Comme la plupart d'entre vous, j'ai suivi avec attention l'évolution du jeu "Spore", le nouveau bac à sable du créateur des Sims. Comme vous, cette débauche de communiqués, de vidéos savamment choisies et de publicité, m'ont alléché, et peut-être comme vous, j'ai acheté Spore le jour de sa sortie. Alors, quel jeu se cache derrière le battage médiatique ?
Je suis tout petit...
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il est important de rappeler qu'Electronic Arts et Maxis se foutent bien des joueurs en imposant un système de protection complètement sans intérêt et dont la seule utilité est, disons le bien, d'emmerder le joueur honnête qui a acheté le jeu légalement.
Après installation et activation donc, l'espace s'ouvre à vous et vous permet de choisir une planète pour y démarrer votre espèce. Vous commencerez la route de l'évolution au plus bas: le stade cellulaire. Contrôlant une cellule microscopique au clavier ou à la souris, vous devrez grossir en récoltant de la nourriture, et évoluer en volant aux autres cellules leurs caractéristiques, en les mangeant ou en explorant des restes de météorite. En faisant évoluer votre cellule, vous pourrez commencer à définir le chemin que vous souhaitez lui faire prendre dans la grande roue de l'évolution. Palmes et flagelles augmenteront la rapidité et permettront de s'enfuir devant les prédateurs, épines utilisées en attaque ou en défense, décharge électrique, etc.
Le graphisme de cette première phase est magnifique et fera battre votre coeur comme celui d'un petit garçon (ou d'une petite fille). Coloré, plein d'animations fluides, grouillant de vie, l'univers de la phase cellulaire est ce qu'on aurait aimé retrouver partout dans Spore et est très certainement la phase la plus réussie du jeu. Dommage qu'elle soit de si courte durée, toutefois son gameplay ultra-simple aurait probablement lassé, à la longue.
Spore - la phase cellule
envoyé par ElectronicArts
Bec et ongles
Après avoir survécu suffisamment pour apprendre à marcher sur la terre ferme, vous vous retrouvez donc aux commandes d'un animal, résultat de l'évolution de votre cellule, et bien décidé à continuer son chemin sur la terre ferme. Pour ce faire, vous devrez évoluer en vous nourrissant de plantes ou sur les autres animaux peuplant le monde selon que vous êtes herbivore ou carnivore. Les nouveaux "morceaux" qui vous permettront de mieux adapter votre créature à son environnement se trouveront sur des squelettes disséminés partout sur le terrain, ou sur vos adversaires vaincus.
Après le monde grouillant de vie de la première phase, les décors de la phase créature vous paraîtront bien vides et ternes. Le monde rond et coloré de Spore plaira probablement aux enfants de moins de 12 ans, mais je doute qu'il atteigne l'œil exercé des joueurs de tous poils. Malgré ce défaut, la phase créature est pleine de trouvaille intéressante qui vous apprendra le sens de la phase "La survie du plus adapté". Chaque épreuve et difficulté se résoud par une évolution à apporter à sa créature. Les arbres sont trop hauts ? Donnez lui des ailes ou faites grandir ses jambes. Les tribus voisines trop agressives ? Rajoutez des griffes et des piquants. La nécessité d'évoluer pour survivre est bien ressentie dans cette phase, et c'est bien ce qu'on recherchait dans ce jeu.
Tribu interdite au plus de 12 ans
La phase tribale est la période de jeu suivante, où vous devrez mener votre village jusqu'à la domination des autres espèces. Pour cela, deux solutions: les détruire par la guerre, ou s'en faire des alliés par la musique. Une simplicité enfantine pour une phase qui sera pliée en moins de deux heures par tout joueur ayant un tant soit peu d'expérience. Trop simple, la phase tribale vous demande de reproduire exactement le même schéma de jeu 5 fois de suite, face à une IA inexistante.
On notera tout de même que c'est à cette phase que l'extraordinaire éditeur de Spore dévoile son plein potentiel, et on passera finalement plus de temps à personnaliser les bâtiments de son village ainsi que le costume de ses habitants qu'à jouer au jeu en lui-même.
Spore Tribal Phase Trailer
envoyé par Gameblog
Civilization pour les nuls
S'en suit la phase "Civilization", clone débile du jeu éponyme, où vous devez unifier, par la guerre, le commerce ou la religion, toute votre espèce sous un même drapeau. Se déroulant comme un jeu de stratégie en temps réel simpliste, cette phase manque cruellement de diversité. 4 types de bâtiments seulement peuvent être construits dans les cités, et une seule unité de chaque type (volant, maritime et terrestre) peut être utilisée. L'IA n'est pas plus intéressante que dans la phase précédente et, de même, le but du jeu consiste à reproduire exactement les mêmes actions sur toutes les villes adverses jusqu'à ce qu'elles soient toutes tombées sous votre coupe.
On regrettera que toutes les villes soient de votre civilisation, car on aurait aimé pouvoir découvrir les espèces rencontrées à l'état de cellule dans toute leur gloire. Au lieu de cela, on se retrouve à affronter des clones de notre propre espèce jusqu'à ce que victoire s'en suive.
2008, l'odyssée de l'espace
La dernière étape est la Phase Spatiale. Aux commandes d'un vaisseau spatial lancé par votre civilisation, vous arpentez l'univers, entrant plus ou moins violemment en contact avec d'autres espèces ayant évolué différemment sur d'autres planètes, et complétant des missions variées. Après les déceptions des deux précédentes phases, le départ dans l'espace agit comme une bouffée d'air. La transition planète-espace aux commandes du vaisseau se fait tout à fait naturellement, de même que les différents voyages. Ce n'est plus votre civilisation ou vos véhicules que vous personnalisez par l'intermédiaire de l'éditeur, mais désormais votre spationef depuis laquelle vous effectuez les missions.
Passé la bonne surprise initiale, la phase spatiale ne s'avère pas vraiment plus réjouissante que les deux précédentes. Malgré les améliorations et le changement de planète, les différentes espèces rencontrées manquent de diversité, et la phase globale manque d'intérêt.
Un outil, mais pas un jeu
Au terme de cette phase, vous observez avec un pincement au coeur l'immensité des évènements qui ont formé l'histoire de votre espèce, depuis la petite cellule jusqu'à la conquête de mondes extra-terrestres. Votre estomac se serre, vous avez un vertige et... vous passez à autre chose.
Pour des gamers traditionnels, ces dizaines de millions de personnes qui ont passé 30 heures devant GTA, et 70 devant Civilization, Spore n'est pas un jeu. Son gameplay simpliste et répétitif lasse très vite, trop vite. Il restera donc un simple outil, car la puissance de son éditeur et ses possibilités sont infinies. C'est cet éditeur qui sauve l'intégralité du soft, et augmente la durée de vie autrement bien maigre. Certes, la rejouabilité pourra parraître grande car il est toujours possible de recommencer une partie avec une espèce orientée différemment, mais les mécanismes de jeu ne changeant pas, l'ennui sera toujours au bout du fil, excepté lorsque l'on est plongé dans l'éditeur.
Pour des non joueurs, Spore sera probablement une bonne introduction à la gestion et au jeu de stratégie. Qui sait, ce bac à sable temporel créera peut-être des vocations chez de futur fans d'Alerte Rouge 3 ou de Colonization ?
Au final, Spore est un jeu qui se vendra par milliers grâce à la machine de guerre médiatique mise en place par Electronic Arts, ce qui est à la fois honteux et heureux. En attendant, je ne vous félicite pas Mr Wright, et vous avez intérêt à nous pondre quelquechose de plus fouillé pour les Sims 3.