Près de 8 millions de logements en copropriété en France, dont plus de la moitié construits entre 1950 et 1970… Conclusion : plusieurs millions de logements peu ou pas isolés, bâtis en des temps où l’énergie chère n’était pas vraiment une préoccupation. Il s’agit donc d’un vivier immense pour réaliser des économies d’énergie, ce qui n’a pas échappé au “triumvirat” du Grenelle de l’Environnement composé de Jean Louis Borloo, Dominique Bussereau et Nathalie Kosciusko-Morizet.
Jusqu’à présent, on a beaucoup parlé du DPE (Diagnostic de Performance Énergétique), rendu obligatoire à l’occasion de la vente d’un logement ou d’un bâtiment depuis le 1er novembre 2006 et lors de la conclusion d’un bail depuis le 1er juillet 2007. Il constitue en quelque sorte le volet “développement durable” du Dossier de Diagnostic Technique (DDT… si, si !) dorénavant imposé au vendeur, et qui vient donc alourdir la note au moment d’acquérir un logement.
Pourtant, c’est un couperet plus discret mais autrement plus incisif qui pourrait s’abattre sur les copropriétés. En effet, le gouvernement vient de publier un arrêté le 13 juin dernier, relatif à la performance énergétique des bâtiments existants. Pour faire simple, toutes les copropriétés construites depuis 1948, d’une surface supérieure à 1 000 m2 et réalisant des travaux représentant plus de 25% de la valeur des bâtiments devront faire réaliser, avant travaux, une étude précise permettant de vérifier que, au terme de ces travaux, la consommation d’énergie et les performances de la copropriété seront au global conformes aux minima requis.
Certes, avoir une approche plus raisonnée et plus économe en matière énergétique est une nécessité absolue, a fortiori dans le contexte actuel : dérèglements climatiques, tensions géopolitiques, envolée du baril de brut, épuisement des ressources fossiles… En outre, le seuil de 25% évoqué dans l’arrêté n’est pas simple à atteindre : la copropriété doit envisager un programme de rénovation conséquent pour que ses travaux soient “suffisamment” coûteux. Enfin, le changement climatique et ses implications nous concernent tous, moyennant quoi chacun doit prendre sa part…
Pour autant, si l’on discerne facilement le bien-fondé de ces mesures, il est plus délicat d’imaginer comment elles pourraient être valablement appliquées dans la situation actuelle. D’un côté, le prix des travaux d’entretien et d’amélioration des logements est en constante augmentation, ce qui renchérit directement les dépenses engagées dans les copropriétés des années 60-70, souffrant pour la plupart d’un gros déficit d’entretien et d’investissement. Comment faire face à de nouvelles exigences techniques ?
Par ailleurs, les contraintes augmentent sans que l’on mette en face les ressources correspondantes, le tout dans un contexte financier où l’emprunt pour les copropriétés devient chaque jour plus difficile. Comment financer ces travaux ?
Enfin, on se demande si les pouvoirs publics ont conscience de la situation dans laquelle se trouvent une très grosse part des copropriétés de ces années-là, subissant de plein fouet l’augmentation continue des charges (personnel d’immeuble, chauffage, contrats de syndic, entretien des ascenseurs…) et en proie à des impayés qui ne font que renvoyer à la fragilisation grandissante des ménages en France. Comment éviter la “casse sociale” ?
Bref, le chantier en matière d’économies d’énergie sur l’habitat existant est légitime, essentiel, mais reste à se donner les moyens de nos ambitions, sous peine de faire porter un poids démesuré pour des publics déjà exsangues.
Un (délicat) équilibre reste à trouver : au boulot !David