Présentation de l’éditeur :
En juin 1940, des centaines de milliers de vaincus s’acheminent vers les stalags sous les coups et les cris du vainqueur. Georges Hyvernaud, instituteur charentais, marche dans ce troupeau en guenilles, hébété de faim, de fatigue et de honte. Au bout du voyage, cinq ans de nuit et de boue. Dix-huit cents jours d’humiliation, de promiscuité répugnante, de pestilence et d’abjection. Le prisonnier de guerre est cet homme nu, privé d’identité, d’espoir et de rêves. "La peau et les os" est un témoignage impassible sur le cauchemar, le vide, la mort. Ce livre terrible, chef-d’oeuvre longtemps oublié, est aussi un acte magnifique d’exorcisme et de libération… L’oeuvre discrète de Georges Hyvernaud
Georges Hyvernaud est né en 1902 en Charente, professeur dans les écoles normales d’instituteurs, il fut mobilisé en 1939, capturé et prisonnier en Allemagne. La peau et les os (publié en 1949) est le témoignage de ces années. La parution à partir de 1985 de ses Oeuvres complètes a fait sortir de l’oubli cet écrivain que Raymond Guérin et Etiemble ont défendu. Georges Hyvernaud est mort le 24 mars 1983.
Un chef-d’œuvre tout simplement. Un livre coup de poing. Un style avant-gardiste pour l’époque ; phrase courte, droit au but, mot juste, sans fioriture. Un auteur méconnu ; intolérable ! Devrait être étudié à l’école.
«[…] on s’imaginait qu’on avait une âme, ou quelque chose d’approchant. On en était fier. Ça nous permettait de regarder de haut les singes et les laitues. On n’a pas d’âme. On n’a que des tripes. On s’emplit tant bien que mal, et puis on va se vider. C’est toute notre existence. On parlait de sa dignité. On se figurait qu’on était à part, qu’on était soi. Mais maintenant on est les autres. […]» p.48-49
« Et moi, je ne suis qu’un pauvre type qui écrit pour tuer le temps. Et il a la vie dure, le salaud. » p.52
« De la belle pauvreté vraiment, bien authentique, bien grasse, bien pourrie d’alcool et de vérole. De la pauvreté pour connaisseurs. J’allais épier et renifler tout cela. » p.61
« La pauvreté, ce n’est pas la privation. La pauvreté, c’est de n’être jamais seul. » p.62
« Quand on est pauvre, il ne faut pas être difficile. L’orgueil, la dignité, c’est un luxe de gens heureux. » p.68
« On avait le football du dimanche, les femmes, le fric, le cinéma. Epatant, le cinéma, comme narcotique. Le cinéma, le grand bazar de l’hébétude, la chaude boutique du rêve tout fait, tout cuit, démocratique et standard. Il n’y avait qu’à s’asseoir, à être là, à ouvrir les yeux. A être un homme de la foule, consentant, passif, soumis à la frénésie mécanique des images, livré aux spectres, sans passé et sans avenir. » p.94
« Les morts ne sont ni heureux ni malheureux : ils sont morts. On leur a volé leur montre et leurs bottes, et ils pourrissent au fond d’un fossé. Cette réalité de la guerre et de la mort a de quoi guérir d’un certain lyrisme martial. » p.133
Editions Pocket / Best - 157 pages