Les ouvrages, les articles ou les conférences sur les écogestes et les comportements citoyens ont le vent en poupe! On ne dénombre plus le nombre de publications décidées à vous faire comprendre qu’il faut changer… “parce que sinon tu comprends, ta planète elle ira mal…” Or ceux qui n’en sont pas convaincus perçoivent ces ouvrages comme des traités moralisateurs, ils soupirent ou rigolent parfois… et c’est vrai n’est-ce pas, à quoi bon changer, puisque les autres ne le feront pas… ou parce qu’au contraire, je vais les laisser faire, ça vaudra mieux pour moi… l’écologie, c’est un truc de guignols se disent même certains…
Bref, quand vous avez envie de dire STOP et faire comprendre que les utopistes sont ceux qui croient que l’on pourra continuer comme ça… j’ai une bonne solution: offrez aux réticents l’ouvrage de Marie France Corre, La consommation responsable de A à Z, ou apprenez-le et essaimez-en les graines de renseignement et de bon sens qu’elle y prodigue dès que possible !
Une simple réflexion en page 1, deuxième paragraphe de l’introduction, m’a fait tilté, tant il résume tout…:
“On apprend à lire, à nager, à conduire, mais pas à consommer. Nul besoin de diplôme pour pousser un chariot dans les allées des grands surfaces. Pourtant, pour choisir des produits adaptés à ses besoins, comparer les prix, décrypter les étiquettes, éviter les arnaques, il faudrait pratiquement une formation en consommation couronnée par un diplôme d’Etat. De telles formations n’existent malheureusement pas. On y enseignerait aux étudiants à acheter pour vivre et non à vivre pour acheter, à consommer utile, à choisir des produits solides et durables, qui ne nuisent pas à leur santé, à opter pour des produits écologiques et fabriqués dans des conditions respectant la dignité humaine”
Et quoi de plus vrai n’est-ce pas ? Personne ne vous apprend à consommer, lâchés que nous sommes dans une jungle où publicités, marketing, harcèlement visuels et oraux s’enchaînent pour vous faire acheter plus, pour consommer plus… Mais au fond, savez vous quels sont les impacts de vos achats sur votre environnement (entendu au sens large) ? Avez vous pour réflexe de vous poser des questions avant de tendre votre petit bras vers le gros méchant produit qui vous fait des courbettes dans son joli emballage aux couleurs flashy… ? Si oui, passez votre chemin (mais ne vous éloignez pas trop quand même…), si non, laissez vous prendre la main par Marie-France Corre, vous ne le regretterez pas.
En lisant son livre, vous le verrez, vous apprendrez plein de choses sur tous les produits qui nous entourent, vous commencerez à vous poser des questions sur votre manière de dépenser, et surtout… SUR TOUT! Pour chaque entrée de l’ABCdaire, un point santé précède les aspects écologiques, puis viennent le point budget et les bons conseils. Du lien entre la consommation de bonbons et la hausse des caries chez les enfants de moins de 6 ans… à la place des bananes dans les plantes alimentaires d’importance dans le monde… mais aussi de la part des centrales d’achat dans la distribution alimentaire en France à l’équivalent en valeur travail de l’achat d’un poulet, Marie-France Corre semble tout savoir: la consommation n’a plus de secret pour elle. En même temps, qui mieux qu’elle peut être informée de cette manière!!
L’auteure: une vraie pro de la conso
Son diplôme d’ingénieur en design industriel, matériaux et innovations technologiques en poche en 1986, Marie France a eu quelques expériences professionnelles décevantes : “à cette époque”, m’explique-t-elle, “le design venait après la conception, la conception ne prenait pas en compte le consommateur”. Or en 1989, l’opportunité se présente et elle entre dans l’association UFC Que Choisir en tant que directrice des tests produits: un bon moyen pour travailler sur sa passion et allier ses préoccupations environnementales (son projet de recherche s’intéressait à la géothermie, mais elle s’est aussi penchée sur la question des panneaux solaires et a travaillé pour Ingénieurs Sans Frontières à l’époque)!
Au début des années 1990 me raconte-t-elle, l’évaluation des produits ne s’intéressait aux effets sur l’environnement qu’en termes d’impact sur la nature (qualités des eaux, radioactivité), mais les effets sur notre environnement plus proche (les impacts directs) ont rapidement été pris en compte dans les tests. Marie-France Corre s’intéresse alors de plus en plus à l’aspect social de la fabrication des produits (cf. la polémique des Sweat Shop, à la fin des années 1990 cette fois ci) et réalise que la RSE (responsabilité sociale des entreprises) est indissociable d’une évaluation entière et objective des produits de consommation… Une dimension que tout le monde n’arrive pas à cerner, si bien qu’en 2006, Marie France décide de partir travailler à son compte pour accompagner la prise de conscience des consommateurs, associations, distributeurs et fabricants…
Marie-France Corre
Marie France me confie qu’avant de quitter son précédent travail, fin 2005, elle fut choqué lors d’un déplacement professionnel aux Etats Unis de voir à quel point leur société est faite pour accueillir la consommation, sans parler des problèmes d’obésité et d’une jeune chanteuse black qu’elle voit alors à la télé répondre à un animateur qui lui avait demandé ce qu’elle n’aimait pas… “je déteste la consommation” répondait la jeune femme… Réalisant alors que l’écart entre les Etats-Unis et l’Union Européenne n’est plus aussi fort qu’il y a 20 ans, Marie-France décide d’écrire, elle stocke les informations dont elle dispose puis se plonge pendant un an dans la rédaction de son ouvrage, La Consommation Responsable de A à Z.
Pourquoi les comportements changent-ils si difficilement?
Vanité et désir de démarcation sont au centre des logiques de consommation, il s’agit d’une manière de gagner et signaler un statut social. De cette “consommation remarquable” vient aussi souvent un “gaspillage”, une “perte remarquable”. Ce paradoxe économique explique d’ailleurs que la hausse du prix d’un bien entraîne la hausse de la consommation de ce bien. Cet “effet ostentatoire” concerne avant tout les classes supérieures, mais l’exemple des vêtements de marque auprès des jeunes moins favorisés est également une bonne illustration de cet effet (sans parler des “victimes de la mode”…) Il s’agit moins d’esthétique que de signifiants de puissance! Dans cette logique, on privilégie l’avoir à l’être, et on aime se faire remarquer pour ce que l’on possède. Dans une logique responsable, on appréciera d’être remarqué pour ce que l’on est, et ce que l’on ne possède pas même, véritable signe extérieur de richesse pour certains…
L’individualisme est aussi une source d’explication pour Marie-France Corre: en France, on a beau être informé et à l’écoute des mises en garde d’associations de consommateurs, notre esprit collectif est bien moins développé que dans d’autres pays (les pays anglo-saxons ou nordiques par exemple) où les opérations de boycott sont généralement très suivies. Nous sommes encore des générations matérialistes et les envies de consommer ne sont pas toujours prêtes à écouter les conseils… sensation de privation oblige. Il est nécessaire d’agir sur ce matérialisme, de montrer, un peu à la manière de la désormais fameuse “Story of Stuff”, qu’à chaque achat il se passe quelque chose quelque part…
Extrait de “The Story of Stuff”, d’Annie Leonard
Sans parler des stratégies marketing… et même si les fabricants et distributeurs changent depuis 3 ans, en étant plus à l’écoute des consommateurs, ils connaissent aujourd’hui un certain retard dans leur offre…
Les solutions?
Elles sont nombreuses dans le livre de Marie France Corre. Pour elle, faire simple est un bon principe. Nous ne sommes pas obligés de “manger tout en bio”, mais ne pas gaspiller la nourriture, ne pas trop manger sont déjà des comportements plus responsables. Si un objet vous tente trop? Demandez vous si vous vous en servirez vraiment… quand on sait que 40% des achats sont faits sans réfléchir… cela pèse rapidement…
Les leviers demeurent, selon elle, dans la dématérialisation de notre société, mais aussi dans la progression de l’offre des fabricants (ils doivent saisir que les services auront bientôt plus de valeur que les produits)… Le GreenWashing doit aussi cesser… “autrement ils continueront à paupériser le client d’office!” s’insurge-t-elle. Enfin, la clef résidera également dans l’habitat: le défi énergétique, le mitage urbain, la création de collectifs offrant services et confort de vie…
Le bon sens et la raison sont donc indispensables pour avoir un éco-profil acceptable… et ce bon sens et les raisons qui vous pousseront à l’avoir, vous en trouverez les clefs dans cet ouvrage, c’est certain!!