 000 000 000 000 = mille milliards

2 600 000 000 000 = deux mille six cent milliards


[1] Il partage en cela et étrangement une opinion avec Le Canard Enchaîné, toujours à la pointe de l'information, titrait cette semaine « Crise financière, on vous raconte des Krachs »

[2] Rien à voir avec le pauvre bubulle

[3] Soit 7 884 000 (sept millions huit cent quatre vingt quatre mille) personnes par an, merci professeur ...

[4] Pour être exact au 1er janvier 2008 : 63 753 000 d'habitants soit + 361 000 en un an selon l'Insee

[5] "And that he no longer creates a ruckus by jogging in the Bois de Boulogne, the public park on the western edge of Paris-not since it became clear that the French were horrified to see pictures of their president sweating. These days, Bruni runs with him on the gravel paths in the Élysée garden". (cf. Vanity Fair)


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LES COMMENTAIRES (1)

Par vi
posté le 01 mai à 14:59
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La crise financière me semble bien voulu. En 2008 au réseau TVA Sophie Thibeault annonçait que les pétrolières avait fait 1,5 gogol de profit. Juste avec les profits dune seule année divisé à tout les humains, chaque humain serait plus que milliardaire. Ce nest pas normal. en passant après le 1 dans un gogol il y a 100 zéro...

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