Il faisait froid, dans les appartements. Le mois de décembre était déjà bien entamé. Nous ne savions pas vraiment quand la ville allait mettre le chauffage en route, ni même si elle allait le
mettre en route.
Une lettre avait été envoyée aux citoyens : "Il est un contexte international et des circonstances particulières que ni l'Etat, ni les communautés locales peuvent contrôler."
Comme si à l’Elysée, le président se gelait les couilles, lui…Dire qu’il transpirait sous les ors de la République était sans doute exagéré. Il faut travailler un peu pour transpirer.
Mais en tout cas, il ne mourait pas de froid comme les habitants des HLM.
La crise pétrolière avait éclatée en 2038. Comme prévu, ou presque. On avait surconsommé, on avait dépensé, on n’avait pas réfléchi, on n’avait pas cherché d’alternative. La Chine avait continué
de produire, elle avait explosé, elle avait rapidement rejoint le train de vie occidental.
Si on avait cru un moment que les scientifiques allaient trouver l’alternative, on se rendit vite compte que rien ne serait plus vraiment pareil avant bien longtemps.
Le temps de l’adaptation était nécessaire, mais on était maintenant au cœur de l’hiver et on se caillait. Les gens avaient décidé d’improviser des feux dans leurs appartements. On recensait déjà
beaucoup d’incendies. On brûlait tout. Les meubles, les linges, les livres.
Les livres, en plus, c’était un bon débarras. Il y avait longtemps qu’on ne faisait plus que les écrire et à la rigueur, les acheter. Plus personne ne les lisaient. Le manque de temps et le
manque de culture étaient plus terribles encore que le manque de pétrole. Mais les hommes ne s’en rendaient pas compte…
CC