19/09/2008
La fed bientôt en faillite ?
Le plan de soutien massif du marché est en fait la suite de la politique suivie par la FED.
En un an de crise du crédit la FED a été souvent louée pour son pragmatisme et son inventivité. Cette créativité risque d'avoir un prix énorme, en effet l'institution qui a cessé de n'accepter que des collatéraux solides a littéralement déstructuré son propre bilan. La lecture de celui-ci inspirerait les plus grandes réserves s'il s'agissait d'une institution privée.
Qu'on en juge, en un an la part des bons du trésor et autres papiers garantis dans les avoirs est passé de 91% du portefeuille d'actif à seulement 51%, le reste du portefeuille s'est garni d'actifs inédits pour la banque centrale, d'humbles papiers commerciaux et d'infréquentables obligations adossée à des emprunts immobiliers (MBS).
La banque communique très pudiquement sur le contenu des avoirs détenus au titre des opérations nouvelles acceptant ce type de collatéreaux (TSLF : Term Securities Lending Facility) voir le lien pour se faire une idée http://www.federalreserve.gov/releases/h41/Current/. Elle donne comme valeur d'actif la valeur faciale des titres détenus à la suite du programme d'émission de 150 milliards de dollars. Suite aux derniers évènements la banque a d'ailleurs décidé de faire croître cette facilité qui est désormais passée à 200 milliards de dollars. Le programme dure maintenant depuis plusieurs mois et de nombreux titres sur le marché ont connu des dépréciations, apparemment la banque centrale n'a pas l'air d'en avoir souffert.
Au titre des joyeusetés on peut noter le prêt correspondant aux titres repris à JPMorgan Chase dans le cadre du programme de sauvetage de Bear Stern. Les vertueux avaient grondés soupçonnant que JPMorgan Chase s'était défaussés du papier de mauvaise qualité en échange d'une simple obligation de participer aux pertes en deçà d'un certain montant, les mauvaises langues ont eu bien tort, le prêt consenti rapporte et le portefeuille n'a pas été dégradé, un homme confiant pourrait aller jusqu'à croire que la banque centrale a fait une bonne affaire, ce n'est pas notre cas.
On doit aussi ajouter le prêt passé récemment à AIG pour 85 milliards de dollars (le montant est en fait la limite d'une ligne de crédit).
Tout cela ajouté représente tout de même presque 300 milliards de dollars d'actifs potentiellement risqués. En contrepartie la banque n'a pas jugé utile de faire de provisions et son capital se limite à 38 milliards de dollars. Autrement dit le ratio de capital/actifs non sécurisés est désormais inférieur à 8, que font les instances de régulations !
Plus grave encore le trésor va proposer à la banque une somme de 100 milliards de dollars pour alimenter les comptes de la banque et lui permettre de mener encore plus d'opération de type TSLF, au train où vont les choses la part de bilan non garanti va dépasser les 400 milliards de dollars.
On se doit d'ajouter que le fonctionnement du REPO a également été modifié pour permettre la reprise de Mortgage Back Securities, cette ligne pèse 110 milliards de dollars sans que la banque ne prenne la peine de communiquer sur la ventilation des titres déposés en collatéral.
Or l'année passée les Repo comptabilisés étaient voisins de 30 milliards de dollars, il y a de fortes chances pour que le gonflement ait succédé à l'assouplissement des règles, bien sûr le timing de détention moyen des titres est faible et l'emprunteur ne « vend » pas ses titres, il les offre en garantie, mais voilà c'est la saison des faillites ! Notre estimation des montants à risque est donc probablement inférieure au montant maximum imaginable.
Autrement dit la banque commence à avoir un profil Actif/Passif/Capital qui commence à ressembler aux brokers qui font faillite, on ajoutera avec malice qu'avec la reprise d\'AIG elle assure le financement du paiement des assurances sur défaut de paiement, c'est le moment de faire des swap !! C'est bien d'avoir plusieurs cordes à son arc c'est moins bien lorsque cela sert exclusivement à payer ….
Une banque centrale ne fait jamais faillite, enfin presque, tant que les FED Notes seront émises avec la bénédiction de l'Etat et qu'elles seront acceptées comme bonne monnaie, tout ira bien. En revanche il est parfaitement clair que la FED a dépassé son rôle d'assistance au secteur financier, elle est en train de le subventionner silencieusement. Comme si la baisse des taux financée in fine par les déposants ne suffisait pas.
Or la tourmente n'est pas finie il faudra probablement aider les géants en gestations que sont Morgan Stanley – Wachovia ? et Bank Of America – Merrill Lynch, les fusions n'ont malheureusement pas la vertu d'assainir les bilans, or ceux-ci ne sont pas flatteurs. On doit d'ailleurs noter que les deux institutions en « forme » JPMorganChase et WellsFargo se tiennent prudemment en réserve alors que le bal des fusions bat son plein. Si il y avait vraiment une bonne affaire à faire nul doute qu'elle sortiraient le chéquier.
C'est en considérant cette situation que l'on peut mieux comprendre la volonté du pouvoir politique de trouver une solution de financement globale de la catastrophe, dans les faits le financement a déjà commencé depuis plusieurs mois et il devait devenir de plus en plus difficile de le cacher.
Le prêt du trésor à la FED est probablement le prélude aux très gros chèques qui vont suivre.
Auteurs: Eric Grémont
Entreprises liées: Crédit Agricole Groupe , AXA , Crédit Mutuel , Bear Stearns , JPMC , Crédit Agricole , CNP , Crédit Suisse , CDC , Wachovia , Bank of America , Merrill Lynch , UBS , RBS , Deutsche Bank