Interview : Isabelle Quéhé

En novembre 2004, cette ancienne chef de pub lance la première édition d’un salon d’un nouveau genre. C’est la naissance d’Ethical Fashion Show, un rendez-vous qui prend le pari de faire découvrir des créateurs de mode éthique aux professionnels et au grand public. Aujourd’hui, Isabelle Quéhé s’apprête à lancer la cinquième édition qui prendra place au sein du Carrousel du Louvre à Paris, là où se tiennent ordinairement les défilés de mode. L’événement se tiendra du 9 au 12 octobre 2008.

- Comment l’idée d’un salon de mode éthique a t-elle germé dans votre tête ?
- Disons que mon parcours a été rythmé par beaucoup d’expériences. J’ai été chef de pub, créatrice de tee-shirts, j’ai lancé les Free Market en banlieue et je suis aussi maman de trois enfants. Ces derniers m’ont donné l’envie de donner une nouvelle orientation à mon travail. J’ai alors créé l’association Universal Love pour organiser des ventes qui permettent de faire découvrir des créateurs de pays émergents. Je voulais proposer une mode différente, qui véhiculerait des valeurs équitables et de cœur.

- Vous êtes partie de zéro. Comment ont été les débuts ?
- Et bien la première édition en novembre 2004 a eu lieu avec une vingtaine de créateurs dont faisaient déjà partie Ideo, Seyes, Veja et Misericordia. Nous avons alors mis en place le Manifeste de la mode éthique (12 pages qui portent sur les critères sociaux, environnementaux, le savoir-faire) qui est aujourd’hui devenu un vrai questionnaire qui nous permet de juger du sérieux d’une marque. Mais surtout j’ai appris sur le tas en allant frapper chez Max Havelaar, au magazine Ekwo et en contactant les Ministères. Bref, nous avons été les premiers à parler de mode éthique et beaucoup ne nous prenait pas au sérieux. Depuis, certains marchent sur nos plates-bandes.
- Aujourd’hui, cette cinquième édition prouve que vous avez eu raison d’y croire. C’est une belle réussite, non ?
- Oui, c’est l’étape de reconnaissance. Aujourd’hui l’Ethical Fashion Show est une vraie plate-forme qui regroupe pendant quatre jours un showroom, des conférences, des défilés. Cette année ce sont plus de 100 marques françaises et internationales (Pérou, Mexique, Nigeria, Brésil…) qui vont se réunir sur 1 900 mètres carrés et tout cela dans un lieu symbolique : le Carrousel du Louvre.
- Justement comment voyez-vous l’évolution de ce marché de la mode éthique ?
- Il y a une vraie montée en gamme des collections et du style. On est passé du simple vêtement de yoga à des pièces très habillées. Je crois que c’est une sorte de synergie qui fait que tout le monde progresse en même temps. Désormais il est bien plus facile de trouver une filière éthique. Et les acheteurs sont là.
Preuve de cet intérêt, le catalogue La Redoute est notre partenaire depuis 2006 et il offre la possibilité à une marque du salon d’apparaître dans ses pages avec ses produits (parmi les gagnants : Tudo Bom ?, Judith Condor Vidal, Ethos).
Pour autant, nous sommes restés une petite structure et avons gardé le statut d’association.
- Et l’avenir d’Ethical Fashion Show, vous le voyez comment ?
- Nous allons continuer à avoir ce positionnement mode, mais nous allons aussi développer le côté savoir-faire. Par contre nous ne voulons surtout pas devenir une grosse foire mais rester très sélectif. C’est cela qui fera notre différence sur ce « green business ».
L’étape prochaine sera de lancer une édition à Rio de Janeiro en juin 2009. D’autres villes nous semblent aussi très intéressantes comme San Francisco ou Barcelone…
- Enfin, quel regard vos enfants portent-ils sur la mode ?
- Ils ont 20 ans, 17 ans et 15 ans et ils ont tous un regard très critique. Cela les intéresse, mais l’offre qui leur est proposée (tee-shirts, baskets) est encore peu importante. Il faudrait l’étoffer car ils ont un pouvoir d’achat très important. Ils n’hésitent pas à mettre le prix.