La liberté de la presse a-t-elle encore un sens aujourd’hui en France ? C’est ce que tente de démontrer Mediapart, le « journal d’information numérique, indépendant et participatif », créé en 2007 par Edwy Plenel, entre autres, à qui Wellnews a demandé d’en rappeler les fondamentaux. Diplômé de Sciences politiques, Edwy Plenel entre au journal Le Monde en 1980. Il y occupera diverses fonctions dans plusieurs services, passant de journaliste à grand reporter, puis rédacteur en chef avant de prendre le poste de directeur de la rédaction en 1996. En 2001, il devient Directeur général-adjoint de la société Le Monde SA puis est nommé directeur délégué en janvier 2004. Il démissionne en 2004 et quitte Le Monde l’année suivante. Il rédige depuis 2005 des chroniques politiques et littéraires pour France Culture, LCI, RTL et le quotidien Le Soir de Bruxelles. Il crée Mediapart en 2007, en collaboration avec François Bonnet, Gérard Desportes et Laurent Mauduit.
Vous soulignez dans la présentation de Mediapart qu’il s’agit d’un « journal d’information numérique, indépendant et participatif ». Vous avez baptisé votre projet « Le prix de la liberté ». L’indépendance est manifestement pour vous un pré-requis indispensable à l’exercice du métier de journaliste.
Il n’y a pas de journalisme authentique sans indépendance. Indépendance à l’égard des pouvoirs, politiques, économiques et idéologiques. Etre journaliste, c’est être au service des citoyens. C’est s’engager à les informer honnêtement, scrupuleusement, contradictoirement, mais dans l’absolu respect de la vérité factuelle. Toute dépendance contredit cette ambition. La bataille de Mediapart, c’est de convaincre nos concitoyens que la liberté a un prix : celui de l’abonnement. La gratuité de l’information est un leurre qui prépare son uniformisation.
Mediapart propose également un modèle volontiers participatif. La « presse citoyenne » a le vent en poupe… Effet de mode ou pratique d’avenir ?
Journal totalement indépendant, Mediapart renouvelle en profondeur la relation d’un journal et de ses lecteurs. Il y a une crise de confiance des citoyens envers un journalisme installé, conformiste, suiviste et lointain. Nous n’avons pas le monopole de l’expertise, du commentaire, de l’analyse, de l’opinion et du point de vue – c’est une liberté d’expression qui appartient à tous. En revanche, nous avons un métier, avec ses compétences et ses urgences : enquêter librement, chercher l’information inédite, échapper à la communication trompeuse, aller sur le terrain. Mediapart associe ces deux dimensions : un journal numérique totalement inédit et un club ouvert à tous ses lecteurs, avec ses blogs individuels et ses éditions participatives.
Qu’est-il ressorti de la conférence qui s’est tenue en mars dernier - dont vous étiez partenaire - qui avait pour thème « L’indépendance de la presse : un enjeu démocratique » ?
C’était, à Lyon, l’un des nombreux débats auxquels nous avons participé pour présenter Mediapart. J’en ai surtout retenu la distinction par le philosophe Bernard Stiegler entre « presse » et « médias », indépendamment du support technique. La presse numérique que nous défendons à Mediapart s’oppose aux logiques de flux, d’instantanéité et d’audience, en promouvant les valeurs de hiérarchie, de rigueur et de profondeur d’une information de qualité.