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Blog lassitude

Publié le 13 juillet 2007 par Argoul

Ce n’est pas nouveau, cela prend un tour critique : les blogueurs se lassent peu à peu de leur nouveau jouet. Du moins celles et ceux pour qui cette nouvelle forme de communication est un gadget, jetable après 2 ou 3 ans pour zapper vers autre chose. Point d’idéalisme : le besoin de changement est en l’homme et l’air du temps comme le commerce précipitent cette tendance (sans la créer).

Qui reste-t-il de « mes meilleures pages des autres blogs », d’avril 2005 ?
• Disparus Tikha India, Ckck, Photographie tous azimut, Yann, Réac de Gauche, Céline voyageuse…
• Hésitants Alain d’Emmaüs qui veut « réfléchir sur le contenu et le sens », Bourrique pour qui « la liste des blogs quotidiennement parcourus se réduit », Fraise « quelque peu las de la petite tambouille politique qui recuit piteusement à gauche en ce moment » - son fond de commerce, Phileas de moins en moins bébé, Mamytartine qui ne poste guère plus de 4 notes par an, Hrundi qui a voulu partir après s’être « bien amusé » et qui revient sur les instances de ses fans épisodiquement, Annie-Claude qui déclare “Je ne suis pas certaine de continuer ce blog sur cette lancée. Un brin de lassitude, c’est vrai”. RichardB annonçant « le calme plat », UU abandon puis retour « pour résister » (à quoi ?).
• Politique, Jean-Louis fait de plus en plus écrire les autres… jetant un demi-texte polémique dans la mare au shocking pour voir se débattre les gamins. Restent les expressions lasses des déprimes de banlieue, des névroses de province, des nostalgies d’exil, du post-coïtum politique – et les blogs spécialisés qui s’amusent.

Deux attitudes – comme souvent – face au problème :
1. La première est négative : déprime politique, vanité de croire convaincre, caricature de l’écrit court, indifférence des lecteurs.
2. La seconde est positive : maintenir le blog à niveau est un plaisir et un devoir, éclaire le débat citoyen, dialogue, rencontre et bénéficie (trop rarement hélas) de l’apport de lecteurs qui en savent plus que vous sur un sujet donné.

Une réflexion juste, à mon sens, est celle de Bernard Salanié, « économiste-blogueur » ainsi qu’il se désigne : « Je rouvre ce blog avec deux amendements :
• Je proclame résolument son caractère épisodique, parfaitement incompatible avec un rythme régulier de publication. Plutôt que de réagir au jour le jour à l’actualité, je préfère mettre en ligne un texte raisonnablement réfléchi et documenté quand j’en aurai l’occasion.
• Après avoir pesé le pour et le contre, j’ai décidé d’interdire les commentaires sur ce blog. Dans mon expérience, ils ouvrent souvent des débats peu productifs où je me laisse entraîner malgré mon caractère notoirement placide. On me suggère aussi souvent de nouveaux sujets de billets que je promets de traiter, ce que je ne fais que rarement. En supprimant le commentaire, je supprime la frustration et renforce donc le point 1. »

« Texte réfléchi et documenté », certains auront reconnu ce que j’ai toujours pensé, déjà à Montcuq (pardon de me citer), en évoquant « le style, c’est l’homme même. La lecture sur écran demande phrases brèves, thèmes chocs et aérations imagées. Photos (1 à 6), textes courts (½ à 1 page Word), un seul thème pour chaque note. Il faut “accrocher” comme dans la presse, captiver comme dans la littérature, nourrir l’esprit comme dans les essais… »

Quant aux « commentaires », je ne puis qu’être d’accord avec l’auteur, ayant évoqué le sujet dans une note pas trop lointaine : « l’interactivité du blog ou plus généralement du net est elle aussi la meilleure et la pire des choses. La meilleure lorsqu’elle confronte les idées et les amène dialectiquement et démocratiquement à évoluer ; la pire lorsqu’elle se réduit au réflexe pavlovien et au pur négatif de s’opposer à ce qui vient d’être dit sans en chercher les points d’accord ou de complément. »

C’est là où l’on mesure l’écart entre le « réactif » et le « réactionnaire ». Le réactif a de la réaction, il vit, il bouge, il s’exprime : il est positif. Le réactionnaire a de l’inertie, il est passif, il résiste, il grogne parce qu’on le dérange : il est négatif. Il ne réagit que parce qu’il n’est prêt à rien. Il veut conserver le monde, son statut et ses opinions telles qu’elles sont, sans rien changer. Or, la plupart des soi-disant « commentaires » blogueurs confondent « à la française » l’attitude « critique » avec le pur négativisme : ils « réagissent » en « réactionnaires » comme diables en bénitier, plus qu’en appui, complément ou construction. Sans parler des « réactions aux réactions » qui conduisent très vite à ignorer le texte initial au profit du narcissisme des ego. Le grégaire l’emporte alors sur l’exercice personnel de sa raison. Quoi d’étonnant à ce que certains se sentent même plus « commentateurs » que « producteurs » ?

Qu’en sera-t-il de ce blog-ci ? Je ne sais pas.

Pour l’instant, j’ai du temps, l’exercice m’amuse et je ne suis pas assez volage pour tout laisser tomber une fois lassé du « jouet ». Je m’émerveille à chaque fois de la capacité de « résilience » de notes que je croyais conjoncturelles : sur les villes culturelles du Japon, les blogs ado (qui ont leurs 50 à 60 visites quotidiennes !), Saint-Cirq Lapopie, le Hoggar sous l’indifférence des étoiles, Marc Monier ou Patricia Maché… De l’intérêt d’être varié, peut-être ? Dans sa tête comme dans le blog ?


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