Fumer contre la crise

Avant, j’aimais pas les fumeurs. Alors un jour je m’suis dit : “ ils coûtent 38 millions d’Euros par an à
la Sécu ? Et bien faisons leur payer leur dette.” 

J’ai alors divisé 38 millions par 13 millions (le nombre de fumeurs en France), pour savoir combien leur demander par an pour rembourser ce qu’ils coûtent à la Sécu. 

Je m’suis alors aperçu que ça n’faisait que 2,92 Euros par an et par fumeur. 

Comme je ne les aimais vraiment pas, je m’suis dit : faisons leur payer le double pour enrichir
la Sécu. Mais ça ne faisait toujours que 5,84 Euros par an. 

J’ai alors compris qu’une activité qui couvre deux fois plus qu’elle ne coûte à son assurance en ne payant que 5,84 Euros par an ne pouvait pas être aussi dangereuse qu’on voulait bien le dire. 

J’ai aussi compris que quelque part on se foutait du monde et je suis devenu fumeur moi aussi. 

Mais maintenant l’état au lieu de me prendre 2,92 Euros ou même 5,84 Euros par an, me prend 4 Euros par paquet de cigarette. 

J’avais bien compris, on se fout du monde. 

   Robin des clopes    

Ce texte a été gentiment cédé par Jean-Claude Masse, le défenseur des droits des fumeurs à l’œil précis et au calcul implacable. Connaissiez-vous l’argument “économiciste” contre la cigarette? 

C’est simple : les fumeurs ont tendance à développer des maladies (cancer du poumon, problèmes cardiaques) aux traitements coûteux, donc ils coûtent une fortune à la sécurité sociale et ils travaillent moins longtemps que les non-fumeurs parce qu’ils deviennent malades et meurent. Les fumeurs seraient ainsi responsables à la fois pour la crise de la sécurité sociale et pour une perte de productivité. 

Tout cela pourrait avoir l’air sérieux (même si la sécurité sociale doit être là justement pour les gens qui tombent malades)… à condition de ne pas connaître les chiffres. Un grand merci d’abord à Jean-Claude pour m’avoir attiré l’attention sur les bons chiffres. Les voici donc (pour la France): 

Coût des fumeurs à la sécurité sociale en 2005 : 48 millions d’euros (source: Nouvel Observateur). 

Recettes des taxes sur le tabac en 2001 : 10,4 milliards d’euros (plusieurs sources !) 

Reste à dire que depuis 2001 les taxes ont augmenté. En 2005, les dépenses liées à la maladie atteignaient près de 129 milliards d’euros. Les taxes sur le tabac ”rempliraient” donc près de 10% de ces dépenses! 

Les fumeurs financent (abusivement, même) la sécurité sociale et contribuent beaucoup plus qu’ils ne dépensent. En Europe, les interdictions de fumer ont souvent entraîné une légère hausse de la consommation de tabac. C’est donc “une bonne nouvelle” pour les législateurs Français : tout aura l’air propre et contrôlé et, à la fois, les coffres de l’État continueront à être remplis par les fumeurs. On dirait un film de science-fiction cauchemardesque – sauf que ça se passe aujourd’hui et que les chiffres sont disponibles pour tout le monde! 

Finalement, nos amis fumeurs Américains, organisés et pleins de bonnes répliques comme les Anglais, démentent l’argument de “la perte de productivité” : si (selon certaines études) c’est vrai que les fumeurs meurent en moyenne 6 à 7 ans plus tôt que les non-fumeurs, ils évitent ainsi une bonne partie des énormes dépenses de l’État liées aux maladies de la vieillesse, et permettent donc d’alléger encore les dépenses de la sécurité sociale, tout en sachant qu’ils vivront assez pour travailler jusqu’à la âge de retraite!!! 

“On se fout du monde…”