Moi.

Par Ananda
Vie recroquevillée : Moi, moi
rien que moi, à perte de vue...
Vie confinée, mesquinerie :
rien que pour le Moi, par le Moi.
Vie aussi refermée qu'un poing
qui se crispe, aussi desséchée
qu'un oued à sec, par la rancoeur,
la jalousie
pour un rien.
Emmurement dans le moi seul,
dans le moi je,
ce cul de sac
qui ferme tous les horizons,
rapetisse l'être à loisir.
Voix sans issue, grisâtre peur
d'où ne s'échappe
aucun élan
obsédantes ruminations
de la frustration, de l'aigreur.
Qu'est-ce que vie
vécue ainsi
dans cet état
d'enfermement
qui donne oeillères, momifie,
interdit
tout vrai coup de coeur ?
Tristes, au fond, tristes à en pleurer
ces gens qui ne vivent que pour
eux-mêmes et leur affirmation
d'eux-mêmes qu'ils aboient sans fin
pareils à de pauvres roquets,
comme pour défendre
un trésor.
Affligé, autant qu'affligeant,
celui
qui ne voit jamais plus
loin que les bornes de son Moi
où il tourne
en lion dans sa cage !
Vraiment à plaindre, en vérité
le névrosé de notre temps
que n'habite aucune grandeur,
aucune curiosité,
aucun autre intérêt que son
lui-même, cette hypertrophie
cancérisée qui le
dévore !

P.Laranco.