C’est étonnant comme elle vous poursuit après cette musique quand vous ouvrez les pages de fragments d’Emmanuel Tugny. Y’a quelque chose qui chaloupe. La page est comme une géographie dont les mots sont des reliefs auxquels on glisse ou on s’accroche. Le texte avance souplement dans l’écho de lui même et comme avec désinvolture, avec détachement. Pourtant ce n’est pas pures volutes et sonorités creuses. Ce travail dans la phrase, dans le vers c’est aborder le réel confondu à l’imagination indistincte et générale de nos errances. Moi j’avais voulu le dire autre part et je n’engage que moi quand j’extrapole, la phrase est émouvante quand il y a dedans ce trouble d’un regard qui se prend son reflet. Comme le jeu dans une vitre et les choses qui se mêlent et chancelles parce que soudain plus rien n’est disjoint. En art on a ça aussi quand il est question de vertige, et puisqu’il en est question ici : en amour. Souvent on se remue la tête, on rattrape ses mots, on s’en sert pour bien fixer les choses, on punaise les nuages au ciel, on replante les arbres et on reprend la ligne, sujet, verbe, complément. Mais parfois on se laisse dessaisir et c’est un plaisir en soi de couler dans le sens des choses à travers de drôles de phrases qui prennent les devant, ça a quelque chose j’en suis sûr de la vie en gestation, des images intra-utérines de celui qui n’a pas encore déjà ouvert les yeux. Photo: Emmanuel Tugny par Jacques Lalanne, septembre 2006. Source Wiki.Premiers fragments d'echo éditions publie.net