La banquise est cette année encore dans un état critique… Elle se réduit de plus en plus, ouvrant la voie à toutes les convoitises des pays littoraux (Russie, Etats-Unis, Canada, Danemark et Norvège)… nouveaux gisements, richesses encore inexploitées et absence de juridiction oblige… L’apparition de nouvelles routes maritimes internationales facilitant l’accès à d’énormes ressources en hydrocarbones ne laisse personne de glace… mais les réactions sont fort variées, souvent aux antipodes, et les esprits pourraient s’échauffer…
En juillet dernier, l’agence gouvernementale américaine de recherche géologique (USGS) a estimé à 412 milliards de barils équivalent pétrole les ressources inexploitées d’or noir et de gaz dans le cercle Arctique, soit environ un quart des ressources mondiales encore inexploitées. 84 % de ces réserves se situent au large…
Source: rapport de l’agence gouvernementale américaine de recherche géologique
Lors d’une conférence internationale sur les enjeux de l’Arctique (ouest du Groenland) tenue il y a 5 jours à Ilulissat, Halldor Asgrimsson, secrétaire général du Conseil des ministres nordiques et organisateur de la conférence a rappelé que “nous savons tous que l’Arctique fait face à de nombreux défis. Les changements climatiques, l’exploitation des ressources naturelles et de nouvelles voies de navigation maritime sont peut-être parmi les plus cruciaux. L’Arctique est et doit être une préoccupation commune à nous tous (…) l’Union européenne est de la plus grande importance pour l’Arctique car une série de ses politiques et activités ont un impact sur la région arctique“.
Le rôle de l’UE dans la région est donc crucial, elle a “une importante contribution à faire dans cette région“, a rappelé le commissaire à la Pêche et aux affaires maritimes Joe Borg, citant le document adopté par l’UE en 2007 sur “Les changements climatiques et la sécurité internationale” (pdf - 14 mars 2008) qui signale “le besoin de réfléchir sur l’importance croissante de l’Arctique dans la politique européenne“.
A lire entre les lignes, on comprend également que la politique étrangère et de sécurité de l’Union Européenne a tout intérêt à prêter plus d’attention à ce problème que par le passé… Elle a donc décidé de présenter un programme d’action pour contribuer à préserver et protéger l’environnement arctique fragile et pour assurer une gestion durable de ses ressources, selon M. Borg. Et ces raisons expliquent en partie la pétition lancée par Jean-Louis Etienne hier afin d’inciter l’Assemblée générale des Nations Unies à voter une résolution qui classerait la banquise de l’océan Arctique, “Zone d’intérêt commun pour l’humanité“. Voilà le texte de l’explorateur ci-dessous:
La Présidence Française du Conseil de l’Union Européenne et la Principauté de Monaco, co-organisent une conférence internationale sur les enjeux de l’Arctique en présence des représentants des gouvernements des 27 pays de l’Union Européenne.
L’objectif de cette conférence est la création d’un observatoire pour le suivi à long terme des conséquences du changement climatique et des pollutions en Arctique à l’issue de l’Année Polaire Internationale.
Cette mise en réseau des recherches est une bonne initiative, mais la fonte de la banquise nous met dans l’urgence de nous attaquer à la racine du mal, de prendre toutes les mesures pour limiter les émissions de gaz à effet de serre.
La fonte de la banquise a déjà de graves conséquences locales sur la vie des peuples autochtones et l’écosystème polaire, notamment sur l’ours blanc, son plus emblématique représentant. Mais au-delà des conséquences locales, la disparition de la banquise au pôle Nord va nous conduire inévitablement vers une période de chaos climatique, notamment dans l’hémisphère Nord.
La sauvegarde de la banquise est un enjeu majeur pour lequel chaque citoyen à sa part de responsabilité. Faisons de la banquise l’indice de la capacité de l’humanité à juguler les émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale.
La France avait joué un rôle majeur pour le moratoire qui protège aujourd’hui l’Antarctique. Je souhaiterais que le gouvernement français, dans le cadre de la Présidence du Conseil de l’Union Européenne, adresse un signal fort à la communauté internationale, afin de proposer à l’Assemblée générale des Nations unies, le vote d’une résolution qui classerait la banquise de l’océan Arctique, “Zone d’intérêt commun pour l’humanité”.
C’est un projet politique pertinent et non conflictuel, qui engage la communauté internationale sans porter atteinte à la souveraineté des Etats de la circonférence polaire arctique.
Si vous souhaitez marquer votre soutien pour cette initiative envoyez vos noms prénoms, adresse et e-mail à petition@jeanlouisetienne.com
Or “la banquise disparaîtra totalement entre 2013 et 2040” a affirmé le porte-parole du programme Arctique de WWF le 12 septembre dernier… de quoi avoir froid dans le dos… et se bouger pour soutenir la pétition!
Enfin, lorsque l’on croise les vélléités et dissenssions existant du côté du Canada, de la Russie et des Etats-Unis avec l’incapacité de l’ONU a raisonner véritablement la Russie lors des événements récents en Géorgie… et avec le désir de Mac Cain qui, s’il est élu aux Etats-Unis, entend bien étendre les forages au large de l’Alaska et mettre la fin du moratoire fédéral qui empêche l’exploration off-shore… je me dis que la pression devra être très forte pour arrêter les volontés d’exploitation dans cette zone… vous ne pensez pas…?
++ Liens ++
- Le texte de Jean-Louis Etienne et le lien vers son site: http://www.jeanlouisetienne.com
- L’étude de l’USGC - Circum-Arctic Resource Appraisal: Estimates of Undiscovered Oil and Gas North of the Arctic Circle - Kenneth J. Bird, Ronald R. Charpentier, Donald L. Gautier (CARA Project Chief), David W. Houseknecht, Timothy R. Klett, Janet K. Pitman, Thomas E. Moore, Christopher J. Schenk, Marilyn E. Tennyson, and Craig J. Wandrey
- France 24, 11 Septembre 2008, l’Union Européenne s’intéresse aussi à l’Arctique
- Bon article d’Ecodemer sur Agoravox