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S’éclater en musique

Publié le 11 septembre 2008 par Alain Hubler

Gustavo DudamelChose promise chose due, voici l’article, signé Myriam Tétaz, qui n’a pas pu être publié par 24 Heures pour cause d’incompatibilité informatique.

Mieux que l’alcool, la drogue et les botellones, la musique révolution! «Vous changerez le monde», a lancé un certain José Antonio Abreu, musicien, économiste, devenu ministre de la culture au Venezuela. Il a fondé le premier orchestre de jeunes du pays. Il y en a maintenant plus de 250: orchestres de la petite enfance de 4 à 7 ans, d’enfants de 7 à 15 ans, de jeunes de 15 à 22 ans. L’Orchestre de jeunes Simon Bolivar du Venezuela, qui groupe les meilleurs musiciens dirigé par Gustavo Dudamel, issu de ses rangs, tourne sur les scènes les plus prestigieuses du monde. Il joue en ce moment au Festival de Lucerne.

Le monde n’a peut-être pas encore changé, mais bien la vie de plus de 250.000 enfants et adolescents du Venezuela, dont 60% vient des milieux les plus défavorisés. A ce gosse, déjà neuf fois condamnés pour vols et drogue, on a donné une clarinette – «à ne pas tenir comme un pistolet, l’ami!»-, à ces malentendants sans avenir, on a appris à chanter. Certes ils ne passeront pas tous, comme ce jeune contrebassiste, de la rue à la Philharmonie de Berlin. Pas question d’en faire des petits Mozart, comme le demandait bêtement un journaliste de la RSR l’autre matin. Est-ce qu’on enseigne l’allemand pour faire des petits Goethe et les maths pour faire des petits Einstein?

Ce que ces enfants apprennent, par la pratique d’un instrument dans un orchestre, c’est la persévérance, la concentration, la discipline, mais aussi la camaraderie, la coexistence, la tolérance et la joie de vivre. «On apprend à être», me confiait avec enthousiasme et émotion un Vénézuélien de Lausanne qui a vécu sur place le début de l’aventure, en 1975. Etre, trouver sa place, indispensable qu’on soit chef d’attaque ou dans le rang. La compétitivité y est dès lors positive: il ne s’agit pas d’être meilleur que les autres, mais d’accéder à son niveau d’excellence pour que l’orchestre sonne et que la musique soit belle, musique classique ou latino-américaine.

«La musique transforme l’adversité en espoir», prétend Abreu. Il ajoute: «L’art n’est pas le monopole des élites, mais un droit social pour notre peuple. Le jour où nos écoles incluront dans leur programme de base l’enseignement de l’art à tout élève, de l’enfant de 2 ans à l’étudiant d’université, le monde sera changé.» C’est vrai tout autant pour ces milliers de laissés-pour-compte, d’exclus de la société vénézuélienne que pour des jeunes d’autres classes sociales, chez nous et ailleurs, qui ne trouvent de remède à leur mal de vivre que dans des botellones ou la violence gratuite. Il serait bon de s’en souvenir alors que court la récolte de signatures pour l’initiative en faveur de la musique à l’école et le jour où on devra la voter!

Le «système national des orchestres symphoniques de jeunes et d’enfants du Venezuela», on l’a compris, dépasse les simples considérations artistiques ou culturelles, c’est un mouvement social et éducatif qui insère les jeunes dans la société, sans qu’il y perdent leur fantaisie, leur espièglerie, leur frénésie de vivre. Des jeunes comme les autres, mais qui ont appris à «être».

Myriam Tétaz
Conseillère communale POP


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